Funérailles de M. le comte de Cessac

Le 18 juin 1841

Victor-Joseph-Étienne de JOUY

FUNÉRAILLES DE M. LE COMTE DE CESSAC

DISCOURS DE M. DE JOUY,
DIRECTEUR

PRONONCÉ AUX FUNÉRAILLES

DE M. LE COMTE DE CESSAC,

Le 18 juin 1841.

 

MESSIEURS,

En présence de la tombe qui va se fermer sur les restes mortels de notre vénérable confrère, oublions les titres, les honneurs dont il fut comblé, ne parlons que des vertus dont il nous a laissé l’exemple ; Jean-Gérard Lacuée de Cessac, dans une des plus longues carrières qu’il soit donné à l’homme de parcourir, est constamment resté fidèle aux mêmes principes, la probité, l’honneur et la patrie ; inviolablement attaché à la liberté légale, il fut en même temps l’énergique adversaire du désordre et de l’anarchie révolutionnaire ; il ne sépara jamais les droits de l’honneur des intérêts de la patrie. Deux mots suffiraient à son éloge : l’admirateur de Napoléon fut aussi l’ami intime de Carnot ; il ne balança pas à prendre la défense de ce dernier au jour où la proscription l’atteignit ; c’est le moment de nous souvenir que nous avons vu naguère le vénérable Cessac, oubliant son âge, ses infirmités, l’excessive rigueur de la saison, assister aux funérailles de Napoléon, et, prosterné sur le pavé du temple, gémir et verser des larmes devant le cercueil de Sainte-Hélène. — Successivement procureur-syndic de son département, président de l’assemblée législative, conseiller d’État, ministre de la guerre, gouverneur de cette École polytechnique devenue sous son administration la première école du monde, dans toutes les positions où il s’est trouvé, M. de Cessac s’est montré l’homme de la patrie et du devoir. Cette double mission, qu’il a si courageusement remplie dans toute son étendue, a consacré son nom dans nos fastes civils et militaires. — Dans ce moment douloureux qui nous sépare à jamais sur la terre, ta voix consolante, cher et illustre confrère, vient encore adoucir nos regrets ; c’est elle, c’est cette voix de la tombe qui nous affermit dans l’espoir religieux de nous retrouver un jour dans ce monde meilleur où l’homme de bien est sûr d’obtenir d’un Dieu juste et clément son éternelle récompense.

Adieu ! adieu, jusqu’au jour de l’éternité.