Dire, ne pas dire

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« Méridionale » pour « Méridienne »

Le 2 février 2023

Extensions de sens abusives

Les adjectifs et noms méridional, méridien et méridienne sont parents et remontent tous à l’adjectif latin meridianus, « de midi », dérivé de meridies, « midi », lui-même composé à l’aide de medius, « moyen, du milieu, central », et dies, « jour ». On appelait d’ailleurs au Moyen Âge « diable meridien » (daemonium meridianum) l’ennui, l’acédie qui attaquait les moines en prière vers le milieu du jour (on nommait aussi cet ennui « démon de midi », mais ce n’est que bien plus tard que cette expression en vint à désigner la tentation sentimentale et sexuelle de l’âge mûr).

S’ils ont une même étymologie, les mots méridional, méridien et méridienne n’ont pas le même sens. Rappelons donc, avec la neuvième édition de notre Dictionnaire, que l’adjectif méridien signifie « relatif à l’heure de midi. L’heure méridienne », que le nom masculin méridien n’est employé qu’en astronomie (le méridien céleste) ou en géographie (le méridien terrestre), et enfin que le nom féminin méridienne désigne une sieste que l’on fait en début d’après-midi, et aussi un lit de repos à deux chevets de hauteur inégale. Par ailleurs, l’adjectif méridional qualifie ce « qui est du côté du sud, du midi : l’Europe méridionale, des régions méridionales » ou ce « qui est propre au Midi, notamment au Midi de la France : un accent méridional ». Enfin, les noms Méridional et Méridionale désignent une « personne qui est originaire des régions situées au sud d’un pays, et particulièrement, en France, qui est originaire du Midi ». On dira donc il fait sa méridienne tous les jours et non il fait sa méridionale tous les jours.

Les coronaires du coroner

Le 2 février 2023

Expressions, Bonheurs & surprises

Deux petits tours et puis s’en est allé, c’est ce qu’a fait le nom coroner dans le Dictionnaire de l’Académie française. On ne trouve ce terme, qui désigne un officier de justice enquêtant sur les morts suspectes, que dans les éditions du xixe siècle (1835 et 1878), siècle qui fut, déjà, une grande période d’anglomanie. Parmi les noms désignant des représentants de l’ordre britannique, shérif a eu plus de succès, d’abord grâce au personnage de Robin des bois, qui avait pour ennemi juré le shérif de Nottingham, puis, de l’autre côté de l’Atlantique, aux nombreux westerns qui eurent ce personnage pour héros. Shérif prit place dans notre Dictionnaire en 1762 et s’y trouve toujours.

Homonyme de coroner, l’adjectif coronaire est entré lui aussi dans la quatrième édition de notre Dictionnaire et, lui non plus, n’en est jamais sorti. Coroner et coronaire peuvent être rapprochés pour leur homonymie, mais aussi pour leur origine. L’un et l’autre sont ainsi liés au mot couronne. L’anglais coroner, d’abord attesté sous la forme corowner, est un emprunt de l’anglo-normand coro(u)ner, un dérivé de corone, « couronne ». Cet officier était d’ailleurs appelé, en latin médiéval, custos placitorum coronae, « gardien des plaidoyers de la couronne », tandis que l’adjectif coronaire est une création d’Ambroise Paré, qui a tiré ce mot du latin coronarius, « qui est en forme de couronne », les artères coronaires étant ainsi disposées autour du cœur. C’est donc au latin corona qu’il nous faut remonter. De celui-ci a été tiré un diminutif corolla, « corolle » et, proprement, « petite couronne », dont le dérivé corollarium désignait une petite couronne qu’on donnait aux acteurs comme gratification supplémentaire, et que Boèce introduisit dans la langue des mathématiciens pour nommer une conséquence supplémentaire d’une démonstration, un corollaire. En latin médiéval, on appelait aussi corona un candélabre suspendu (candelabrum pensile). L’allemand a repris ce sens pour en faire un Kronleuchter, « un lustre » ou, mieux, « une couronne de lumière ».

Signalons que le latin corona est lui-même un emprunt. Il vient du grec korôné, de même sens, mais qui signifie d’abord « corneille ». C’est par analogie avec le bec courbé de l’oiseau que les Grecs ont donné ce nom à de nombreux objets, comme l’extrémité d’un arc ou d’un timon, la poupe d’un navire, ou une couronne. Sans doute faut-il rappeler que, dans l’Antiquité, la couronne, faite de feuilles ou de fleurs, réelles ou artificielles, était la récompense donnée au vainqueur d’une épreuve sportive ou à un soldat valeureux, et non le symbole de la royauté que nous connaissons aujourd’hui. Ces couronnes étaient très diverses. Parmi celles-ci on trouvait la couronne triomphale, une couronne de lauriers portée par le général vainqueur lors de son triomphe ; la couronne obsidionale, composée d’herbes et de fleurs sauvages et fabriquée par l’armée romaine sur le lieu où elle avait été assiégée, pour l’offrir à qui avait fait lever le siège et libéré la place ; on décernait la couronne civique, faite de feuilles de chêne, à celui qui avait sauvé la vie d’un citoyen au cours d’une bataille ; la couronne murale était, quant à elle, donnée à ceux qui, lors d’un assaut, étaient montés les premiers sur les murs d’une ville assiégée ; enfin, la couronne rostrale était décernée au général vainqueur d’un combat naval ou au soldat ayant le premier pris pied sur un bâtiment ennemi. Toutes les couronnes n’étaient cependant pas liées à la guerre. Le médecin danois Thomas Bartholin (1616-1680) rapporte, dans son De Puerperio veterum (« l’accouchement chez les Anciens »), qu’à Athènes on suspendait à la porte de la maison où venait de naître un garçon une couronne d’olivier, et des brins de laine si c’était une fille.

Concluons en rappelant que, si aujourd’hui les formes couronne et corneille sont relativement éloignées, tant à l’oral qu’à l’écrit, il n’en est pas de même pour leurs équivalents anglais puisque, outre-Manche, seul un n distingue la corneille (crow) de la couronne (crown).

Claude S. (Sauvagnon)

Le 2 février 2023

Courrier des internautes

Pourquoi le mot Monsieur se prononce-t-il Meussieur ?

Claude S. (Sauvagnon)

L’Académie répond :

La prononciation actuelle de Monsieur tient au fait que ce mot s’emploie le plus souvent comme proclitique (c’est-à-dire comme un mot qui, s’appuyant sur le mot suivant avec lequel il forme une unité phonétique, est dépourvu d’accent tonique) devant un nom propre. Dès lors, au fil de l’évolution phonétique, la première syllabe s’est affaiblie en mou- ou mo- (Littré indiquait encore cette dernière prononciation) jusqu’à donner la prononciation actuelle en me-. Notons enfin que ce e disparaît même parfois, comme dans la forme enfantine ou populaire m’sieur.

Jean-Loup B. (Rodez)

Le 2 février 2023

Courrier des internautes

Bonjour,

Je suis lycéen et j’aimerais savoir si la tique pique ou mord.

Merci

Jean-Loup B. (Rodez)

L’Académie répond :

La tique se nourrit du sang de son hôte grâce à un organe particulier qui s’enfonce dans la peau et que l’on nomme le rostre. Ce dernier est composé de deux appendices terminés par des crochets qui se déploient sous la peau et servent d’ancrage à la tique, mais aussi d’une gouttière semblable à un harpon et qui sert à aspirer le sang.

Ainsi, comme le moustique, la tique enfonce ses pièces buccales sous la peau et aspire le sang de son hôte. Il s’agit donc bien au sens strict d’une piqûre, étant donné que le processus ne met véritablement en jeu ni mâchoire ni dentition.

Néanmoins, dans la langue courante, il n’est pas rare de trouver le terme morsure pour parler des blessures infligées par des animaux qui, en réalité, piquent. On trouve dans le Dictionnaire de l’Académie française, à l’article Morsure, l’exemple morsure de puce alors que cet animal se nourrit avec un rostre de façon analogue à la tique.

En définitive, s’il n’est pas fautif, dans ce cas, d’employer le terme morsure, il est plus précis, d’un point de vue biologique, d’employer celui de piqûre.

Absence de liaison après « quand »

Le 5 janvier 2023

Emplois fautifs

En un siècle et demi, nous avons perdu quelques liaisons, en particulier celles de plusieurs mots se terminant par -nd. Dans son Dictionnaire, Littré écrivait en effet que le « d » final de fécond et de profond se lie, prononcé comme un « t », au mot suivant et que l’on doit dire un fécon-t-écrivain et un profon-t-archéologue. Il nous apprend aussi que le « d » de blond ne se lie que dans la prononciation soutenue « Le blond Apollon, dites : le blon-t-Apollon », et qu’il en va de même pour brigand : « Le d ne se lie pas dans le parler ordinaire ; dans le parler soutenu on dit : un brigan-t armé ». Aujourd’hui, on conserve la liaison en « t », après fond, dans l’expression de fond en comble, après grand et après quand. Mais on constate un début de relâchement avec ce dernier mot et l’on entend de plus en plus « quand / il viendra », « quand / on est partis », alors que c’est « quand-t-il viendra » et « quand-t-on est partis » que l’on doit dire.

Crazy monday

Le 5 janvier 2023

Anglicismes, Néologismes & Mots voyageurs

Avant d’être le nom d’un cabaret parisien, Crazy Horse (« Cheval fou ») fut la traduction en anglo-américain du nom du chef indien Tashunca Uitco, proprement « ses chevaux ont le feu sacré ». On emploie aujourd’hui l’adjectif crazy dans notre langue pour qualifier ce qui semble s’affranchir des normes habituelles, en particulier dans le domaine du commerce. Mais le français fou peut, lui aussi, qualifier ce que l’on ne peut ni contenir ni contrôler, ce qui semble n’obéir à aucune loi, ce qui est imprévisible. Aussi peut-on sans doute parler de lundi fou en lieu et place de « crazy monday » ou même, pour élargir le propos et rappeler un de nos grands dramaturges, de folle journée.

« Mondial » pour « International »

Le 5 janvier 2023

Extensions de sens abusives

Les adjectifs international et mondial sont apparus tardivement dans notre langue. Le premier date du tout début du xixe siècle et, en 1871, Eugène Pottier en fait, en le substantivant, le titre d’une célèbre chanson révolutionnaire, L’Internationale ; le second se rencontre au début du xvie siècle, avec le sens de « mondain, qui appartient au monde », et on ne le rencontre avec son sens actuel qu’à partir de 1903. Ces deux adjectifs n’ont pas exactement le même sens ; il convient donc de les employer avec justesse. International signifie « qui a lieu de nation à nation, entre plusieurs nations, qui concerne les rapports entre les nations », tandis que mondial a pour sens « qui intéresse, concerne le monde entier ; qui est répandu dans l’ensemble du monde » et se rapporte donc à un nombre beaucoup plus important de nations. Ainsi, le Tournoi des six nations est une compétition internationale de rugby tandis que les Jeux olympiques sont une compétition mondiale.

Changement de genre

Le 5 janvier 2023

Expressions, Bonheurs & surprises

Aujourd’hui toutes les lettres de notre alphabet sont des noms masculins, mais il n’en a pas toujours été ainsi. Les six voyelles, et les consonnes dont le nom, à l’oral, se termine par une voyelle : b (prononcé [bé]), c d, g, j, k, p, q, t, v, w, mais aussi x et z, étaient du genre masculin et le sont restés. Les autres, celles dont le nom à l’oral est composé d’une voyelle suivie d’une consonne, c’est-à-dire f (prononcé [èf]), h, l, m, n, r et s, ont changé de genre. On le constate en lisant ce qui est dit, par exemple, de la lettre f dans les différentes éditions du Dictionnaire de l’Académie française. Dans les trois premières, elle est du genre féminin : une grande F, une double f, une f finale. Cela change dans les quatre éditions suivantes, où f est à la fois un masculin et un féminin. On y lit ceci : « substantif féminin suivant l’ancienne appellation qui prononçoit Effe ; & masculin suivant l’appellation moderne qui prononce Fe. Cette dénomination, qui est la plus naturelle, est aujourd’hui la plus usitée. » Le fait d’appeler cette lettre fe est sans doute lié à l’apprentissage syllabique de la lecture, pour que, de même que be et a font ba, fe et a fassent fa. F conserve ces deux genres jusque dans la huitième édition de notre Dictionnaire ; dans la neuvième, il n’est plus que masculin.

F se distingue ainsi un peu des autres lettres h, l, m, n, r, s, qui étaient des deux genres jusque dans la septième édition, féminines dans la huitième et masculines dans la neuvième. En ce qui concerne h, genre et aspiration (ou absence d’aspiration) sont liés : « Lorsqu’on l’appelle Ache, suivant la prononciation ancienne et usuelle, son nom est féminin. Une H (ache). Une grande H. Une petite h. Il est masculin, lorsque, suivant la méthode moderne, on prononce cette lettre comme une simple aspiration. Le H (he). Un grand H. » D’autres lettres ont d’intéressantes particularités : x a toujours été un substantif masculin, mais, de la quatrième à la septième édition, on nous donnait cette précision au sujet de sa prononciation : « Suivant l’appellation ancienne et usuelle, on la nomme Ics ; et, suivant la méthode moderne, on l’appelle Xe, en prononçant comme dans la dernière syllabe des mots Axe, fixe, luxe. »

En ce qui concerne la lettre j, qui, à l’oral s’appuie sur un « i », elle a toujours été un nom masculin, mais elle n’a été autonome qu’à partir de la quatrième édition. Auparavant, on le trouvait à la lettre « i » où on l’appelait « i consonne ».

W apparaît dans la septième édition, mais n’est pas encore considéré comme une lettre de notre alphabet, puisqu’on le définit ainsi : « Lettre consonne qui appartient à l’alphabet de plusieurs peuples du Nord, et qu’on emploie en français pour écrire un certain nombre de mots empruntés aux langues de ces peuples, mais sans en faire une lettre de plus dans notre alphabet ; on la nomme Double vé. » Ce qui fait qu’on lit dans cette même édition, à l’article Z : « Lettre consonne, la vingt-cinquième et dernière de l’alphabet. Suivant l’appellation ancienne et usuelle, on la nomme Zède, et suivant la nouvelle, on la nomme Ze, en prononçant comme dans la dernière syllabe des mots Onze, douze. »

De quelle matière étaient faites les pantoufles de Cendrillon ?

Le 5 janvier 2023

Expressions, Bonheurs & surprises

On lisait dans la première édition du Dictionnaire de l’Académie française, parue en 1694, à l’article vair : « Terme dont on se servoit autrefois pour exprimer une fourrure blanche & grise. Il ne s’employe aujourd’huy qu’en matiere d’armoiries, […] Tel porte de vair. » Trois ans plus tard, Charles Perrault fit paraître un conte intitulé Cendrillon ou La Pentoufle (sic) de verre. On s’étonna bientôt que ces pantoufles fussent de verre et l’on pensa que, en fait, Cendrillon était chaussée de vair, un nom, on l’a vu, sorti d’usage. Verre ou vair, le débat était lancé. Le xixe siècle, fort raisonnable et qui s’étonnait qu’on pût danser chaussée de verre, penchait pour la fourrure ; ainsi Balzac écrivait, dans Le Martyr calviniste : « En France […] certaines fourrures rares, comme le vair, qui sans aucun doute était la zibeline impériale, ne pouvaient être portées que par les rois, par les ducs et par les seigneurs revêtus de certaines charges. On distinguait le grand et le menu vair. Ce mot, depuis cent ans, est si bien tombé en désuétude que, dans un nombre infini d’éditions de contes de Perrault, la célèbre pantoufle de Cendrillon, sans doute de menu vair, est présentée comme étant de verre. » C’était aussi l’avis de Littré : « C'est parce qu’on n’a pas compris ce mot maintenant peu usité qu’on a imprimé dans plusieurs éditions du conte de Cendrillon souliers de verre (ce qui est absurde), au lieu de souliers de vair, c'est-à-dire souliers fourrés de vair. » Larousse, non sans quelque regret, faisait de même dans son Dictionnaire : « Beaucoup de ceux qui n’ont lu le joli conte de Cendrillon que dans les livres qu’on mettait entre leurs mains pour les amuser quand ils étaient enfants seront surpris de ne plus retrouver ici cette pantoufle de verre qui avait frappé, plus que tout le reste peut-être, leur imagination naissante. […] quelle devait être la légèreté de cette jeune fille, qui pouvait marcher et danser avec des pantoufles si fragiles sans qu’elles se brisassent… Et c’est ainsi que le nom de Cendrillon se sera trouvé associé avec l’idée d’une chaussure fantastique que la vérité historique est forcée de reléguer parmi les simples coquilles typographiques. » Cette controverse fit même le sujet d’un chapitre du Livre de mon ami, d’Anatole France : « C'est par erreur, n'est-il pas vrai, qu'on a dit que les pantoufles de Cendrillon étaient de verre ? On ne peut pas se figurer des chaussures faites de la même étoffe qu’une carafe. Des chaussures de vair, c’est-à-dire des chaussures fourrées, se conçoivent mieux, bien que ce soit une mauvaise idée d’en donner à une fillette pour la mener au bal. Cendrillon devait avoir avec les siennes les pieds pattus comme un pigeon. Il fallait, pour danser si chaudement chaussée, qu’elle fût une petite enragée. Mais les jeunes filles le sont toutes ; elles danseraient avec des semelles de plomb. »

Aschenputtel, la Cendrillon des frères Grimm, ne nous aide pas à trancher puisque c’est d’or qu’elle est chaussée, qu’il s’agisse de pantoufles, die Pantoffeln waren ganz golden, ou d’un soulier, den goldenen Schuh. Alors, remontons le temps ; au iiie siècle de notre ère, nous trouvons un lointain ancêtre de ce conte dans l’Histoire variée d’Élien, au chapitre xxxiii, intitulé De la fortune de Rhodope : « Rhodope [proprement « celle qui a un visage de rose »] passe pour avoir été la plus belle courtisane de l’Égypte. Un jour qu’elle était au bain, la fortune, qui se plaît à produire des évènements extraordinaires et inattendus, lui procura une faveur qu’elle méritait moins par les qualités de son âme que par les charmes de sa figure. Tandis que Rhodope se baignait, et que ses femmes gardaient ses vêtements, un aigle fondit sur un de ses souliers, l’enleva et, l’ayant porté jusqu’à Memphis, dans le lieu où Psammétique était occupé à rendre la justice, le laissa tomber dans le sein du prince. Psammétique, frappé de la délicatesse de ce soulier, de l’élégance du travail, et de l’action de l’oiseau, ordonna qu’on cherchât par toute l’Égypte la femme à qui il appartenait : dès qu’on l’eût trouvée, il l’épousa. » Ce conte de L’Histoire variée, même si variée, que l’on trouve dans le titre, et vair ont la même origine, ne nous dit malheureusement rien sur la matière de notre chaussure. Sans doute faut-il, après avoir redit que Perrault avait écrit verre, laisser le mot de la fin à Raymond, un autre personnage du Livre de mon ami : « Cousine, je vous avais pourtant bien avertie de vous défier du bon sens. Cendrillon avait des pantoufles non de fourrure, mais de verre, […]. Ces pantoufles étaient fées ; on vous l’a dit, et cela seul lève toute difficulté. Un carrosse sort d’une citrouille. La citrouille était fée. Or, il est très naturel qu’un carrosse fée sorte d’une citrouille fée. C'est le contraire qui serait surprenant. »

Aujourd’hui l’usage est encore un peu flottant ; d’aucuns préfèrent le verre, symbole de pureté, d’autres, plus nombreux, choisissent le vair. L’Académie française, elle aussi, a longtemps balancé ; elle opte aujourd’hui pour les pantoufles de verre, sans toutefois condamner les pantoufles de vair.

Élise D. (Sourans)

Le 5 janvier 2023

Courrier des internautes

Je m’interroge sur la fonction du mot mamie dans la phrase Allons manger, mamie. Quelle est la différence avec Allons manger mamie ?

Élise D. (Sourans)

L’Académie répond :

Madame,

Il y a une très grande différence de sens entre ces deux phrases et la virgule que l’on trouve dans la première a un rôle que l’on pourrait qualifier de vital. Dans cette phrase, la virgule isole le mot mamie, qui est ainsi mis en apostrophe. Cette phrase signifie « Mamie, viens manger avec moi (ou avec nous). » Si on supprime la virgule, le mot mamie devient le complément d’objet direct du verbe manger et la phrase devient alors une invitation à manger cette infortunée grand-mère. Il convient donc de bien garder ce signe de ponctuation, dernier rempart contre la voracité des petits-enfants.

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