Dire, ne pas dire

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Omnibuler pour obnubiler

Le 4 avril 2013

Emplois fautifs

Le verbe obnubiler signifie, au sens propre, « couvrir de nuages, de brouillard » et, au sens figuré, « envahir la pensée, obscurcir le jugement, occuper toutes les facultés mentales ». Ce verbe est emprunté du latin obnubilare, de même sens, lui-même dérivé de nubes, « nuage ». Est-ce parce qu’obnubiler est relativement rare et qu’il présente une parenté sonore avec le terme plus familier omnibus, qu’on lui substitue l’étrange paronyme omnibuler ? Quelle que soit la réponse, on se gardera d’employer ce barbarisme, si amusant soit-il.

 

On dit

On ne dit pas

Avoir l’esprit obnubilé par les soucis

Ces chimères l’obnubilaient

Avoir l’esprit omnibulé par les soucis

Ces chimères l’omnibulaient

 

Originer

Le 4 avril 2013

Emplois fautifs

L’emploi du verbe originer tend à se répandre aujourd’hui : on l’entend malheureusement de plus en plus à la place de locutions comme « trouver sa cause dans », « être à l’origine de », etc. Certes, le verbe originer n’est pas un barbarisme mais il convient de rappeler qu’on ne doit l’employer qu’à la forme pronominale réfléchie, avec le sens de « faire remonter son origine », et ce, uniquement dans la langue philosophique. On se gardera donc de l’utiliser en dehors de ce contexte précis.

 

On dit

On ne dit pas

Par quoi cela a-t-il été provoqué ?

Être à l’origine de troubles

Donner l’origine de produits

Comment cela s’est-il originé ?

Originer des troubles

Originer des produits

 

Sigles et acronymes

Le 4 avril 2013

Emplois fautifs

Les sigles et acronymes, parce qu’ils sont plus courts que les formes qu’ils abrègent, permettent de gagner du temps et de l’espace. Rappelons qu’un acronyme est un sigle que l’on prononce comme un mot ordinaire (ONU, CAPES, UNESCO). On peut donc légitimement en faire usage, mais dans ce cas, comme dans de nombreux autres, la modération est une bonne chose et l’abus dangereux.

Il convient surtout, avant d’y avoir recours, de se demander si les personnes à qui l’on s’adresse sont au courant de leur signification, en sachant bien que le même sigle ou le même acronyme peut avoir plusieurs significations. Le très précieux et très sérieux Dictionnaire des sigles nous apprend ainsi que l’acronyme UNI peut désigner à la fois l’Union nationale interuniversitaire et l’Union naturiste internationale, mais aussi l’Union nationale des indépendants (au Burkina-Faso), l’Union nationale pour l’indépendance (à Djibouti) ou encore l’Union des nations indigènes (au Brésil). Rappelons aussi que le sigle U.M.P. peut signifier Union pour un mouvement populaire ou Urgences médicales de Paris

Il est donc préférable, si l’on ne veut pas mettre son interlocuteur en difficulté, de développer le sigle ou l’acronyme que l’on utilise pour la première fois pour en donner la signification. On se rappellera aussi que l’on parle et que l’on écrit pour être entendu, lu et compris et que ces formes abrégées sont parfois des écrans qui voilent le sens des phrases dans lesquelles elles figurent.

À Le Mans, de Le Havre

Le 7 mars 2013

Emplois fautifs

Les articles définis le et les se contractent avec les prépositions à et de. On obtient alors les formes au, aux, du et des : Aller au bois, aux champs, descendre du grenier, tomber des nues. Cette règle s’applique avec les noms communs comme avec les noms propres, qu’ils désignent un pays, une région (Vivre au Danemark, aux États-Unis, revenir du Portugal, des Antilles) ou, comme on l’oublie trop souvent, une ville.

 

On dit

On ne dit pas

Le train arrive au Mans

La mairie du Havre

Les plages des Sables-d’Olonne

Le train arrive à Le Mans

La mairie de Le Havre

Les plages de Les Sables-d’Olonne

 

Conscientiser

Le 7 mars 2013

Emplois fautifs

Le verbe conscientiser, qui tend à se répandre dans la langue courante, est une transcription du néologisme anglais to conscientize. Si le suffixe -iser est très productif en français pour la formation des verbes (actualiser, carboniser, démocratiser, étatiser, populariser), on constate qu’on ne l’utilise jamais avec des radicaux qui se terminant par

-ence. Par ailleurs, les emplois du verbe anglais to conscientize sont mal définis. Il en va de même pour conscientiser et les phrases dans lesquelles on le retrouve sont confuses et maladroites. Il est donc préférable, pour plus de clarté, d’avoir recours à des périphrases utilisant le nom Conscience ou à des verbes comme Avertir, Sensibiliser, etc.

On dit

On ne dit pas

Avertir les parents des dangers de l’internet

Faire prendre conscience aux consommateurs que…

Faire revenir à la conscience des souvenirs refoulés

Conscientiser les parents aux dangers de l’internet

Conscientiser les consommateurs que…
 

Conscientiser des souvenirs refoulés

 

Faire mémoire

Le 7 mars 2013

Emplois fautifs

Nous avons déjà critiqué dans cette rubrique l’emploi injustifié de constructions où faire était directement suivi d’un substantif comme dans faire sens ou faire problème. On rencontre aussi, malheureusement, de plus en plus souvent, faire mémoire. La polysémie de ce verbe et l’absence de l’article devant mémoire sont responsables de l’ambiguïté de cette expression qui semble devoir signifier tantôt « créer des souvenirs », tantôt « rappeler des souvenirs », et tantôt « faire mention de ». Il est possible d’utiliser des expressions plus claires et plus précises. Il serait dommage de s’en priver.

 

On dit

On ne dit pas

Un évènement qui fera date, dont on se souviendra, qu’on se remémorera

Un ouvrage qui rappelle tel fait

L’orateur a mentionné cet épisode

Un évènement qui fera mémoire
 

Un ouvrage qui fait mémoire de tel fait

L’orateur a fait mémoire de cet épisode

 

Le vivre ensemble

Le 7 mars 2013

Emplois fautifs

Le français ne peut pas, contrairement au latin ou au grec, substantiver tous ses infinitifs. On dit le coucher, mais non le dormir. Si certains verbes substantivés peuvent parfois avoir un complément à l’infinitif (le savoir-faire, le savoir-vivre), on évitera d’avoir recours, comme tend à le faire une mode actuelle, à la substantivation de groupes formés d’un infinitif et d’un adverbe : on entend par exemple parler du bien mourir, mais le plus fréquent est le vivre ensemble, qui semble relever plus du vœu pieux ou de l’injonction que du constat. Faut-il vraiment faire de ce groupe verbal une locution nominale pour redonner un peu d’harmonie à la vie en société ?

 

On dit

On ne dit pas

L’art de vivre ensemble

Ceux qui recherchent l’harmonie dans les sociétés

L’art du vivre ensemble

Les acteurs du vivre ensemble

 

À l’endroit de

Le 7 février 2013

Emplois fautifs

La locution prépositionnelle à l’endroit de appartient à une langue soutenue. On dit fort bien La loi est sévère à l’endroit des faux-monnayeurs ou Il a fait preuve, à votre endroit, d’une grande bienveillance. On utilisera cette locution pour parler de personnes, mais non lorsqu’on évoque des inanimés. Dans ce cas la langue dispose d’autres prépositions ou locutions prépositionnelles comme quant à, en ce qui concerne, s’agissant de, etc.

 

On dit

On ne dit pas

Quant à ce que vous disiez

En ce qui concerne ces propositions

Pour un tel crime, le châtiment paraît justifié

À l’endroit de ce que vous disiez

À l’endroit de ces propositions

À l’endroit d’un tel crime, le châtiment paraît justifié

 

Blindé

Le 7 février 2013

Emplois fautifs

Blindé, qui a la même origine que l’anglais blind, « aveugle », a d’abord qualifié un ouvrage militaire si bien dissimulé qu’il était invisible aux yeux de l’ennemi, puisqu’il était couvert de fascines et autres branchages. Ce participe passé a pris en argot le sens d’« ivre », puisque plus rien ne semble pouvoir atteindre celui qui se trouve dans cet état. C’est, avec « couvert d’un blindage », et le sens figuré d’« endurci, protégé » : Un artiste blindé contre les critiques, les seuls sens corrects de blindé. On évitera donc d’en faire un équivalent de plein, rempli, débordé, que l’on parle d’un lieu, d’un agenda ou d’une personne.

Si donc un restaurant n’a pas une vitrine munie de plaques d’acier, on ne dira pas, quelle que soit sa fréquentation, qu’il est blindé.

 

On dit

On ne dit pas

Il n’y a plus une place dans ce bar

Je n’ai plus une date de libre dans mon agenda

Je n’ai plus un instant à moi

Ce bar est blindé de monde

Mon agenda est blindé
 

Je suis blindé

 

Interrogative indirecte avec inversion du sujet

Le 7 février 2013

Emplois fautifs

L’interrogative indirecte diffère principalement de l’interrogative directe en deux points : elle ne comporte ni point d’interrogation, ni inversion du sujet et du verbe. Si, à l’oral, les fautes sont très peu nombreuses quand l’interrogative indirecte est introduite par si (Dites-moi si vous êtes satisfait, Je lui ai demandé s’il était malade), on constate malheureusement que l’inversion du sujet et du verbe, caractéristique de l’interrogation directe, est fréquemment maintenue quand la question est introduite par un adverbe interrogatif comme quand, où, comment, pourquoi, etc., car ces termes, à la différence de si, sont employés à la fois dans l’interrogative directe et dans l’interrogative indirecte.

 

On dit

On ne dit pas

Expliquez-nous comment vous faites

Je ne sais pas pourquoi il part

Dites-nous quand vous reviendrez

Expliquez-nous comment faites-vous

Je ne sais pas pourquoi part-il

Dites-nous quand reviendrez-vous

 

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