Dire, ne pas dire

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Ça ne le regarde pas ou Ça ne lui regarde pas ?

Le 15 mai 2025

Emplois fautifs

Quand le verbe regarder a son sens le plus courant, il n’y a pas d’hésitation sur la construction des pronoms qui remplacent son complément d’objet direct : de nombreux spectateurs regardent le match ; de nombreux spectateurs le regardent. En ce sens, il peut bien sûr se mettre à la voix passive : le match est regardé par de nombreux spectateurs. Mais quand ce verbe signifie « concerner ; être d’intérêt ou d’importance pour », il y a parfois des hésitations sur la forme que prend le pronom complément d’objet direct. Rappelons donc que si aux 1re et 2e personnes du singulier et du pluriel, les pronoms C.O.D. et C.O.I. sont les mêmes, me, te, nous et vous, cela n’est pas le cas à la 3e personne : on dira bien cela ne le regarde pas et non cela ne lui regarde pas. Rappelons également que, quand il a ce sens, regarder ne peut se mettre à la forme passive et que si l’on peut dire cela ne me regarde pas, ne le regarde pas, on ne peut dire je ne suis pas, il n’est pas regardé par cela.

Le glaïeul et l’espadon

Le 15 mai 2025

Expressions, Bonheurs & surprises

Glaïeul et espadon ont en commun la particularité de tirer leur nom de celui d’une arme : glaïeul est en effet issu du latin gladiolus, qui désigna d’abord une courte épée puis un glaïeul, lui-même diminutif de gladius, « épée, glaive », ce qui en fait un parent étymologique de glaive, mais aussi de gladiateur. Espadon, lui, est emprunté de l’italien spadone, désignant une grande épée, dérivé de spada, « épée », lui-même issu, par l’intermédiaire du latin spatum, du grec spathê, qui désignait une épée ou un battoir. En français, le mot espadon a d’abord été le nom d’une longue épée à double tranchant qu’on tenait à deux mains. On n’en usait pas comme avec les épées actuelles : elle avait plus à voir avec les épées massives des Gaulois ou des Germains qu’avec celles des légionnaires romains, tenues, elles, à une main. Elle se maniait plutôt comme le bâton de frère Jean des Entommeures dans le passage de Gargantua où Rabelais le met en scène : « Il chocqua doncques si roydement sus eulx sans dyre guare, qu’il les renversoyt comme porcs frapant à tors & à travers à la vieille escrime. » Par extension, espadon est aujourd’hui le nom d’un poisson dont la mâchoire supérieure est pourvue d’un rostre en forme d’épée. Cette particularité anatomique fait qu’on l’appelle aussi poisson-sabre ou poisson-épée. Cette dernière forme est d’ailleurs la traduction littérale de son nom dans d’autres langues européennes : swordfish en anglais, Schwertfisch en allemand, pez espada en espagnol et pesce spada en italien. Quant à son nom scientifique, c’est Linné qui le lui donna en 1758, mêlant grec latinisé et latin puisqu’il le baptisa xiphias gladius. Nous avons déjà rencontré le terme gladius, mais xiphias mérite également notre intérêt ; c’est un dérivé du grec xiphos, qui désignait une épée mais aussi, déjà, un espadon. (Notons au passage que le mot xiphias a d’ailleurs figuré dans notre Dictionnaire en ce sens de la 6e à la 8e édition.) Le grec xiphos nous permet de revenir à notre glaïeul puisque c’était un de ses dérivés, xiphion, qui désignait cette fleur. Armes, poissons et plantes continuent à se croiser aujourd’hui puisque, en grec moderne, glaïeul se dit spathokhorto, mot formé, lui aussi à l’aide de spathê. Pour en revenir à l’ichtyologie, signalons que notre espadon n’est pas le seul poisson à posséder un surnom formé à partir d’ « épée » : le xiphophore est en effet un poisson d’eau douce plus couramment appelé porte-glaive ou porte-épée. Il y a cependant de notre espadon à ce dernier quelques différences : le premier est un poisson de mer pouvant mesurer plusieurs mètres et peser plusieurs centaines de kilos, quand le deuxième fait à peine dix centimètres…

Nadège C. (France)

Le 15 mai 2025

Courrier des internautes

Quelle est la bonne orthographe du nom saprolit(h)e : doit-on l’écrire avec ou sans h, ou encore autrement ?

Nadège C. (France)

L’Académie répond :

Il existe, en français, un certain nombre de mots formés à l’aide du suffixe -lithe, tiré du grec lithos, « pierre », comme mégalithe ou monolithe qu’on ne rencontre que sous cette forme. Dans certains cas, c’est la forme sans h, -lite, qui s’est imposée, comme dans ophiolite, pierre encore appelée « serpentine » parce que sa couleur rappelle celle des serpents. Il arrive que les deux formes, en -lithe et en -lite, soient d’usage : c’est par exemple le cas avec oolithe, qui désigne une petite concrétion sphérique, calcaire ou ferrugineuse, constituée de fines couches concentriques entourant un nucleus, que l’on écrit parfois oolite. C’est visiblement le cas de la roche appelée saprolite ou saprolithe. Le Trésor de la langue française mentionne un terme homophone mais non homographe, saprolyte : le suffixe -lyte est, lui, emprunté du grec lutos, « qui délie ; qui peut être délié », que l’on retrouve dans le prénom Hippolyte, proprement « celui qui délie les chevaux ». C’est à l’aide de cet élément et de sapro-, tiré du grec sapros, « moisi », qu’est formé le nom saprolyte, qui désigne un organisme qui décompose les matières organiques.

Proverbe, adage, sentence, etc.

Le 3 avril 2025

Nuancier des mots

Dans la préface de son captivant Dictionnaire des sentences latines et grecques, l’helléniste et philologue italien Renzo Tosi, s’est penché sur la question des similitudes et des différences existant entre ces termes et d’autres de sens voisin. Tout en mesurant la difficulté de cette tâche, il écrit : « Il serait sans doute facile de répondre qu’un proverbe est une brève et lapidaire expression traditionnelle, qui délivre, le plus souvent à l’aide d’images et de métaphores, un enseignement moral et prend ses racines dans la sagesse populaire ; qu’un adage est une expression voisine du proverbe, mais dont les origines sont moins populaires ; qu’un apophtegme est au contraire une phrase célèbre attribuée à un grand personnage ; qu’une sentence, en quelques mots, exprime un enseignement moral, dont l’origine n’est plus populaire, mais érudite et littéraire ; qu’une maxime possède les mêmes caractéristiques qu’une sentence, mais qu’elle est plus développée, plus élaborée philosophiquement parlant, et qu’enfin un aphorisme est une pensée d’un auteur. »

Il existe en effet entre ces différents mots une forme de continuum, partant de ce qui nous est donné par une culture populaire, anonyme et orale, pour aller vers l’expression d’une sagesse plus érudite et écrite. Le proverbe n’a ordinairement pas d’auteur authentifié, même s’il existe cependant une exception de taille, puisque nombre des proverbes recensés dans un des livres de la Bible, intitulé précisément le livre des Proverbes, sont attribués au roi Salomon. Mais, le plus souvent, ces derniers semblent résulter d’une forme de génération spontanée et, si on les classe, c’est en fonction de leur origine géographique, de l’époque où ils apparaissent ou des sujets qu’ils traitent. Ils sont ainsi tout proches du dicton, dont notre Dictionnaire donne la définition suivante : « sentence, généralement d’origine populaire, devenue proverbiale », accompagnée de ces exemples, « Un dicton auvergnat, picard. Noël au balcon, Pâques aux tisons est un vieux dicton ». Ajoutons au passage que dicton est un parent étymologique de dit, mais ce dernier a un caractère plus élaboré, plus savant. Il désigne en effet soit les propos d’un personnage de l’Antiquité, soit un poème médiéval de caractère narratif, portant en général sur des sujets familiers, comme Le Dit de l’Herberie, de Rutebeuf.

En raison de son origine populaire, le proverbe fut longtemps tenu en piètre estime car considéré comme l’émanation d’une sagesse quelque peu méprisée. Aussi Féraud lui préfère-t-il l’adage, comme il l’écrit dans son Dictionnaire critique de la langue française : « Le proverbe est une sentence populaire : l’adage est un proverbe piquant et plein de sel. Il n’y a que du sens et de la précision dans le proverbe ; il y a de l’esprit et de la finesse dans l’adage. Le proverbe, qui joint à l’instruction des motifs d’agir, est un adage. » Si Féraud écrit que l’adage donne « des motifs d’agir », c’est probablement parce qu’il rattachait ce nom au verbe agere, comme le fit plus tard Littré, qui en proposait cette étymologie : « du latin adagium, de ad, “vers”, et agere, “pousser” : sentence qui pousse vers, conseil ». Mais, aujourd’hui, on s’accorde à voir en adagium un dérivé du verbe défectif aio, « je dis » : l’adage est donc, au sens propre, plus une formule qu’un encouragement. Ce même adage était ainsi présenté dans l’édition de 1798 de notre Dictionnaire : « On appelle Les Adages d’Érasme, Un recueil qu’Érasme a fait des Proverbes de la Langue Grecque et de la Langue Latine. » Il fallait bien le grec et le latin, langues savantes, et l’ombre tutélaire d’Érasme pour permettre aux proverbes d’accéder au statut d’adages. C’est aussi grâce au prestige de son auteur que le proverbe peut être anobli en sentence, en témoigne la 1re édition du Dictionnaire de l’Académie française dans sa définition de ce mot : « Dit memorable, Apophtegme, maxime qui renferme un grand sens, une belle moralité. Les Proverbes de Salomon sont autant de Sentences admirables. » La sentence possède un caractère plus moral, plus tranché que le proverbe : sans doute cela est-il dû au fait que ce nom s’emploie aussi dans la langue du droit pour désigner le jugement rendu par une autorité compétente, comme c’était déjà le cas en latin avec sententia. La sentence se caractérise aussi par sa concision, comme le prouve le fait qu’on lui adjoigne souvent l’adjectif lapidaire, que l’on peut entendre de deux manières, qui se complètent plus qu’elles ne s’excluent : parce qu’elle mériterait d’être gravée dans la pierre, pour que sa pérennité soit assurée, mais aussi parce que, grâce à son style concis et ferme, elle se grave aisément dans la mémoire. D’ailleurs, si, en rhétorique, le latin sententia désigne une phrase, il désigne aussi et surtout le trait marquant venant en conclusion de cette dernière. La forme la plus proche de la sentence est la maxime ; elles sont en effet voisines par le sens, mais aussi par l’étymologie. La maxime tire en effet son nom du latin médiéval maxima (sententia), littéralement : « (sentence) très grande ». La maxime appartient donc au genre de la sentence qui fait ici office d’hyperonyme, comme l’écrit Littré : « Sentence est plus général que maxime ; il peut se dire là où maxime se dit, mais maxime ne peut pas se dire partout où l’on dit sentence. » Et d’ajouter plus loin, pour préciser les nuances existant entre ces deux termes : « La maxime est une proposition importante qui sert de règle dans la conduite ; ce qui domine dans la signification de ce mot, c’est la grandeur, la force. La sentence est une proposition courte qui instruit et enseigne ; ce qui domine dans la signification de ce mot, c’est l’idée d’opinion, de manière de voir. »

Examinons, pour conclure, deux noms dont le caractère érudit et savant se manifeste, entre autres, par le fait qu’ils sont, de manière visible, d’origine grecque : aphorisme et apophtegme. Le premier est emprunté du grec aphorismos, « délimitation », puis « aphorisme », dérivé de horos, « limite, fin, frontière ». L’aphorisme est donc par essence concis. Littré le définit d’ailleurs comme une « sentence renfermant un grand sens en peu de mots ». Féraud signalait qu’« Il se dit sur-tout en Médecine » et évoquait « Les aphorismes d’Hippocrate ». Le second est emprunté du grec apophthegma, « sentence, précepte », dérivé de phtheggesthai, « émettre un son ». Comme l’aphorisme, l’apophtegme se caractérise par sa concision, mais, plus encore, par le fait qu’il est attribué à un personnage connu, ordinairement de l’Antiquité ; les apophtegmes les plus fréquemment cités étant d’ailleurs ceux des sept sages de la Grèce, de Scipion ou de Caton. La renommée de leur auteur fait que, même s’ils appartiennent au même champ sémantique que les proverbes, ils en sont en quelque sorte à l’opposé.

Péril en la demeure

Le 3 avril 2025

Emplois fautifs

Demeure désigne essentiellement aujourd’hui le lieu où l’on vit habituellement, un domicile, une résidence, mais ce n’est pas son sens premier. Ce nom a en effet d’abord signifié « retard ». Le verbe dont il est tiré, demeurer, a connu une évolution semblable, le sens de « tarder » apparaissant en effet au milieu du xie siècle, et celui de « résider en un lieu » seulement un siècle et demi plus tard. Ces formes sont liées au latin mora, « retard », dont on a tiré morari, « rester, tarder, être en retard », et elles sont donc parentes du nom moratoire, qui désigne à la fois la suspension momentanée et exceptionnelle de certains paiements ou de certaines actions en justice, et l’acte par lequel un créancier accepte de reporter la date d’échéance d’une dette ou d’en échelonner les paiements.

C’est cette idée d’attente, de retard que l’on trouve dans l’expression péril en la demeure, qui signale qu’il y aurait danger à différer davantage, à ne pas prendre au plus tôt les décisions qui s’imposent, et non que l’on ne serait pas en sécurité en demeurant dans telle ou telle habitation. On veillera donc à ne pas substituer, dans cette expression, la préposition dans à en comme cela se fait parfois.

« Au terme de » ou « Aux termes de » ?

Le 3 avril 2025

Emplois fautifs

En français, le pluriel des noms, en dehors de quelques formes en -al (cheval/chevaux) ou en -ail (vitrail/vitraux) ne se perçoit pas à l’oreille, et que l’on écrive maison ou maisons, chien ou chiens, la prononciation ne varie pas. Sans doute est-ce pour cela qu’on oublie parfois qu’il est des tours dont le sens change selon que le nom qu’il contient est au singulier ou au pluriel. C’est le cas pour le couple au terme de et aux termes de. Rappelons donc que la locution au terme de signifie « à la fin, à l’achèvement de », tandis qu’aux termes de signifie « selon le texte de ». On écrira donc Au terme de son mandat, il ne s’est pas représenté, mais Aux termes de la Constitution de la Ve République, l’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement.

On ne confondra pas ces termes, bien sûr, avec le nom pluriel thermes, qui désignait des établissements de bains dans la Rome antique, et on rappellera aussi que Stazione Termini, à Rome, doit son nom aux thermes de Dioclétien tout proches et non au fait que cette gare est un terminus…

Des cœlacanthes dans la grammaire ?

Le 3 avril 2025

Expressions, Bonheurs & surprises

En 1938 fut pêché dans l’estuaire de la Chalumna, en Afrique du Sud, un poisson dont on pensait qu’il avait disparu depuis soixante-cinq millions d’années, le cœlacanthe. Il avait conservé nombre des caractéristiques morphologiques de ses très lointains ancêtres et, pour cette raison, on le considéra comme un fossile vivant. Le français mais aussi, à divers degrés, d’autres langues européennes, comme l’anglais, l’italien ou l’espagnol, ont également leurs cœlacanthes : les pronoms. Ceux-ci sont issus de langues à flexion, comme les noms et les adjectifs, mais, contrairement à ces derniers, ils ont conservé de leur vie antérieure la possibilité de changer de forme quand ils changent de fonction. Cela vaut bien sûr pour la plupart des pronoms personnels, qui prennent les formes je, tu, il, elle, ils et elles quand ils sont sujets, me, te, le, la et les quand ils sont compléments d’objet directs et moi, toi, lui, elle, leur, eux et elles quand ils sont compléments d’objet indirects, compléments circonstanciels ou compléments d’agent. Ces jolies survivances, présentes au singulier, disparaissent en grande partie, comme on le voit, au pluriel : les 1re et 2e personnes, quelle que soit leur fonction, prennent en effet toujours les formes nous et vous. Le phénomène avait déjà commencé en latin puisque les formes de nominatif et d’accusatif (nos, vos), d’une part, et les formes de datif et d’ablatif (nobis, vobis), d’autre part, étaient semblables. En ce qui concerne les pronoms relatifs simples, ils n’ont plus, contrairement aux pronoms relatifs composés, lequel, laquelle, lesquels, lesquelles, de marques de genre ou de nombre, et, dans certains cas, seule leur fonction dans la phrase conditionne leur forme : qui pour un sujet, que pour un complément d’objet direct et dont pour un complément du nom, qu’il s’agisse d’un animé ou d’un non animé.

Voici pour notre premier fossile vivant ; en est-il d’autres ? Dans Le Phénomène humain, le paléontologue et théologien Pierre Teilhard de Chardin mentionne notre cœlacanthe, mais également les dipneustes, ces poissons qui possèdent deux appareils respiratoires et qui, en fonction de leur environnement, utilisent l’un ou l’autre. Il est loisible alors de se demander si la grammaire ne recèlerait pas encore quelques dipneustes. La chance fait que l’un de nos plus grands romanciers nous présente justement deux personnages qui, non seulement s’intéressèrent aux fossiles mais qui, par la suite, se mirent à étudier la grammaire. C’est en se consacrant à cette dernière que Bouvard et Pécuchet découvrirent que « Le sujet s’accorde toujours avec le verbe, sauf les occasions où le sujet ne s’accorde pas ». Et de fait, grâce à la syllepse, l’accord se fait parfois en fonction de l’environnement, que l’on appellera plutôt ici le contexte. Flaubert note alors que cette assertion jette le trouble chez nos deux héros, désormais touchés par une manière d’insécurité linguistique, redoublée par cette angoissante question : « Doit-on dire “Une troupe de voleurs survint” ou “survinrent” ? » Comme, en fonction de l’effet voulu, on pourra choisir « survint » ou « survinrent », on admirera la plasticité de notre langue plutôt que de suivre nos deux héros, qui en tirèrent la conclusion « que la syntaxe est une fantaisie et la grammaire une illusion ».

Aline D. (Suisse)

Le 3 avril 2025

Courrier des internautes

Je trouve souvent, dans mon activité professionnelle, l’expression je suis confiant que dont je crois savoir, « à l’oreille », qu’elle est incorrecte. Pourriez-vous me le confirmer ?

Aline D. (Suisse)

L’Académie répond :

Le tour être confiant que est effectivement incorrect. On le rencontre sans doute parce que, étymologiquement, cet adjectif vient du verbe confier, qui admet, lui, comme complément d’objet une subordonnée complétive introduite par que. Il est peut-être aussi lié à avoir confiance que, qui est rare, mais que l’on trouve parfois chez de bons auteurs. Clemenceau écrit ainsi dans Vers la réparation (1899) : « J’ai bonne confiance que, lorsque les pièces auront été produites, il sera difficile aux plus menteurs de continuer leurs mensonges. »

« Abasourdir » : prononce-t-on « abazourdir » ou » abassourdir » ?

Le 6 mars 2025

Emplois fautifs

Dans abasourdir, le s intervocalique se sonorise en [z], mais on entend parfois abassourdir, parce qu’on rattache faussement ce verbe, dérivé de l’argot basourdir, « tuer », à l’adjectif sourd. Il est vrai que la règle phonétique qui veut qu’un s intervocalique (c’est-à-dire placé entre deux voyelles) se sonorise en [z] souffre de nombreuses exceptions. On constate en effet qu’elle ne s’applique pas quand on perçoit nettement le fait que l’on a affaire à un composé. On dit ainsi, sans sonoriser le s, asocial, parce que l’on y reconnaît social. C’est aussi la raison pour laquelle le s intervocalique reste sourd dans antiseptique, cosignataire, préséance, présupposer, prosimiens, etc. La prononciation variera donc selon que ce s est la première lettre d’un radical ou la dernière d’un préfixe. C’est ce qui explique la différence de prononciation de ce s dans désacraliser (où s appartient au radical) et désavantager (où s appartient au préfixe), ou dans trisecteur et trisaïeul. On constate aussi que ce s est parfois redoublé, comme dans ressauter, et que dans d’autres cas il ne l’est pas, comme dans resituer. Notons enfin que la prononciation canonique de désuet est déssuet, mais que l’on entend de plus en plus dézuet parce que l’on oublie ou l’on ignore que, dans ce mot, dé- est un préfixe.

« Nœud » pour « Mille marin » ou « nautique »

Le 6 mars 2025

Emplois fautifs

Les unités de mesure de la vitesse sont ordinairement composées d’une unité de distance et d’une unité de temps. On dira ainsi que les meilleurs sprinteurs courent à plus de dix mètres par seconde, soit à plus de trente-six kilomètres par heure.

S’agissant de la vitesse des navires, l’unité en usage est le nœud, qui correspond à un mille marin (c’est-à-dire 1852 mètres) par heure. Le nœud a la particularité d’être, à lui seul, une unité de mesure de vitesse. On dira donc Filer dix, vingt nœuds (c’est-à-dire parcourir dix, vingt milles en une heure), mais on évitera bien sûr l’expression Filer dix, vingt nœuds à l’heure.

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