Dire, ne pas dire

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Emprunt, Empreint

Le 2 avril 2015

Emplois fautifs

Dans le monde vivant, nombre d’espèces sont menacées d’extinction ; de même y a-t-il dans notre langue un son qui risque de disparaître. On tend aujourd’hui à ne plus prononcer le digramme un comme il se doit, mais à le prononcer comme le digramme in : la distinction entre brun et brin se fait de moins en moins nette, et ceux qui ne l’ont pas entendue ne pourront évidemment pas la reproduire. Cette perte de nuance dans la prononciation entraîne aussi des fautes d’orthographe : les formes emprunt et empreint, qui ne sont pas homophones,

sont de plus en plus confondues à l’oral, et le sont également, désormais, à l’écrit. On rappellera qu’empreint, participe passé d’empreindre, et emprunt, déverbal d’emprunter, ont des sens radicalement différents.

on dit et on écrit

on ne dit pas et on n’écrit pas

Un visage empreint de tristesse

Il a emprunté les vêtements de son frère

Un visage emprunt de tristesse

Il a empreinté les vêtements de son frère

 

Suspecter pour soupçonner

Le 2 avril 2015

Emplois fautifs

Dans certains cas, les verbes suspecter et soupçonner peuvent être employés l’un pour l’autre, ce qui n’est guère étonnant puisqu’ils remontent à deux verbes latins qui étaient synonymes. Suspecter est en effet emprunté du verbe suspectare, « regarder en l’air », puis « suspecter, soupçonner », qui est le fréquentatif de suspicere, « regarder de bas en haut », puis « suspecter, soupçonner », verbe dont est issu soupçonner. Suspecter et soupçonner peuvent s’employer l’un et l’autre pour parler de quelque crime ou délit : on dira ainsi indifféremment on le suspecte ou on le soupçonne du crime. Mais quand le fait évoqué n’est en rien répréhensible, seul le verbe soupçonner sera bienvenu.

on dit

on ne dit pas

Je la soupçonne d’avoir un faible pour Dominique

Je la suspecte d’avoir un faible pour Dominique

 

Hippo- ou Hypo-

Le 5 mars 2015

Emplois fautifs

Les éléments de composition hippo- et hypo- sont homophones, mais il importe de ne pas les confondre afin d’éviter de malencontreuses fautes d’orthographe. Hippo- est tiré du grec hippos, « cheval », et se retrouve dans des formes comme hippocampe, hippique, hipparque ou hippomobile. Il a aussi servi à fabriquer des noms propres comme Hippocrate, « celui qui dompte les chevaux », Hippolyte, « celui qui détache les chevaux », Philippe, « celui qui aime les chevaux », etc. Hypo- est tiré du grec hupo, « sous », et se rencontre dans des formes comme hypothermie, hypothèse (proprement « action de mettre en dessous ») ou hypophyse. Mais la langue est parfois malicieuse et l’on se souviendra que le vin sucré nommé hypocras n’est pas lié au préfixe hypo-, contrairement à ce que pourrait laisser croire sa graphie actuelle, mais est tiré, après de nombreux détours, du nom Hippocrate…

on écrit

on n’écrit pas

Un hippopotame hypocondriaque

Une hypothèse hippocratique

Un hypopotame hippocondriaque

Une hippothèse hypocratique

 

 

Partial pour partiel

Le 5 mars 2015

Emplois fautifs

Ces deux paronymes, bien que de sens différents, nous viennent tous deux du latin tardif partialis. Cet adjectif latin a d’abord qualifié ce qui ne constitue que la partie d’un tout, sens qui a donné le français partiel, puis une personne amenée à rendre une décision de justice favorisant l’une des deux parties, sens qui a donné partial. Contrairement au latin, le français a, comme on le voit, deux adjectifs différents pour désigner ces deux réalités, deux adjectifs que l’on se gardera bien de confondre.

on dit

on ne dit pas

Un résultat, un scrutin partiel

Un jugement partial

Un résultat, un scrutin partialUn jugement partiel

 

Plus pire, moins pire

Le 5 mars 2015

Emplois fautifs

L’immense majorité des comparatifs français est analytique : on les forme en adjoignant plus à l’adverbe ou à l’adjectif que l’on veut modifier : Elle est plus grande, il est plus jeune ; ils viendront plus tard, ils habitent plus loin. Il existe aussi quelques comparatifs synthétiques, hérités de la morphologie latine, très rares mais très employés : meilleur, pire, mieux, pis. L’ancien français en comptait quelques autres, comme majeur, maire (proprement « plus grand », puis « (fonctionnaire) du rang le plus élevé »), mineur, sire ou seigneur (proprement « plus vieux »), qui, en français moderne, ont perdu leur statut de comparatif. Meilleur signifie « plus bon », mieux « plus bien », pire « plus mauvais » et pis « plus mal ». Si, en dehors du langage des tout jeunes enfants, on n’entend guère plus mieux, les locutions plus pire et moins pire, elles, se répandent de plus en plus chez des locuteurs de tous âges. On rappellera que ces formes signifiant « plus plus mauvais » et « moins plus mauvais » sont de graves incorrections. De la même manière, il convient d’éviter les tournures aussi pire et si pire.

on dit

on ne dit pas

Cet hiver est pire que le précédent

Son devoir est moins mauvais que le mien

La situation n’est pas aussi mauvaise qu’on le craignait

Cet hiver est plus pire que le précédent

Son devoir est moins pire que le mien

La situation n’est pas aussi pire qu’on le craignait

 

« Parqueu » des Princes

Le 5 mars 2015

Emplois fautifs

Au cours de son histoire, le français a forgé des voyelles d’appui pour faciliter la prononciation d’un groupe de consonnes dont la première était souvent un s : ainsi les formes écrire, éponge ou étable nous viennent du latin scribere, spongia et stabula, par l’intermédiaire de l’ancien français escrire, espoinge et estable.

Si aujourd’hui ce phénomène peut encore être justifié s’agissant de mots ou expressions où l’on trouve quatre consonnes à la suite (ainsi le nom du journal Ouest-France est souvent prononcé Ouesteu-France), on s’efforcera, quand il y a trois consonnes ou moins de les articuler sans béquille linguistique et l’on dira le Parc des princes et non le « Parqueu » des Princes, l’Arc de triomphe et non l’« Arqueu » de triomphe.

Il risque de gagner

Le 5 février 2015

Emplois fautifs

Le verbe risquer signifie « s’exposer à un danger éventuel ou à une situation désagréable ». On ne peut donc l’employer qu’avec des termes appartenant à ces mêmes champs lexicaux. On dira très bien Il risque de se blesser, de perdre, il risque un accident, ou, si ce verbe est employé de manière impersonnelle, Il risque de pleuvoir. Mais on ne dira pas Elle risque de gagner ni Nous risquons d’avoir beau temps. De la même façon, avoir des chances ne peut s’employer qu’avec des termes ayant une connotation positive. On dira donc Il a des chances de réussir mais non le blessé a des chances de ne pas passer la nuit.

on dit

on ne dit pas

Elle peut réussir son examen, elle a des chances de réussir son examen

Il risque de finir dernier

Elle risque de réussir son examen
 

Il a des chances de finir dernier

 
 

Le pitaine des Ricains

Le 5 février 2015

Emplois fautifs

On lisait dans un ouvrage du XIXe siècle qui évoquait l’aphérèse : « […] au lieu de prouver la vigueur de l’esprit, elle prouve plutôt sa paresse et son ignorance ; elle consiste à supprimer une lettre ou une syllabe au commencement d’un mot ». Ce procédé appartient surtout à la langue populaire qui a ainsi fait, à partir de noms Nicolas, Antoinette, Elise ou Sébastien, les formes Colas, Toinette, Lise ou Bastien. Si quelques mots se sont imposés dans la langue, comme bus, gnon (tiré d’oignon) ou tudieu (tiré de vertu Dieu), il convient cependant de ne pas abuser de ce procédé, pas plus que du procédé inverse, l’apocope, comme nous l’avons déjà signalé.

 

on dit

on ne dit pas

Vous allez bien ?

Bonjour, Bonsoir

Les Américains

Z’allez-bien ?

Jour, Soir

Les Ricains

 

Participer à, participer de

Le 5 février 2015

Emplois fautifs

Le verbe participer peut s’employer absolument. Il signifie alors « prendre part aux activités d’un groupe » et s’emploie beaucoup dans le domaine scolaire. On dira fréquemment d’un élève qu’il doit participer en cours. Mais il peut aussi avoir un complément introduit par une préposition. Le sens du verbe variera alors selon qu’il sera suivi de la préposition à ou de la préposition de. Participer à signifie « prendre part à une activité donnée », alors que participer de signifie « avoir une similitude de nature avec, relever de ». On se gardera bien de confondre ces différents sens.

 

on dit

on ne dit pas

Nos amis voudraient participer à la fête

Ce spectacle participe du cirque et du music-hall

Nos amis voudraient participer de la fête

Ce spectacle participe au cirque et au music-hall

 

Satyre, satire

Le 5 février 2015

Emplois fautifs

Ces deux homonymes sont trop souvent confondus, mais leurs sens, leur origine et leur genre sont différents ; l’un nous vient de la mythologie, l’autre de la cuisine. Satyre, nom masculin, est emprunté, par l’intermédiaire du latin Satyrus, du grec Saturos. Ce dernier est un demi-dieu rustique, compagnon de Dionysos et traditionnellement représenté avec de longues oreilles pointues, de petites cornes sur la tête, une queue et des jambes de chèvre. Devenu nom commun, il désigne aujourd’hui un homme particulièrement lubrique. Satire, nom féminin, est emprunté du latin satira ou satura, qui a d’abord désigné une macédoine de légumes, un mets regroupant toutes sortes d’ingrédients puis, en littérature, une pièce comique mêlant différents genres. Aujourd’hui satire désigne une œuvre pleine d’ironie mordante. Notons d’ailleurs que les liens entre cuisine et art ne sont pas si rares : en témoignent les mots farce ou pot-pourri, passés eux aussi de l’une à l’autre.

 

on écrit

on n’écrit pas

Une satire contre le pouvoir

Un satyre au comportement obscène

Une satyre contre le pouvoir

Un satire au comportement obscène

 

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