L’Académie vit depuis 1635 sur un corps de droit écrit, formé de quatre textes ayant valeur de lois et règlements :
I — Lettres patentes pour l’établissement de l’Académie française, signées du roi Louis XIII en janvier 1635, enregistrées au Parlement le 10 juillet 1637 :
Statuts et règlements de l’Académie française, 22 février 1635, signés du cardinal de Richelieu et constitués de cinquante articles. À l’exception de quelques articles traitant du bureau (III), des modes de scrutin (X), de l’ordre du droit de parole (XVI), des jours de séance (XVII), des obligations de l’Académie à composer une grammaire, une rhétorique et une poétique (XXVI), de faire un discours en prose à chaque séance (XXVII et XXVIII), des conditions d’examen des ouvrages (XXIX à XLII, tombés en désuétude), les statuts de 1635 sont toujours en vigueur. Ils précisent la mission de l’Académie (XXIV) : « La principale mission de l’Académie sera de travailler avec tout le soin et toute la diligence possibles à donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences. » Les statuts décrivent l’organisation de l’Académie, les conditions de vote, de travail, les obligations des académiciens. Le nombre de membres de l’Académie est fixé dans les Lettres patentes : « limité à quarante personnes ».
II — Règlements pour l’Académie française, 30 mai 1752, signé par Louis XV.
Douze articles qui précisent les conditions de fonctionnement du bureau (art.2 : les officiers, directeur et chancelier sont nommés pour trois mois au lieu de deux), les conditions d’élection (art. 5 à 9) et les conditions d’approbation par le protecteur.
III — Ordonnance du roi concernant la nouvelle organisation de l’Institut, 31 mars 1816.
1. L’article Premier consacre la restauration de l’Académie française au sein de l’Institut.
2. Statuts de l’Académie française, 21 juin 1816. Dix-huit articles qui confirment l’organisation et les statuts des textes de 1635 et 1752, mais précise :
- que l’Académie tiendra une séance publique annuelle le 25 août (art.7),
- qu’elle tiendra des séances publiques pour la réception des nouveaux membres qu’elle aura élus et dont le choix aura été approuvé par Sa Majesté (art. 7 ; cette dernière disposition est propre à l’Académie française),
- les prétendants aux places vacantes sont invités à se dispenser de faire aucune visite aux académiciens pour solliciter leurs suffrages (art. 15, mais l’article 7 du règlement de 1752 ne les interdit pas).
3. Décision royale sur les honneurs accordés à l’Académie française, 10 juillet 1816 : « admission à l’honneur de haranguer le roi dans toutes les occasions où il reçoit les cours supérieures. » Cette décision confirme le règlement de 1752 : « admise à l’honneur de le haranguer dans toutes les occasions où il reçoit les compliments des cours supérieures. »
L’Académie est ainsi assimilée aux cours supérieures, comme instance suprême en matière de langue.
IV — Loi programme du 18 avril 2006 pour la Recherche. Articles 35 et 36 :
« L’Institut de France, ainsi que l’Académie française, l’Académie des Inscriptions et belles lettres... sont des personnes morales de droit public à statut particulier... »
« L’Institut et les académies s’administrent librement. Leurs décisions entrent en vigueur sans autorisation préalable. Ils bénéficient de l’autonomie financière sous le seul contrôle de la Cour des comptes. »
Ce dernier texte, dont l’Académie avait souhaité l’adoption depuis de longues années, lui a permis de renouer avec le statut d’indépendance perdu en 1792. Ce que le roi Louis XVIII n’avait pas voulu faire, par méfiance innée à l’égard de l’institution, Pierre Messmer, alors chancelier de l’Institut, l’a obtenu de la Ve République. Il n’implique aucun changement dans la vie quotidienne de la Compagnie qui, depuis 1816, a toujours vécu en harmonie avec les autres académies, mais lève une ambiguïté : celle de la relation entre Institut et académies. Toutes ces institutions sont indépendantes les unes des autres, égales entre elles. L’Institut de France est présidé et administré par les académies alors qu’il n’est pas partie prenante dans leurs missions et leur gestion. Cette indépendance retrouvée permet aux relations des institutions regroupées sous le toit du beau palais Mazarin, construit par Le Vau, d’être fondées sur la conscience d’une histoire partagée et d’un intérêt commun, ce qui conforte leur utilité et leur légitimité dans un monde où la précarité institutionnelle tend à s’accélérer.