Dire, ne pas dire

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Infester pour Infecter

Le 1 octobre 2015

Emplois fautifs

Ces deux paronymes ont des sens assez proches : infecter remonte au latin inficere, « mettre dans », puis, dans la langue des teinturiers, « plonger dans un bain, imprégner, teindre », et enfin « corrompre, contaminer par des germes pathogènes », ce dernier sens étant celui du français infecter. Infester est emprunté du latin infestare, « harceler, ravager », et s’emploie pour évoquer des plantes ou des animaux nuisibles, présents en grand nombre dans tel ou tel lieu où ils commettent de grands dégâts. Il convient de ne pas confondre ces deux verbes, même s’ils peuvent, dans certains cas, être synonymes : on pourra en effet aussi bien dire d’un organisme qu’il est infesté de parasites ou qu’il est infecté par les parasites.

 

On dit

On ne dit pas

Sa plaie s’est infectée

Sa plaie s’est infestée

Les mauvaises herbes infestent les champs

Les mauvaises herbes infectent les champs

Un pays infesté par le paludisme

Un pays infecté par le paludisme

 

Rapport à

Le 1 octobre 2015

Emplois fautifs

La locution par rapport à, qui signifie « relativement à, en comparaison avec », est de bonne langue. Il n’en est pas de même de la forme abrégée rapport à qu’on substitue trop souvent, dans la langue familière, aux locutions « à cause de » ou « au sujet de, en ce qui concerne », et qu’il convient naturellement d’éviter.

 

On dit

On ne dit pas

Je souhaiterais vous parler de notre affaire

Il n’a pas pu venir parce que sa voiture était en panne

Je souhaiterais vous parler rapport à notre affaire

Il n’a pas pu venir rapport à sa voiture qui était en panne

 

Densification personnelle

Le 7 septembre 2015

Emplois fautifs

Pour avoir égorgé leurs maris la nuit de leurs noces, les Danaïdes furent condamnées à remplir éternellement d’eau un tonneau sans fond. On peut parfois se demander si nombre d’experts en communication ne commirent pas le même crime, puisqu’ils semblent victimes de la même punition, obligés qu’ils sont de créer toujours de nouvelles tournures, qui sortent de l’usage presque aussi vite que le faisait l’eau du tonneau des filles de Danaos. On a ainsi appris, il y a peu, que tel personnage politique devait travailler sa densification personnelle. Il ne s’agissait pas pour lui de se livrer aux joies du culturisme et d’aller transpirer en soulevant de la fonte, mais d’améliorer son image afin d’être plus courtisé par des médias. On abandonnera sans regret à leurs ingénieux créateurs ce type de productions qui semblent amenées à disparaître aussi rapidement que s’enfuyait l’eau des Danaïdes.

 

Fictionaliser

Le 7 septembre 2015

Emplois fautifs

Il existe plus de mille cinq cents noms d’usage courant en français terminés par le suffixe

-tion. De ces noms ont été tirés environ cinquante adjectifs en -tionnel et, directement ou non, une petite poignée de verbes en -tionaliser. Le français semble donc peu goûter ce type de dérivation verbale et préférer recourir à des périphrases. On essaiera de se conformer au génie de notre langue et l’on évitera de céder à la fâcheuse tendance actuelle qui consiste à multiplier les néologismes en -tionaliser, sans doute par volonté de donner à son discours un air plus savant. On pourra ainsi dire, si simple que cela paraisse, que de tel fait ou de tel évènement, on va tirer, écrire une fiction, et non que l’on va les fictionaliser.

 

Poser problème et poser question

Le 7 septembre 2015

Emplois fautifs

Nous avons déjà signalé, dans cette même rubrique, l’emploi abusif de tournures dans lesquelles le verbe faire était suivi de compléments, le plus souvent abstraits, qui n’étaient pas précédés d’un déterminant comme faire mémoire ou faire sens. Force est malheureusement de constater que ce mal gagne maintenant d’autres verbes et que poser est gravement atteint. On rappellera donc que, depuis la fin du moyen Âge, le complément de ce verbe doit être précédé d’un déterminant et que, à oublier ce dernier, on perd en correction sans réellement gagner en concision.

on dit

on ne dit pas

Cette situation pose un problème

Son attitude nous amène à nous interroger

Cette situation pose problème

Son attitude pose question

 

Venimeux pour vénéneux

Le 7 septembre 2015

Emplois fautifs

Les adjectifs venimeux et vénéneux sont de formes et de sens proches. Venimeux, apparu au XIIe siècle, est dérivé de venin alors que vénéneux, qui date du XVe siècle, est emprunté du latin venenosus, « qui empoisonne », lui-même dérivé de venenum, « poison ». Pendant longtemps ces deux termes ont été confondus et pouvaient s’employer l’un pour l’autre, mais on s’accorde à considérer aujourd’hui que vénéneux s’applique à ce qui contient du poison sans pouvoir l’inoculer, donc essentiellement aux plantes, alors que venimeux caractérise les animaux qui peuvent volontairement inoculer un venin. Cela étant, on se souviendra que certains animaux, le fugu par exemple, sont vénéneux : ce poisson qui fait le renom de la cuisine japonaise, renferme en effet dans son foie, sa peau et ses ovaires un poison qui, s’il se répand au cours de la préparation dans le corps de l’animal, peut provoquer la mort de celui qui le mange.

on écrit

on n’écrit pas

La vipère est un serpent venimeux

La vive est un poisson venimeux

Le bolet Satan est un champignon vénéneux, le fugu un poisson vénéneux

La vipère est un serpent vénéneux

La vive est un poisson vénéneux

Le bolet Satan est un champignon venimeux, le fugu un poisson venimeux

 

Ombrageux, ombreux

Le 8 juillet 2015

Emplois fautifs

Ces deux adjectifs sont proches par la forme, mais n’ont pas le même sens. Ombreux est dérivé d’ombre, alors qu’ombrageux est dérivé d’ombrage. Ombrageux a d’abord qualifié un cheval qui avait peur de son ombre et que cette peur rendait agressif et impossible à dompter. Le plus célèbre fut assurément Bucéphale, qu’Alexandre le Grand monta en le mettant face au soleil. Cet adjectif s’emploie surtout aujourd’hui à propos de toute personne au caractère un peu farouche. Ombreux s’est d’abord appliqué à ce qui donnait de l’ombre, et s’emploie, par extension, pour qualifier ce qui est protégé par l’ombrage des rayons du soleil.

 

on dit

on ne dit pas

Un poulain ombrageux

De grands chênes ombreux

Des allées ombreuses (ou ombragées)

Un poulain ombreux

De grands chênes ombrageux

Des allées ombrageuses

 

Postuler à, postuler pour

Le 8 juillet 2015

Emplois fautifs

Le verbe postuler se construit intransitivement quand il appartient à la langue du droit, et signifie alors « s’occuper des actes nécessaires à l’instruction d’une affaire » : postuler devant une cour d’appel, devant un tribunal. En revanche, postuler est un verbe transitif direct dans le vocabulaire de la logique où il signifie « tenir pour acquis » : on peut ainsi dire que Lamarck postulait la transmission des caractères acquis ou que les Anciens postulaient que la terre était plate. Il en va de même dans la langue courante où ce verbe signifie « essayer d’obtenir un emploi, un état ». On ne dira donc pas plus postuler à que postuler pour.

 

on dit

on ne dit pas

Postuler un emploi de jardinier

Postuler un poste en province

Postuler à un emploi de jardinier

Postuler pour un poste en province

 

Quatre z-assiettes, Il va-t-à la pêche

Le 8 juillet 2015

Emplois fautifs

Ne pas omettre de faire les liaisons est une marque de correction et d’élégance, mais il ne faut pas que la crainte d’oublier quelqu’une d’entre elles pousse à en faire qui ne soient pas légitimes. On rappellera donc que, quand un mot se termine par une voyelle, il ne se lie pas au mot suivant. Il existe quelques cas où, pour des raisons d’euphonie, l’usage a créé des consonnes de transition. On dit, et on écrit, ainsi : manges-en, vas-y, comment va-t-elle ou, familièrement, entre quat’z-yeux. Mais, en dehors de ces cas, si la voyelle finale est un e elle s’élide devant une autre voyelle ou un h muet et, si c’en est une autre, le hiatus est maintenu.

 

on dit

on ne dit pas

J’ai lavé quatre assiettes

Il va à la pêche

J’ai lavé quatre z-assiettes

Il va-t-à la pêche

 

Septique pour Sceptique

Le 8 juillet 2015

Emplois fautifs

Ces deux adjectifs homonymes, mais non homographes, ont des sens très différents. Si ces deux mots ne prêtent guère à confusion en ce qui concerne leurs sens, il arrive trop souvent que leurs formes soient confondues et donc mal orthographiées. Septique, qui nous vient, par l’intermédiaire du latin, du grec sêptikos, « qui engendre la putréfaction », sert à qualifier ce qui provoque une infection. Cet adjectif est de la même famille qu’antisepsie ou aseptiser. Sceptique, lui, est directement emprunté du grec skeptikos, « qui observe, qui réfléchit », dans lequel on retrouve la racine *skep / skop de notre suffixe -scope, indiquant une observation (horoscope, périscope, télescope, etc.). Ainsi les philosophes de l’Antiquité dits sceptiques avaient reçu cette appellation car ils pensaient que de leurs observations ils ne pouvaient tirer de vérités définitives. Par extension cet adjectif s’emploie aujourd’hui essentiellement avec le sens de « méfiant, incrédule ».

 

on écrit

on n’écrit pas

Ses propos me laissent sceptique

Une fosse septique

Ses propos me laissent septique

Une fosse sceptique

 

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