Discours prononcé lors de la visite du président de la République fédérative du Brésil, M. Luiz Inácio Lula da Silva

Le 5 juin 2025

Erik ORSENNA

DISCOURS

DE

M. Erik ORSENNA

 

Monsieur le Président,

 

La main que voici a déjà eu l’honneur de serrer la vôtre. Il y a près de quarante ans, pour être plus précis un certain jour d’octobre 1985. Vous présidiez déjà. Mais pas encore le pays. Un parti. Le plus utile de tous les partis, le Parti des travailleurs. Et moi, j’étais le petit conseiller culturel du président François Mitterrand venu en visite d’État.

Mon histoire avec le Brésil avait commencé bien longtemps avant, lorsque le frère de mon père, architecte, disciple d’Oscar Niemeyer… et clarinettiste, se trouvant à l’étroit chez nous, avait décidé de faire sa vie chez vous. Il revenait en France tous les deux ans. Mais quand il repartait, toujours en bateau car il détestait l’avion, il fallait me chercher. Car, chaque fois, je me cachais dans le paquebot : je voulais partir avec lui.

C’est comme cela que le Brésil est devenu mon Amérique à moi, le lieu de tous les possibles, de toutes les amitiés qui grandissent. Et quand l’ambition m’est venue d’écrire un vrai roman, le sujet ne pouvait venir que de chez vous. Comme pour mon confrère Jean-Christophe Rufin. Exposition coloniale et Rouge Brésil, même combat. Même prix Goncourt.

C’est vous dire notre bonheur quand vous êtes revenu aux responsabilités.

Le monde a besoin de ce grand Brésil dont vous portez haut les valeurs de justice, de fraternité, d’équilibre et d’alliance avec la nature.

C’est dire notre honneur de vous voir ici chez nous.

C’est dire notre impatience de travailler ensemble.

Car, je vais vous faire une confidence, Monsieur le Président : depuis ce jour d’octobre d’il y a quarante ans, je me suis toujours senti d’abord membre de ce Parti, le vôtre, celui des Travailleurs.

Travailler encore et encore, pour dénoncer et alerter, comme l’a fait jusqu’à l’extrême fin de sa vie ce maître du regard, Sebastião, qu’aujourd’hui nous pleurons.

Sebastião et Lélia SALGADO, enfants de l’Alliance française de Vittoria. Sebastião et Lélia, les franco brésiliens planteurs de trois millions d’arbres, Sebastião et Lélia, les reconstructeurs de forêt.