COMPLIMENT fait en 1672. par Mr. CHARPENTIER, au nom de l’Académie à Monſeigneur l’Archevêque de Paris aprés que le Roy fût declaré Protecteur.
MONSEIGNEUR,
L’ACCOMPLISSEMENT du deſſein que vous avez entrepris avec tant de generoſité & conduit avec tant de prudence pour la gloire de l’Académie Françoiſe, ne luy laiſſe plus d’autres penſées que celles de la reconnoiſſance. Elle nous en a chargez, MONSEIGNEUR, & nous avons plus à craindre que nous ne puiſſions pas ſuffiſammment remplir ſon intention que de la ſurpaſſer. Vous luy avez procuré l’honneur le plus éclatant qu’elle ait reçu depuis ſa naiſſance & une grace ſi ſignalée nous met plutôt dans l’impudence de trouver des remercimens, que dans ce beſoin de les menager. Il ſemble que cette Compagnie doive tenir tous ſes avantages de la faveur des Princes de l’Egliſe. Elle doit ſon établiſſement au fameux Cardinal de Richelieu, qui porta l’eſprit de Louis XIII. de triomphante Memoire, à la créer par ſa Toute-puiſſance Roiale, & à la tirer du néant, où ſont toutes les choſes qui ne ſont pas encore. Et vous, MONSEIGNEUR, vous luy avez concilié pour Protecteur l’Incomparable Louis XIV. l’admiration de toute la terre & par cet heureux effet de vôtre entremiſe, elle va deſormais ſubſiſter ſous l’appuy de ce grand Monarque qui eſt l’état le plus floriſſant où elle pouvoit aſpirer. Vous luy donnez le moyen de ſe reconnoiſtre pour la veritable Aſſemblée des Muſes, puiſque le veritable Apollon de nôtre Siecle a bien voulu l’avouer pour ſienne. Ce bonheur qui luy manquoit & qu’elle regardoit de loin ſans oſer y prétendre, n’a gueres moins ſurpris ſon attente que comblé ſa joie ; vous avez demandé pour elle ce qu’elle n’oſoit demander elle-même, & vous luy avez fait obtenir ſans peine ce qu’elle n’avoit conſideré d’abord que comme un ſouhait temeraire. Ces ſortes de bienfaits, dont les ſuites ſont de jour en jour plus avantageuſes, engendrent auſſi des reſſentimens qui croiſſent de jour en jour, & ce ſont ces reſſentimens, MONSEIGNEUR, que vous trouverez toujours dans nos cœurs & que la France apprendra bientôt par nos paroles & par les témoignages les plus exprés que nous vous pourrons donner par tout ? & de nôtre profond reſpect, & du ſouvenir immortel que nous avons des graces infinies dont nous vous ſommes redevables.
