Centenaire de la naissance de Georges Rodenbach, à Bruxelles

Le 10 décembre 1955

Fernand GREGH

Centenaire de la naissance de Georges Rodenbach

BRUXELLES, le 10 décembre 1955

DISCOURS

DE

M. FERNAND GREGH
délégué de l’Académie française

 

Messieurs,

Georges Rodenbach aurait donc cent ans ! Ce chiffre me donne le vertige. Il est là devant mes yeux, dans sa grâce virile d’homme de trente-cinq ans, avec ses yeux bleus de nordique et cette chevelure blonde qui était comme son panache de poète, de poète resté romantique en traversant le symbolisme, ce toupet « couleur de soleil et de feuilles mortes » dont Lévy-Dhurmer l’a couronné dans un portrait justement célèbre. Ni grand ni petit, fin comme l’ambre, spirituel quand il le voulait, à d’autres moments rêveur et taciturne, en habitant du Règne du Silence, il a, au moment où je le rencontre pour la première fois, il a sa résidence à Paris dans une longue rue triste près du parc Monceau. Il a donné rendez-vous au jeune secrétaire de la Revue de Paris qui l’a vu chez Heredia, dans ce haut lieu de fa rue Balzac où se retrouvent le samedi

Les poètes qui sont errants dans la cité,

et qui lui ont dit combien il l’admirait. Et il l’interroge amicalement sur ses préférences en poésie, sur ses amis du Banquet, Marcel Proust, Robert de Flers, Daniel Halévy, Henri Barbusse, et sur lui-même, enfin, et il lui fait réciter quelques vers qu’il veut bien approuver avec l’autorité que lui donnent les vingt ans qui les séparent. Et cet adolescent si ému d’aborder un poète déjà fameux, c’est celui qui vous parle aujourd’hui et qui n’a jamais oublié, dans l’indifférence ou même l’hostilité de certains milieux littéraires d’alors, cet accueil à la fois paternel et fraternel d’un grand aîné.

Oui, je revois sa silhouette peut-être un peu cherchée, disaient quelques-uns, mais en tout cas trouvée, sa silhouette 1830, que dessinait une éternelle redingote très boutonnée, serrée à la taille et fleurie, au revers, du ruban rouge que la France avait bien fait de donner à ce poète qui illustrait les lettres françaises, — silhouette accentuée encore par une cravate très haute qui lui faisait porter comme précieusement une tête un peu fatiguée, un peu tirée, mais aux traits si délicats. Et j’entends encore sa voix lente, assez traînante, un peu lointaine, une voix de sonorité voilée, comme brumeuse, où s’attardait l’accent natal. J’entends encore les mots que disait cette te voix, seule révélatrice du Flamand dans ce Parisien qu’on rencontrait partout, les phrases qu’il débitait sans hausser le ton, qu’il aurait pu écrire sur-le-champ, tant elles étaient rédigées, et qui, après les banalités courantes, parlaient tout de suite, avec une insistance où l’on sentait l’idée fixe, de mystère et de solitude. Et ceux ici qui l’ont connu — ils se font rares — se rappelleront sans doute cette particularité : il appuyait sur certains mots, comme pour leur donner plus de corps dans la double inanité du son sitôt évanoui et de la vaine conversation; et, à l’exemple de son maître Baudelaire, il avait des majuscules et des italiques dans la voix. Tel il était, ce jour-là, tel je devais toujours le voir, ne changeant pas, ne laissant rien de lui à l’année qui s’en allait, gardant, avec son attitude un peu froide et correcte, son allure et son air jeunes, qu’allait lui laisser à jamais dans notre souvenir, en le prenant, la mort — à quarante-trois ans !

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Georges Rodenbach avait l’apparence d’un songeur perdu dans les brumes; et dès qu’il parlait, il faisait preuve d’une intelligence fort aiguisée; de même, il se donnait volontiers pour un nonchalant, et il a, en somme, beaucoup travaillé. Il a publié, tant de proses que de vers, si j’ai bien compté, une quinzaine de volumes. Il est vrai qu’il faut soustraire de ce chiffre les premiers essais, qu’il ne faisait pas figurer à la table de ses œuvres complètes : La Belgique, poème historique (1878), les Tristesses (1879), le Foyer et les Champs (1880) ; il rayait encore de la liste de ses ouvrages la Mer élégante (1881) et l’Hiver mondain (1884).

Ces derniers titres m’étonnent, et j’aimerais à constater, de mes yeux, comment l’auteur de la Mer élégante a pu être ensuite le poète du Règne du Silence. Voyez pourtant comme d’avance on est tout ce qu’on sera, et comme les premières œuvres d’un artiste, si incomplètes qu’elles soient, révèlent déjà son âme et annoncent sa vie : sans doute l’auteur de la Mer élégante changea plus tard complètement de manière, et le poète léger et frivole de l’Hiver mondain devint le songeur mystérieux, le prince, parfois même un peu pontife, du silence et de la solitude que nous avons admiré; mais si le poète se transforma, l’homme resta élégant et mondain. Bonne leçon à méditer encore aujourd’hui où le débraillé est trop souvent considéré comme la tenue obligée et, si je puis dire, l’uniforme du poète. Il savait bien que la vraie solitude est intérieure et qu’on peut, lorsqu’on a une âme, être plus véritablement seul au milieu des hommes qu’au désert, sur la colonne de Siméon le Stylite.

C’est de la Jeunesse blanche (1886) que se datait lui-même Rodenbach. Pourtant ce livre, comme un autre, l’Art en exil (1889) passa presque inaperçu, et ce sont ses œuvres suivantes, le Règne du Silence (1891), Bruges-la-Morte, roman (1892), le Voile, drame en un acte, représenté à la Comédie-Française (1894), en même temps que les Romanesques de Rostand, Musée de Béguines (1895), les Vies encloses, poème (1896), la Vocation, nouvelle (1897), le Carillonneur, roman (1897), l’Arbre, nouvelle (1898), enfin le Miroir du Ciel natal, poème (1898), qui firent connaître son nom au public, et fondèrent sa réputation.

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On connaît peu la Jeunesse blanche, le premier recueil de vers que Rodenbach consentait à avouer. Pour la plupart des critiques et pour le public, Rodenbach est avant tout le poète du Règne du Silence et du Voyage dans les yeux. C’est fort injuste pour la Jeunesse blanche, que je viens de relire avec le même plaisir que la première fois, et qui me semble bien l’un de ses meilleurs volumes, et, sinon le plus original, du moins le plus vivant. Plus tard, il fut plus lui. Dans la Jeunesse blanche, on sent le souvenir des Fleurs du mal derrière mainte pièce ou maint vers ; mais on sent aussi que l’imitation n’est pas livresque, qu’elle est sincère, qu’elle est l’effet d’une concordance, d’une harmonie préétablie entre l’âme du maître et celle du disciple. Il y a surtout dans ces premiers vers une fleur de naïveté et de jeunesse, un son humain, qu’on ne retrouvera plus dans les poèmes suivants, bien supérieurs par la nouveauté de l’inspiration et par la maîtrise du vers, mais peut-être moins émouvants.

Quelle grâce ingénue et charmante dans ces vers du Prologue que je retrouve avec émotion en feuilletant ce livre depuis si longtemps fermé :

Je veux recomposer la maison paternelle,
Avant l’absence, avant la mort, avant les deuils ;
Les sœurs, jeunes encor, dormant dans les fauteuils,
Et le jardin en fleurs et la vigne en tonnelle.

J’évoque aussi parfois la grande chambre ancienne
Où nous
allions prier pendant les soirs de mai ;
Comme, pour la chaleur, on ouvrait la persienne,
L’âme des fleurs passait dans le vent embaumé.

Et plus loin :

... On eût dit que le ciel descendait dans la chambre,
Avec
son clair de lune et tous ses astres d’or !
Et les lits qui flottaient dans ces lumières d’ambre
Semblaient de grands bateaux sur un fleuve qui dort.

Ecoutez encore ce sonnet, vraiment beau :

SOLITUDE

Faut-il fixer toujours ses yeux mélancoliques,
Tel qu’un être pensif, sur les choses de l’Art,
Tel qu’un prêtre qui reste agenouillé très tard
Dans son église froide, à veiller des reliques ?

Faut-il laisser fleurir les fleurs dans son jardin
Pour conquérir la gloire à travers les risées ;
Faut-il laisser passer l’Amour sous ses croisées,
Et perdre un bien réel pour un rêve incertain ?

Faut-il se murer vif, et s’empêcher de vivre ?
Et, comme en une forge en feu, faut-il verser
Tous les métaux de l’âme au creuset de son livre ?

— Vis seul. C’est un temps dur d’épreuve à traverser ;
Mais fais ce sacrifice à ta sublime envie :
Pour vivre après ta mort, sois donc mort dans la vie !

Et cette Veillée de Gloire, d’un enthousiasme si candide, et où il y a un mot si douloureusement prophétique :

Quel orgueil d’être seul, les mains contre son front,
A noter des vers doux comme un accord de lyre,
Et,
songeant à la mort prochaine, de se dire :
Peut-être que j’écris des choses qui vivront!

En transcrivant ces vers, je me prends à les aimer d’un amour douloureux, et ma mélancolie redouble, quand j’imagine, à travers ces poèmes, et par delà le Rodenbach un peu amer et refermé que j’ai connu, le jeune homme ardent et passionné qui les écrivit.

Et je me prends aussi à regretter, l’avouerai-je, malgré l’incontestable supériorité technique des poèmes postérieurs, que Rodenbach n’ait pas persévéré dans la voie poétique qu’inaugurait cette Jeunesse blanche, si pleine d’âme et d’émotion, si fraîche, si simple, mais si large ouverte, et parfois d’un si grand souffle et qui même a peut-être influencé son frère français, Albert Samain. C’était au bout de cette voie qu’il eût trouvé la grande route lyrique, la route triomphale de Hugo, de Lamartine, de Musset, de Vigny, bordée des hautes figures de l’Amour et de la Mort, au lieu des chemins de traverse où il s’est jeté, secrets et bien à lui, mais trop étroits pour que le grand public qui cherche en tout l’émotion humaine puisse l’y suivre. Vain regret ! Ne regardons pas ce qu’il aurait pu faire, mais ce qu’il a fait. C’est souvent exquis. Écoutez ces vers :

Quelques femmes, dans leurs prunelles sensitives,
Ont des ombres et des lueurs alternatives ;
Il y fait noir ou clair à leur guise; on dirait
Derrière la cloison transparente des tempes
Qu’on baisse tour à tour ou qu’on monte des lampes...

Quelle rareté d’impression, et quelle science du style et du vers !

Et dans les Vies encloses, à côté d’alexandrins décidément bizarres, que de vers définitifs, comme celui-ci sur le gris des ciels du Nord :

Il était la couleur sensible du silence...

ou ceux de l’Epilogué :

Ici toute une vie invisible est enclose,
Qui n’a laissé voir d’elle et d’un muet tourment
Que ce que laisse voir une eau, d’aspect dormant,
Où la lune mélancolique se pose...

Sous la blanche surface immobile, cette eau
Souffre, d’anciens chagrins la font glacée et noire ;
Qu’on imagine, sous de l’herbe, un vieux tombeau,
De qui le mort, mal mort, garderait la mémoire...

Et cette eau qu’est mon âme, en vain pacifiée,
Frémit d’une douleur
qu’on dirait un secret,
Voix suprême d’une race qui disparaît,
Et plainte, au fond de l’eau, d’une cloche noyée !

La manière ici s’élargit ; Rodenbach retrouve l’inspiration, plus naturelle et plus émue, des vers de la prime jeunesse, mais avec toute l’expérience d’art en plus, et aussi une mélancolie plus profonde et plus pathétique :

Voix suprême d’une race qui disparaît !

Il était bien le fils de cette race flamande qui devait si fortement revivre, il le sentait lui-même, ce poète qui a vécu et est mort à Paris. C’est bien le même qui, adolescent, avait rêvé un poème historique à la gloire de la Belgique, et qui l’a écrit, non pas historique heureusement, mais pittoresque et sentimental, épars dans toute son œuvre, vers et prose, dans le Règne du Silence comme dans Bruges-la-Morte. Ce sont toutes les Flandres qui vivent dans ses poèmes, avec leurs canaux rectilignes comme ses vers parfois un peu géométriques, leurs lointains carillons qui sonnent dans ses rimes légères, leur brume qui se condense en tristesse dans ses strophes, leur sol trempé d’eau où tout à coup le pied enfonce, comme parfois l’esprit se perd et s’enlise dans le mystère de son verbe.

Le gris des ciels du Nord dans mon âme est resté,

dit quelque part, inoubliablement, Rodenbach. Ce ne sont pas seulement les ciels du Nord qu’évoquent ses vers, c’est tout le Nord natal, cieux et eaux, villes et campagnes. Et si la France avait raison de .traiter comme sien un poète qui écrivait remarquablement le français et que l’Académie française m’a chargé d’honorer très particulièrement, la Belgique peut voir en lui un de ses poètes nationaux, et célébrer avec un pieux orgueil sa mémoire.

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Je parlais tout à l’heure de la maison où je lui ai fait ma première visite. J’ai connu aussi la maison où il a passé ensuite quelques années et où il est mort. Elle était sur un boulevard tout à fait extérieur, au bord des fortifications, car il y avait encore des fortifications, et par delà la zone militaire s’étendait devant elle un paysage d’usines. Sa maison ouvrait des yeux désolés sur ces gazons pelés et ces fumées ouvrières. La mienne en ce temps-là se trouvait assez proche, et je passais souvent devant le logis du cher et grand poète. Permettez-moi de m’en souvenir, et puisqu’au fond l’on ne devrait parler des poètes qu’en vers, permettez-moi de vous lire, en hommage à sa mémoire, le poème inédit que j’ai dédié jadis à cette maison où j’ai eu la tristesse d’assister à ses funérailles :

LA MAISON DE RODENBACH

C’est la maison où Rodenbach est mort.
Dans ce quartier paisible où l’on entend souvent
Flâner le vent,
Elle est près de la mienne, et le soir, quand je sors,
Mes pas comme au hasard me ramènent devant.
Silencieuse et vide, elle m’attire.

C’est là que Rodenbach a fini son martyre,
Sa vie aux pleurs secrets de blond nerveux crispé,
De rêveur promenant un rêve inoccupé.
Elle est là sa maison déserte, toute seule
A regarder le vide avec ses yeux d’aïeule.

Au loin bat la marée immense des faubourgs.
Dans les fossés voisins bourdonnent des tambours.
Le vent sur le trottoir s’attriste et joue
Et par moment lui caresse la joue
De souffles hésitants.
Sur le gravier des feuilles volent,
Des feuilles du dernier automne
Même au printemps.

Et là, dans l’avenue humide ou poussiéreuse,
Au seuil de la plaine lépreuse

Où des arbrisseaux noirs et maigres font la haie,
La maison accroupie, aveugle douloureuse,
Porte sur ses yeux blancs le ciel comme une taie.

Je me souviens, je me souviens
Du jours hélas ! bien ancien,

Où nous sommes venus chercher le solitaire
Pour le mener en terre.
Je me souviens du bruit du fiacre s’arrêtant
Dans le silence affreux qui se fit à l’instant
Où le cercueil sortait nu des noires tentures,

Je me souviens du bruit plus lointain des voitures
Dans le silence haletant...
L’air dans la maison morne était funèbre et lourd,
Les pas pressés faisaient un piétinement sourd ;
On défaillait un peu dans le parfum des roses,
Et malgré soi l’on songeait à la gloire,
Et l’on sentait que c’était peu de chose,
L’étrange instinct de vivre en l’humaine mémoire,
Et, cependant, qu’à cette envie absurde et vaine
Correspondait ailleurs une splendeur certaine,

Une réalité pleine de profondeur,
Et les roses exaspéraient leur forte odeur.

Les cierges vacillaient ainsi que des étoiles;
Des femmes sanglotaient doucement sous leurs voiles.
On appela des noms dans l’écho du couloir
Des poètes fameux passaient, vêtus de noir,
Sous des regards croisés de respect et d’envie,
Silencieux, le front ravagé par la
vie,
Tous méfiants, entrés dans l’art ivres d’amour !
Il y avait Samain qui est mort à son tour.

Rodenbach, et Samain, depuis si longtemps morts !
Ce soir je lis vos vers qui sont vivants encor,
Ce soir je lis vos vers et vous,
vous n’êtes plus.
Je vous revois, amis, tels que je vous connus,
Tristes profondément, tristes de toute une
âme.
Vous passiez secrets, doux, un
peu, désespérés,
Fiers, mais las de votre art aux durs labeurs sacrés,
Qui ne vous payait pas ce qu’il nous vaut de larmes !
On vous disait en vous serrant la main :

« Bonjour, Rodenbach, au revoir, Samain.
À demain.
À bientôt. »
Et l’on faisait un mot,
Avec
vous, ou sur vous, même, par habitude,
Par lassitude...
Et puis vous
êtes morts, morts un peu de votre art,
Silencieux, mélancoliques, encor jeunes,

Tous deux maigres et fins comme après de longs jeûnes
La gloire est un festin aux hôtes de hasard.
Amis que jeune j’ai connus,

Rodenbach et Samain, qu’êtes-vous devenus ?
Est-il donc vrai que vous soyez
Disparus à jamais, disparus tout entiers,
Est-ce possible ?

Toute cette beauté qui vivait invisible
Dans votre chair mortelle

Et qui n’a pu mourir, où donc est-elle ?
Bruges, qui ne veut pas, Rodenbach, être morte
A laissé ta statue arrêtée à sa porte.

Mais n’y survis-tu pas par la grâce de l’art
Dans tout ce que tes vers voilés ont chanté d’elle,
Mais n’y flottes-tu pas toujours dans son brouillard,
Mais ne chantes-tu pas dans ses cloches fidèles ?
Toi, Samain, n’est-ce pas qu’un peu de toi subsiste
Dans tout ce qu’ici-bas aimait toit âme triste,
Que Versailles te cache en son royal décor,
Quand sur Trianon meurt un couchant d’améthyste
Et qu’on entend au fond des bois un lointain cor ?...
N’est pas que la gloire, amis, n’est pas un mot,
Et que j’avais raison, parmi l’air chaud
Ou défaillaient les cierges et les roses,
De la sentir réelle entre toutes les choses ?
N’est-ce pas que Verlaine est un luth dans la brume,
Que Baudelaire habite un lys né de l’écume,
Que Hugo sombre, énorme, éblouissant, amer,
Gronde et déferle encore aux strophes de la mer ?
N’est-ce pas que Nerval bat dans une émeraude,
Que Vigny nage encor dans la blancheur des cygnes,
Et qu’on entend aux nuits où le vent d’été rôde,
Dans les sphères errer l’âme de Lamartine ?

N’est-ce pas que nous tous, illustres ou obscurs,
Tous ceux-là qui parmi les hommes aux cœurs durs
Ont donné le meilleur de leur vie à la gloire
N’ont pas été dupés par un rêve illusoire,

Mais qu’ayant augmenté le songe héréditaire,
Le grand songe que fait l’homme devant la terre,
Ils ont mêlé leur âme à la beauté du monde,
Et qu’en elle à jamais, par un juste mystère,
Ils vivent d’une vie ineffable et profonde !