Dire, ne pas dire

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Générer

Le 6 octobre 2016

Emplois fautifs

Comme les chats, le verbe générer semble doué de plusieurs vies. Il apparaît une première fois au tournant du xiie siècle, avec le sens de « régénérer quelqu’un par la vertu du baptême », et remplaçait alors une ancienne forme gendrer. Cette première vie s’achève avec le Moyen Âge. Générer revient au xvie siècle avec le sens d’« engendrer, produire », mais ces derniers termes, bien plus en usage, vont vite l’éliminer. Nouvelle naissance au siècle dernier dans le domaine des mathématiques et de la linguistique, où il est cette fois emprunté de l’anglais to generate. On peut ainsi dire qu’une droite se déplaçant selon un certain axe génère un cône ou qu’une langue, avec un nombre de règles fini, peut générer un nombre infini de phrases. On ne s’acharnera pas contre ce malheureux mot dont la force vitale étonne et on ne condamnera donc pas son emploi dans ces deux domaines spécialisés, mais on rappellera que dans tous les autres cas, on doit préférer à cet anglicisme des formes comme engendrer, faire naître, provoquer, causer, produire, etc.

on dit

on ne dit pas

Cette longue attente fit naître de l’anxiété

Les chutes de neige ont provoqué d’importants retards

Cette longue attente généra de l’anxiété

Les chutes de neige ont généré d’importants retards

 

C’est quoi

Le 1 septembre 2016

Emplois fautifs

On lit, dans le Dictionnaire de l’Académie française, à l’article Quoi : « Aux tournures familières “C’est quoi ?”, “Tu veux quoi ?”, on préfèrera les tournures “Qu’est-ce ?”, “Que veux-tu ?”. » Cela devrait aller sans dire, mais il semble cependant bon de le rappeler. On évitera également de faire de C’est quoi suivi d’un nom une amorce servant à introduire un sujet de débat quelconque ou à amener un interlocuteur à préciser sa position sur tel ou tel point, tic de langage que l’on entend trop souvent dans les médias : C’est quoi la politique ? C’est quoi le sport ? N’est pas Socrate qui veut, et on laissera à ce dernier cette forme de maïeutique.

Excessivement au sens de Très

Le 1 septembre 2016

Emplois fautifs

L’adverbe excessivement est un synonyme de « trop » et s’emploie pour signaler ce qui est fait sans modération, en dépassant la mesure moyenne ou permise. On dira ainsi Il boit excessivement ou Il roule excessivement vite. On l’emploiera donc toujours dans un contexte négatif puisqu’il signale un excès, un défaut : Il est excessivement susceptible, elle est excessivement maniérée. Mais on se gardera bien de l’employer en lieu et place d’adverbes comme très ou tout à fait avec un adjectif de sens positif, évoquant une qualité, sauf si l'on veut faire de cette qualité poussée à l’extrême un défaut. On évitera de même l’emploi de l’adjectif excessif quand c’est extrême ou très grand qui conviendraient.

on dit et on écrit

on ne dit pas, on n’écrit pas

Elle est extrêmement gracieuse

Il m’est tout à fait sympathique

Il a répondu avec une très grande politesse

Elle est excessivement gracieuse

Il m’est excessivement sympathique

Il a répondu avec une excessive politesse

 

Son comptant pour Son content

Le 1 septembre 2016

Emplois fautifs

L’expression avoir son content signifie « avoir à satiété, avoir tout ce que l’on peut désirer, tout ce qui peut contenter » : avoir son content de nourriture, de bonheur. Elle peut aussi s’employer par antiphrase, comme en témoigne Hécatombe, dans laquelle Georges Brassens chante :

Jugeant enfin que leurs victimes / Avaient eu leur content de gnons…

On rappellera qu’il ne faut pas confondre ici le substantif content avec son homonyme comptant, qui désigne une somme d’argent immédiatement disponible, mais ne s’emploie plus aujourd’hui que dans la locution au comptant : acheter, vendre au comptant. Sans doute est-ce la proximité entre avoir son content et avoir son compte qui est à l’origine de cette faute, cette dernière expression, qui signifie « recevoir le prix convenu », pouvant s’employer elle aussi par antiphrase, dans une langue familière, au sens d’« avoir la punition que l’on méritait », voire d’« être mort ».

on écrit

on n’écrit pas

Manger (tout) son content

Elle a eu son content de succès

Il a eu son content de malheur

Manger (tout) son comptant

Elle a eu son comptant de succès

Il a eu son comptant de malheur

 

Tout çà pour Tout ça

Le 1 septembre 2016

Emplois fautifs

L’adverbe de lieu çà ne se rencontre aujourd’hui que dans la locution çà et là. En dehors de cette locution, il n’est guère usité et des formes comme viens çà ne se lisent plus que dans des ouvrages anciens ou usant à plaisir d’archaïsmes. L’interjection homonyme qui en est tirée, çà, est elle aussi désuète quand il s’agit d’exprimer un encouragement (Ça, travaillons !) ou de marquer l’étonnement ou l’indignation (Ah çà, pour qui me prenez-vous ?). La volonté de redonner vie à ces formes qui vont s’effaçant dans notre langue est bien légitime, mais elle ne doit pas s’exercer au détriment de l’orthographe et du sens des mots, et l’on s’interdira d’écrire tout çà quand la forme correcte est tout ça.

Être entrain de

Le 12 juillet 2016

Emplois fautifs

Le nom entrain est une création de Stendhal. On ne sait pas s’il est tiré du verbe entraîner, au sens de « charmer, enthousiasmer », ou s’il s’agit d’une forme agglutinée de la locution adjectivale (être) en train, « (être) dans une bonne disposition ». Quoi qu’il en soit, on se gardera bien de confondre ce nom avec cette locution adjectivale ou avec la locution prépositive « en train de ».

 

on écrit

on n’écrit pas

Il est plein d’entrain

Elle se sent très en train

Ils sont en train de jouer

Il est plein d’en train

Elle se sent très entrain

Ils sont entrain de jouer

 

Les effluves automnales

Le 12 juillet 2016

Emplois fautifs

Dans la plupart des noms terminés par -uve en français le -u- est associé à une autre voyelle, comme dans fauve, preuve ou louve. Les plus connus de ceux que termine le groupe -uve précédé d’une consonne, et les plus employés, sont assurément les deux noms féminins cuve et étuve. Le masculin n’est pas absent, puisque l’on connaît le pédiluve, mais il faut avouer que ce terme n’est pas d’un usage très courant. Existe aussi le réduve, qui désigne une punaise à la morsure venimeuse. Ce nom est lui aussi souvent ignoré, bien que la grande habileté de la larve de cet insecte à se dissimuler dans la poussière lui ait valu l’amusant surnom de réduve masqué. La prédominance dans l’usage courant du féminin pour les formes en -uve amène le dernier nom de cette liste, effluve, à être souvent considéré, à tort, comme un nom féminin. On rappellera donc qu’effluve est un nom masculin et que les adjectifs qui s’y rapportent doivent être accordés en conséquence, même si des écrivains parmi les plus grands, comme Giraudoux ou Guéhenno, ont parfois oublié ce point.

 

on dit

on ne dit pas

L’air était chargé d’effluves automnaux

Les effluves capiteux d’un vin

L’air était chargé d’effluves automnales

Les effluves capiteuses d’un vin

 

Prenez le parapluie pour votre parapluie ou un parapluie

Le 12 juillet 2016

Emplois fautifs

L’article défini s’emploie dans des conditions précises :

– quand il introduit un nom qui désigne une chose bien déterminée ou aisément identifiable : L’affaire est grave, la foule est en colère ;

– quand le nom est déterminé : La bête du Gévaudan, les livres que vous m’avez prêtés ;

– quand le nom est unique : Le Soleil, l’Assemblée, l’Académie ;

– quand le nom a une valeur générique ou désigne une idée générale : Le père et la mère éduquent les enfants, la vertu doit être honorée.

En dehors de ces cas, on évitera d’employer l’article défini et l’on veillera à ne pas le substituer, ce qui se fait dans des emplois familiers ou régionaux, à l’article indéfini ou à l’adjectif possessif.

 

on dit

on ne dit pas

Il risque de pleuvoir : prenez votre parapluie, un parapluie

Pour la cérémonie, il faut mettre un costume

Il risque de pleuvoir : prenez le parapluie

Pour la cérémonie, il faut mettre le costume

 

Qui ne change pas ou peu

Le 12 juillet 2016

Emplois fautifs

L’adverbe peu s’emploie dans des propositions à la forme affirmative (Il mange peu, il dort peu, il travaille peu), alors que les adverbes pas ou plus, quand ce dernier marque la cessation d’un état ou d’une activité, s’emploient dans des propositions négatives avec l’adverbe de négation ne : il ne boit pas, il ne dort pas, il ne travaille plus. Ces différentes constructions syntaxiques font que l’on ne peut pas mêler, dans la même proposition, ces deux types d’adverbes. On dira donc il ne change pas ou il change peu, mais non il ne change pas ou peu. Il lit peu ou ne lit plus, et non, Il lit peu ou plus.

 

on dit

on ne dit pas

Il ne fume pas ou fume peu

Il court peu ou ne court plus

Il ne fume pas ou peu

Il court peu ou plus

 

Donner une messe

Le 2 juin 2016

Emplois fautifs

Le verbe donner peut signifier, entre autres sens, « présenter à un auditoire, à un public ». On peut ainsi donner un concert, une conférence. Dans Hécatombe, Georges Brassens évoquait d’ailleurs les commères de Brive-la-Gaillarde, qui donnèrent […] un spectacle assez croquignol. Ce verbe s’emploie encore à propos d’un professeur qui donne un cours. Mais on se gardera bien de l’utiliser pour évoquer ce qui ne ressortit pas au spectacle ou à l’éducation, et on veillera à ce qu’il n’ait pas comme complément des noms comme hommage, cérémonie ou messe, noms qui s’emploieront avec d’autres verbes comme rendre, célébrer ou offrir.

on dit

on ne dit pas

Célébrer, dire, offrir une messe

Rendre un hommage

Donner une messe

Donner un hommage

 

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