Réponse au discours de réception de Félix Dupanloup

Le 9 octobre 1854

Narcisse-Achille de SALVANDY

Réponse de M. le comte de Salvandy
au discours de M. Dupanloup

DISCOURS PRONONCÉ DANS LA SÉANCE PUBLIQUE
le jeudi 9 novembre 1854

PARIS PALAIS DE L’INSTITUT

     Monsieur,

Nous sommes tranquilles sur l’avenir. Vous venez de donner à la compagnie des gages dont elle prend acte vis-à-vis de vous. Vous avez su parcourir en quelques moments, avec un succès qui remplit encore cette enceinte, le cercle entier des devoirs académiques.

Le premier de tous est la rédaction du Dictionnaire, tâche immortelle parce qu’elle renaît toujours. Vous y avez travaillé déjà. Non content de nous promettre votre concours pour cette langue savante et rigide de l’Église, où une définition est un article de foi, et où une erreur serait un trouble pour les consciences, on vous a vu, d’une main ferme et sûre, rattacher le Dictionnaire tout entier aux fondements mêmes de l’ordre moral, en mettant à découvert la chaîne cachée qui lie aux mots les choses, et, quelquefois, aux choses d’un pays et d’un temps, celles du monde. Les mots aussi ont des chances diverses, des règnes passagers et souvent terribles. Vous avez démontré comment la résistance persévérante aux abus du langage et aux confusions de la pensée peut les dépouiller des prestiges qui trompent la raison des peuples, faire justice des amorces qui entraînent la foule, et peut-être affermir ainsi dans la société l’ordre et les lois. Au sortir de révolutions qui se sont accomplies à la poursuite de symboles faussés jusqu’au délire, il appartenait à votre caractère et à votre esprit de jeter une vive clarté sur le principe de ces égarements. En marquant mieux la place que tient le vocabulaire des nations dans leur destinée, vous éleviez à nos yeux comme aux vôtres, l’honneur d’avoir la garde d’un tel dépôt, quand ce dépôt c’est la voix de la France, l’instrument de nos grands siècles littéraires, la langue consacrée des lettres et de la politique dans tout l’univers. Heureux destin d’un esprit tourné toujours vers les intérêts et les vérités du monde immatériel ! Tout s’agrandit pour lui. Un jet du flambeau qui vous guide, vous a suffi pour faire voir à tous que, dans l’ordre des lois du langage comme en toute chose, le vrai et le beau, pour employer après vous une formule dont l’Académie est fière, sont nécessaires à fonder le bien et à le conserver.

En même temps, comme l’architecte qui saurait également veiller sur le chantier où les matériaux s’assemblent, et embrasser dans ses études toute la suite des monuments bâtis par le génie de l’homme, vous avez salué la longue et noble succession des lettres de l’un des plus splendides hommages quelles aient jamais reçus : je puis m’exprimer ainsi, puisque ce sont les plus saintes autorités qui ont parlé par votre bouche. On a dit de l’Esprit des lois que l’auteur avait retrouvé les titres du genre humain : vous avez remis ceux de l’esprit humain dans tout leur jour ; vous lui avez restitué son extraction divine, sachant bien que c’était égaler ses devoirs à sa fortune, Les grandes littératures sont la noblesse intellectuelle de l’humanité. Vous faites remonter leur généalogie à Dieu même. C’est, en effet, quand l’homme sent et pense, qu’on voit clairement que Dieu le fit à son image. Vous n’aviez garde de l’oublier, Monsieur, et, comme les grandes choses s’enchaînent, vous avez trouvé pour le dire un langage au niveau de vos pensées. On sentait, en vous écoutant, d’où descendait votre parole et où elle remontait. Ce vaste auditoire vient de vous admirer et de vous applaudir ; l’Académie vous remercie et vous félicite.

Cet hommage à la cause générale des lettres a ramené vos regards sur le siège que vous vous êtes hâté de venir remplir au milieu de nous, et l’Académie, touchée déjà de votre empressement, l’a été de vos paroles sur celui de ses membres qui vous a précédé. Elle vous avait prévenu dans l’appréciation de sa carrière littéraire. À l’époque où resta vacante la place qu’il avait occupée vingt ans parmi nous, elle prononça un jugement réfléchi de la plupart de ses travaux ; quelquefois ouvrages considérables, trop souvent jets rapides sans lien entre eux, tous attestant ce fruit heureux des bonnes études de la jeunesse, qui, après le naufrage de théories et d’illusions fatales, s’étaient retrouvées tout à coup à ses côtés, comme de fidèles et salutaires compagnes, pour offrir un sûr abri au reste de sa vie. Tout le monde a remarqué votre attention à saisir le seul point commun qu’il y eût entre lui et vous, dans cet amour vrai des lettres, qui a été, selon votre juste expression, l’honneur de sa vie, qui n’est qu’une des distinctions de la vôtre. Nous avons tous compris ce touchant regret de n’avoir jamais eu à débattre les grandes questions littéraires avec le successeur de Delille. Dans ce regret, le cri de votre cœur d’évêque a percé jusqu’à nous.

Vous pouviez nous le faire entendre, Monsieur. C’est, en effet, l’Évêque que nous avons appelé au sein de l’Académie, l’Évêque respectable et cher à l’Église de France, nous la retraçant par le zèle et la foi, par les exemples et les doctrines ; toujours prêt à combattre comme un soldat, je me trompe, comme un pontife, pour sa cause ; tantôt revendiquant pour elle, au delà de l’esprit du temps, l’éducation de la jeunesse ; tantôt poussant à Rome nos soldats, pour sauver du suicide la ville éternelle, et lui restituer la triple couronne au milieu des nations ; aujourd’hui même, prêt à nous quitter pour y porter le tribut de votre dévouement et de votre foi ; et, en même temps, nous avons voulu honorer en vous le disciple, le maître enthousiaste de ces belles études qui sont le plus noble instrument de l’homme, et le plus puissant ; également nourri des trois antiquités biblique, grecque et latine ; donnant au jeune clergé de notre époque cet utile exemple ; compté au nombre des docteurs et des orateurs renommés ; instituteur consommé de la jeunesse, écrivain. Mais qu’apprendre à une assemblée qui vient de vous écouter ? Qui ne sait que les œuvres dogmatiques, les écrits de circonstance, les traités d’éducation, n’ont été pour vous que des occasions de présenter, sous des aspects pleins de lumière et de puissance, la théologie, le droit ecclésiastique, la politique de l’Église, la politique sociale, la philosophie, l’histoire, ce que vous appelez la grande histoire des hommes, celle où la main de Bossuet va saisir, comme il le dit, le fil des affaires de l’univers ? Vos seuls travaux de chaque jour, faits pour le sanctuaire, auraient suffi pour abaisser devant vous les barrières de cette enceinte. Que dire de ce récent discours, où vos lecteurs étonnés ont cru voir les langues grecque et latine, comme deux fleuves qui seraient descendus, à l’insu du monde, des hauteurs du Calvaire et du Thabor, pour porter la loi divine par toute la terre, en roulant dans leurs eaux l’or pur de l’antiquité, et réunissant ainsi, pour désaltérer la soif des nations, après la parole de Dieu, ce qu’il y a de plus parfait dans le génie de homme ! Vous le voyez, Monsieur : celui dont la tâche heureuse est de dire les raisons de nos suffrages, et qui s’en fait un des plus chers honneurs de sa vie, il ne rencontre qu’une difficulté sur sa route, celle de choisir les plus éminents de vos titres, pour ne pas les exposer tous.

Depuis quelques moments, nous vous en comptons un de plus. Vos paroles laisseront un long souvenir, et ce m’est un profond sujet de joie d’avoir à vous les renvoyer, de la place où je suis. Oui ! la religion et les lettres doivent être unies ! Oui, ce sont deux puissances des régions spirituelles, quoique diverses, toutes deux se servant de la pensée et de la parole pour entraîner et gouverner le monde ; une, qui vient tout droit de Dieu ; l’autre qui n’en vient que par le détour de la liberté de l’homme, tout ensemble capable des plus grands essors et sujette à tous les vents de la passion et de l’erreur ; par cela même s’applaudissant, quand elle est sensée, de trouver un point fixe, dans l’ordre religieux, pour s’y appuyer, et affermir ainsi le sol sous les pas des peuples, au lieu de s’employer follement à l’ébranler ! Voilà ce qu’avait compris cette littérature superbe et réglée, vers laquelle se reportent aujourd’hui tant de grands esprits, et avec eux tout le courant refoule des opinions humaines. On a vu l’inexorable logique du gouvernement de la Providence : le divorce des peuples avec les croyances suivi du bouleversement social ; la liberté, impuissante contre des passions également dépourvues de frein et de lumière ; les générations, que ne tempère plus cette discipline intérieure qui vaut mieux que la force et qui est plus durable, troublées et quelquefois terribles comme l’aveugle robuste qui a perdu sa route. Grands sujets de méditation dont vous saviez la portée, il y a de longues années déjà ! Car vous disiez que « l’homme extraordinaire des commencements du siècle sembla apporter là ce coup d’œil infaillible qui le faisait triompher dans les batailles, lorsque, jugeant bien que l’impiété et l’anarchie étaient sœurs, pour leur imposer silence, il fit tout taire devant sa redoutable épée ( 1). » Vous savez, Monsieur, combien de voix illustres ont proclamé les mêmes enseignements sous ces voûtes ! De plus obscurs les y ont rappelés invariablement, depuis près de vingt ans. En vous souhaitant parmi nous, nous mettions d’accord nos actes et nos maximes.

Il faut le dire aux préjugés qui ont été si funestes, et qui luttent encore. Quelque chose manque dans une société civilisée, partout où la religion est absente. L’homme est incomplet et mutilé, quand ce sentiment, ce principe, cette clarté, sont étouffés ou sommeillent en lui. L’esprit humain, loin de s’élever plus haut, on l’a trop vu, se corrompt et s’abaisse, quand il abjure cette salutaire assistance. La patrie n’a ni toutes ses forces, ni toutes ses lumières, ni toutes ses grandeurs, quand il lui arrive, par peur ou passion, de ne pas se faire honneur de cette grande hiérarchie que l’histoire appelle l’Église de France, et qui a été une part si considérable de sa puissance et de son génie. Ceux qui appuient de l’intérêt des libertés humaines ces aveugles répudiations, n’ont qu’à regarder autour d’eux. Les grands exemples du monde, par tout ce qui a péri, par tout ce qui a vécu, attestent qu’il faut les fortes institutions religieuses aux fortes institutions civiles, quand on les veut durables.

L’Académie française a le rare privilége de dater du grand siècle. Elle en respecte la gloire ; elle en garde les traditions ; elle sait que ce fut, depuis l’origine, sa mission et son honneur de représenter à la fois toute l’autorité morale et tout le génie littéraire de la France. Pouvait-il n’en être pas ainsi ? Bossuet, dont la statue est là debout, qui semble tenir toujours sa place au milieu de nous ; Fénelon, tant d’autres illustres mémoires, notre fondateur, car comment oublier ce puissant et fier génie, même devant de tels génies et de telles renommées ? Quelles images ! Quels flambeaux ! Et, en même temps, quelle milice que celle qui a de tels chefs à montrer au monde, depuis dix-huit cents ans, inépuisable de grands hommes, allumant, jusque parmi les ombres du moyen âge, quelques-uns de ces phares, les Gerbert, les Anselme, les saint Bernard, les saint Thomas d’Aquin, pour ne pas laisser chômer dans le genre humain la tradition du génie et du savoir, depuis l’antiquité jusqu’à nos jours ! Encore les grands hommes forment-ils le moindre de tous les titres de l’Église à être comptée pour le poids de ses travaux et de ses services, partout et toujours ! Elle en a un autre qui devrait être cher à l’esprit moderne, et qui, pour mon compte, me touche profondément : c’est le combat obstiné de toute cette armée de l’intelligence, de la charité et de la conscience, contre l’ignorance, contre la corruption et l’abrutissement trop faciles des hommes dans tout l’univers ; c’est son dévouement à instruire le dernier des pâtres et des laboureurs, d’un bout du monde à l’autre, sur les choses éternelles, lui parlant d’infini, d’immortalité de l’âme, de justice divine, de bienveillance réciproque, de vertus domestiques, de devoirs sociaux, de dignité humaine, ce noble levier auquel je ne sais pas d’autres solides points d’appui ! Retranchons à chacun de nos clochers la chaire évangélique ! Qui agitera ces grandes questions ? Qui tentera de faire vibrer ces grandes cordes de l’âme humaine ? On verrait les populations dégradées retomber, sans une étoile au ciel, dans la nuit des abaissements les plus grossiers, des plus brutales passions. Ah ! on peut le dire avec assurance, la plus grande école de métaphysique accessible et populaire, la plus grande école de morale spéculative et pratique que le monde pût connaître, est là.

Voilà pourquoi, depuis deux siècles et plus, près de cent représentants du sacerdoce, près de soixante membres de l’épiscopat français orateurs, écrivains, érudits, pontifes illustres, princes de l’Église, qui avaient gouverné l’État, servi la religion ou les lettres avec gloire, se sont succédé dans nos rangs. Il est remarquable qu’après la révolution sous la restauration ou l’empire, la compagnie ait pu réunir, au grand orateur ecclésiastique que l’ancien régime lui avait légué, l’abbé Sicard, le cardinal de Beausset, le cardinal de Boisgelin, l’abbé de Montesquiou, l’évêque d’Hermopolis, M. de Quélen, assurément un digne faisceau de grandes renommées et de nobles esprits !

M. de Quélen fut le dernier qui siégea dans cette enceinte : prélat de généreuse et intrépide mémoire, qui vous fut cher, dont vous avez raconté dignement les héroïques vertus, le jour où vous preniez votre charge pastorale, en lui dédiant votre épiscopat ! Il est ici votre véritable prédécesseur, et on dirait que cela devait être ainsi : car il fut pour vous ce que le vénérable cardinal de Périgord avait été pour lui. Il distingua votre enfance ; il encouragea votre vocation, il dirigea votre sacerdoce. Saint-Sulpice, où il avait été formé lui-même, comme presque tout épiscopat français ; Saint-Sulpice, où le savoir s’égale à un zèle apostolique qui n’a failli dans aucune épreuve, lui promit en vous une lumière de l’Église. Qui ne sait qu’à peine étiez-vous ordonné, il avait la joie de vous voir catéchiste éminent, renommé, l’ambition des mères ! Dans cet humble apprentissage de l’éloquence religieuse, où tout se passe entre le cœur du prêtre et celui de l’enfant qui recueille sa parole, sans un bruit que puisse entendre le monde, le monde retentit promptement des succès de votre jeune enseignement. Là commença à se former autour de vous cette clientèle d’âmes chrétiennes, qui est l’un des attributs de l’Église, la vraie couronne du sacerdoce, la vôtre. Vous contemplez, à toutes les distances autour de vous, dans tous les états de la société, les fruits de votre zèle infatigable ; et nous, nous les remarquons surtout dans cette région du monde, plus en vue qu’aucune autre, raffermie par ses dures épreuves, rajeunie et fortifiée de toutes les grandeurs civiles et guerrières de la France nouvelle, rétablie enfin à son vrai rang ; car elle est, par les plus solides vertus, l’exemple et l’honneur de la société présente.

Vos promptes nominations au poste de vicaire général du diocèse de Paris et à celui de supérieur du petit séminaire de Saint-Nicolas, où vous aviez grandi, vous ouvrirent des horizons nouveaux. C’est là, Monsieur, que nous vous saisissons. À dater de ce moment, par la prédication, par les écrits, par l’enseignement, vous nous appartenez. Le saint archevêque semblait s’être attaché à égaler à vos forces et à vos lumières les occasions de les faire voir au siècle, comme pour se préparer un successeur au milieu de nous. Aujourd’hui, en effet, vous venez le restituer à l’Académie, veuve trop longtemps de doctes et grands pontifes. Renouez, Monsieur, renouez avec confiance la chaîne interrompue : elle ne pouvait se rétablir (j’emploie votre image !) par un plus digne et plus ferme anneau ; car il est trempé tout à la fois aux eaux vives de la religion, aux pures sources des lettres ; et la religion ne l’a prêté aux lettres qu’en le gardant tout entier.

Je remarque que l’homme d’État illustre qui prit séance à la place de l’archevêque de Paris, le 30 décembre 1840, en honorant avant tout la dignité de son caractère, ce qu’il avait de ferme et de fier, célébrait le feu sacré de la charité, qui brillait en lui d’un si vif éclat, et ajoutait que, né dans un temps d’orage, il en avait conservé l’émotion. On se demandera si l’éloquente amitié de M. le comte Molé, ce jour-là prophétique, ne traçait pas deux portraits en un seul. Ce serait tout simple. Des âmes comme les vôtres ne s’étaient rapprochées si intimement, que parce qu’elles se ressemblaient.

L’Académie ne peut pas vous suivre dans la chaire, Monsieur. Vous n’avez pas recueilli les fruits de votre prédication. Ils n’existent pour elle que dans le souvenir de ceux d’entre nous qui vous ont entendu. Vous aviez longtemps lutté contre le vœu de votre archevêque et des fidèles, quand vous vous résolûtes fort tard à franchir ces degrés où tous nos grands prédicateurs ont passé. Votre réputation vous y précédait ; elle s’y accrut. Vous prîtes rang promptement parmi nos orateurs sacrés, à une époque où la France s’étonna d’apprendre qu’ils se fussent presque tout à coup multipliés dans son sein. L’évêque d’Hermopolis, bien des années auparavant, presque sur le seuil du siècle, à la surprise universelle et dans l’universel silence, avait relevé la chaire muette des martyrs et des docteurs ; il faut avoir vu ce temps, même quand on le vit jeune, avoir entendu cette voix austère et convaincue, au milieu d’un auditoire aussi étonné de lui-même que de l’orateur, pour comprendre l’émotion de cette renaissance d’une puissance qu’on croyait morte, et d’une forme de l’éloquence qu’on croyait abolie. Quelque chose de ce sentiment se retrouva à l’époque de vos premiers travaux, quand on s’aperçut que toutes les églises de Paris possédaient un interprète de l’Évangile, aimé, recherché, renommé, Il y eut de grandes apparitions. Vous étiez du nombre. On eût dit, entre les orateurs religieux et politiques, une émulation de la parole humaine et de la parole divine, pour se disputer ce grand auditoire de la société française, peut-être le premier du monde par l’intelligence, le tact et le goût. Mais la religion et la liberté n’avaient point à se le disputer l’une à l’autre ; il pouvait appartenir à toutes deux : toutes deux remplissaient une de leurs missions : la liberté, en nous portant de plus en plus à aimer les grandeurs de l’esprit ; la religion, en contribuant à nous les donner.

L’éloquence sacrée était alors simple et recueillie, comme il convient à l’exilé qui revoit sa patrie après les longs malheurs. Le temps vint où des formes nouvelles se mêlèrent à la prédication des anciennes vérités ; un goût périlleux et passager, à un enseignement sévère et immuable de sa nature ; je ne sais quelle émulation de nos orages, à cette paix du sanctuaire devant lequel leur souvenir doit expirer. Vous fûtes de ceux qui résistèrent à l’innovation. Il n’était pas en vous de céder au torrent, au lieu de lui commander, et vous étiez trop littéraire pour vous plier à ces transformations. Le goût et le commerce des lettres classiques se faisaient reconnaître en vous sur-le-champ. Vous êtes de l’école qui orne l’inévitable rigidité de la chaire, des pompes d’une éloquence correcte et châtiée, mais abondante, harmonieuse colorée. Ce n’est pas celle du XVIIe siècle. Vous n’imitiez pas vos grands devanciers qu’entendit Louis XIV. C’est à une époque plus prochaine qu’il aurait fallu chercher votre modèle. Vous n’aviez pas, comme Massillon, un jeune roi pour auditeur, seulement quelquefois une reine cachée dans la foule, et ce doit être pour vous aujourd’hui un bon souvenir, n’ayant jamais flatté les perspectives de sa puissance, de n’avoir non plus jamais blessé les longues tristesses de son cœur !

Vos écrits, Monsieur, ont précisément les mêmes caractères. Vous n’avez qu’un style, parce que vous écrivez avec quelque chose d’invariable, l’intérêt saint qui vous anime. Mais l’uniformité de richesse dans l’expression se lie à une richesse si vraie de la pensée, qu’on songe bien moins à regretter la diversité absente, qu’a jouir de ce rare éclat. Le sentiment, la pensée, surabondent toujours. Ce luxe intérieur se trahit, en quelque sorte malgré vous, dans la pompe des formes et des images. Si vous étiez occupé de gloire, si vous aviez le temps de vous prémunir contre vos qualités, vous seriez bien près d’être défendu de vos défauts.

L’image de Fénelon remplit vos livres comme votre pensée. Il est évident que le secret penchant qui conduit les esprits d’élite à des morts illustres, comme nous allons tous à des contemporains chers et respectés, pour profiter de leur commerce, vous a inspiré ce culte, pardon du mot ! cette prédilection de votre âme et de votre raison, pour une si grande âme et un si tendre génie. Fénelon mourut avec le regret de n’avoir pas fait un livre auquel il avait pensé toute sa vie, que le duc d’Orléans sollicitait de lui un an avant sa mort, mais que la mort du duc de Beauvilliers, celle du duc de Bourgogne, ces deux tristesses inconsolables de son cœur, t’empêchèrent de tenter. Il y attachait tant d’importance qu’il l’avait demandé, dans sa modestie, à Bossuet, comme vous, Monsieur, vous le demandez à sa mémoire ( 2).

Vous vous êtes dit que le grand homme se trompait, qu’il avait fait le livre à son insu, qu’on le trouverait dans ses écrits, qu’il suffisait de l’y chercher ; vous l’y avez trouvé en effet. Grâce à vous, un monument de plus compte à la gloire du grand évêque. Maigre vous, il comptera aussi à la vôtre. Le traité sur Fénelon lui-même, dont vous avez accompagné la nouvelle œuvre, est un livre excellent. Histoire, controverse, peinture des temps passés, intelligence des temps présents, tout intéresse, et plus que tout, cette grande figure de l’archevêque de Cambrai. Là, c’est votre âme qui déborde. Vous admirez tout, même, je crois, Télémaque. Mais vous admirez, en nous apprenant pourquoi. Ai-je à dire que ce qui vous touche plus que les fruits de son génie, c’est le grand acte de sa vertu, de sa foi, j’ajouterai : de sa politique chrétiennes, la soumission au saint-siége, le respect à l’unité catholique, l’abjuration de toute lutte contre son rival approuvé ? voilà ce que vous honorez sans limite. Il grandit à vos yeux, ainsi qu’à ceux de l’histoire, de tout ce dont il a voulu s’abaisser au niveau de la dernière brebis de son troupeau !

Dans ce beau spectacle, Monsieur, on vous sent partagé, je ne dis pas entre les deux doctrines, mais entre les deux docteurs immortels. Il y a en vous trop de ressorts communs avec l’un d’eux, pour que vous soyez dur aux inclinations de sa théologie, qui étaient celles de son âme. Mais là et ailleurs, vous traitez avec le même respect la colossale figure de Bossuet. Vous l’éludiez avec le même amour. Vous vous proposez de montrer, chez l’aigle de Meaux, le cœur supérieur comme le génie, la tendre charité égale a la force indomptable, l’homme semblable au grand homme. Le but était digne de vous, et je ne puis vous taire la joie de l’Académie à trouver en vous cet égal souci de deux illustres mémoires qu’elle distingue, mais ne sépare pas, qui lui représentent ensemble une admirable et digne image de cette fille sublime du Dieu de Clovis et de saint Rémy, l’Église de France !

L’admiration facile, vive, qui donne sans compter, est une des qualités de vos écrits que je devrais dire noble, belle, que j’appellerai charmante. Il est si rare de savoir cette chose si simple ! C’est qu’il y faut un esprit désintéressé de soi, et un cœur intéressé aux autres. Vos travaux de l’ordre le plus sévère trahissent partout cette heureuse disposition. Une autre s’y révèle qui a peu cours aujourd’hui, et qui, en effet, devait se conserver au pied du sanctuaire : c’est l’inspiration, l’enthousiasme, ce que vous venez de nommer le feu sacré, cette flamme naturelle qui vient de l’âme ou du cœur et en perpétue la jeunesse ! Je puis louer ce don en votre présence : car on assure que c’est un défaut. Le monde en médit beaucoup, peut-être pour mieux s’en passer. J’ose avoir d’autres sentiments. J’y admire et j’y respecte une vue plus haute des choses humaines, la passion du bien, l’exaltation de la conscience, le ressort qui fait, au besoin, les héros et les martyrs, et je choisis bien le moment pour le louer hardiment, devant une assemblée qui l’a vu de ses yeux, qui l’a entendu, qui croira longtemps l’entendre encore. L’enthousiasme a un mérite, c’est de ne visiter que des esprits ou des cœurs élevés, et de ne naître que de nobles amours, de celui, par exemple, des bonnes causes, joint à la foi dans leur puissance. Il recèle une foule de sentiments favorables qui me touchent à titre d’homme, de contemporain, de citoyen de mon pays, de sujet de la Providence. Vous ne méprisez pas les hommes ; vous augurez bien de notre temps, maigre sa part des misères du monde. Fils très-aimé de cette Savoie de saint François de Sales, que nous n’avons pas restituée tout entière en 1814, car nous vous avons gardé, vous attendez beaucoup de notre patrie ; vous l’aimez passionnément ; pour parler de cette France généreuse et terrible, dites-vous ( 3), douée, à ses risques et périls, d’une éternelle jeunesse, et qui ne fait jamais tout craindre, sans laisser tout espérer ! vous trouvez toujours des accents d’une tendresse pleine de fierté. Enfin, vous croyez à la bonté divine, qui permet le mal sur la terre, mais sans nous abandonner, impuissants et désespérés, à son empire. « En le permettant, assurez-vous ; Dieu le dompte, le fait entrer dans l’ordre de sa Providence, et en fait jaillir les eaux vives, comme du roc au désert (4 ). » Ministre des espérances éternelles, vous ne connaissez pas le découragement des âmes disproportionnées à leur tâche, les impatiences des caractères médiocres et des esprits courts. Vous avez une habitude de chercher de préférence les hauteurs, et de les trouver, qui vous fait voir de plus loin au delà des accidents particuliers qui blessent, vous contemplez les perspectives générales, qui satisfont et qui rassurent. Tout cela, Monsieur, vous donne les vastes horizons, les pensées sérieuses, le digne langage, la richesse de couleur, que votre imagination prodigue, mais sans s’épuiser. En toute chose, vous aimez le grand ; c’est le signe des nobles natures. Aussi peut-on vous prendre pour guide avec certitude ; on ne se risquera pas de descendre ; votre pensée s’élève toujours ; elle élève les sujets, les lecteurs, parfois même les adversaires ; et, à la suivre, il n’y a pas de péril : car vous marchez droit sur une lumière qui peut éblouir, qui peut même fasciner, mais n’égare jamais.

En vous lisant, Monsieur, on apprend bien vite que c’est votre besoin naturel des grands essors qui a fait votre destinée. Le vulgaire croit l’esprit captif dans les entraves de la foi. Dans tous vos écrits, dans vos livres empreints plus particulièrement d’une haute et vive spiritualité, comme la Vie de madame Acarie, vos extases d’édification, vos chants d’allégresse nous attestent que ce sont les perspectives de lumière et de vie sans limites, les splendeurs sans égales, où vous avez vu le but le plus haut des contemplations de l’âme et des efforts de l’intelligence, qui vous ont subjugué sans retour. Aussi, n’y a-t-il pas à chercher ce que vous êtes ? Vous êtes prêtre, Monsieur ; vous l’êtes dans votre existence entière, et c’est vous qui avez défini le sacerdoce, l’apostolat qui prêche, qui combat, qui se dévoue, qui se sacrifie ( 5) ! Vous avez oublié un mot : qui enseigne. Oubli étrange ! car c’est un autre emploi perpétuel de vos forces et de vos lumières qu’il me reste à considérer. C’est un second apostolat, qui a tenu tant de place dans votre vie, qu’il aurait suffi à la remplir tout entière. Vous avez été, pendant plus de vingt-cinq années, un corps enseignant à vous seul, menant de front les deux missions du ministère évangélique et de l’éducation de la jeunesse, de manière à ce qu’on eût pu vous croire tout entier à chacune d’elles.

Supérieur de Saint-Nicolas, ce qu’avaient accompli votre zèle pour une solide instruction, votre forte discipline de vous-même et des autres, votre puissance de volonté, tout le monde le savait. Ce que vous pensiez, après quelques années du succès de vos efforts, tout le monde put le savoir, le savoir par vous-même, dans le défi qu’il vous arriva de lancer à l’Université, d’une joute à armes égales, classe pour classe. Je dois dire à votre gloire qu’un autre établissement de même nature, votre jeune et forte création du diocèse d’Orléans, a semblé donner raison à votre bonne opinion des études qui se font sous vos auspices ; car un de vos élèves, venu à l’un des grands lycées de Paris, dans les hautes classes, a obtenu, de prime abord, cette année même, trois nominations au concours. Cela rappelle ces vaillants athlètes des combats classiques.

Il est tout simple que vous sachiez les former ; car vous savez l’être admirablement. Vous l’avez été par la polémique, par les traités d’éducation, dans des conseils célèbres ; et vous nous avez dit, Monsieur, le principe et la fin de cette laborieuse vocation, tout à l’heure, dans cette séance, par une parole qui vous a paru toute simple, et qui a fait tressaillir sur ces bancs toutes les mères, qui est allée au fond de nos âmes à tous, et y a porté, avec un religieux recueillement, bien des clartés. C’est que l’enfance a été le premier amour de votre vie, et sera le dernier !

Ah Monsieur ! il n’y a que le prêtre catholique dans le monde qui puisse trouver au fond de son cœur ce cri sublime, et c’est parce que vous l’y trouvez, que le sacerdoce a été le conquérant du monde, que les instituts religieux sont à la fois d’admirables précepteurs de l’enfance et des rivaux si redoutables. C’est pour cela aussi que le clergé séculier, ses pontifes à sa tête, quand il n’y a plus de corporations enseignantes, apparaît sur-le-champ pour joindre à l’enseignement religieux et la juridiction spirituelle dont il a le dépôt, l’éducation même. C’est sa pente inévitable, et je dirai sa gloire. Pourquoi le contester ? Les âmes sont si évidemment en cause, qu’il n’aurait pas l’esprit de son ministère, s’il séparait dans ses sollicitudes ce qui se tient en réalité de si près dans la conscience humaine. Voilà le fond du débat qui s’était ouvert, il y a quelques années, où vous prîtes une si grande part, que je vois se perpétuer jusqu’à cet instant même, dans deux de vos publications qui y sont étrangères, dont il m’est impossible dès lors de ne pas vous entretenir : de si grands intérêts (la foi et les études) méritent bien quelques moments de vous, de l’Académie, et de tout le monde.

Même à présent, on n’y a pas encore pris assez garde : l’ancienne société chrétienne, dans le monde entier, avait confiées destinées de la jeunesse à l’égale et libre concurrence de fondations religieuses de toute nature, les universités comprises, d’instituts ecclésiastiques et rivaux, profondément différents entre eux, soumis à Rome, mais indépendants du pouvoir épiscopal, combinaison qui donnait tout à la fois aux alarmes naturelles de la religion à la liberté nécessaire des familles, aux ombrages inévitables de l’État, à tous les intérêts enfin de la société, une sécurité sans limites. Tous les clercs enseignaient, hormis l’évêque. L’évêque et le prince, la juridiction spirituelle et l’autorité royale restaient également en dehors de la direction de l’enseignement. Les parlements seuls tenaient la main au bon ordre de ce système, et, comme ils étaient presque aussi indépendants de l’autorité souveraine que de l’autorité ecclésiastique, leur intervention, souvent rigide, ne commettait pas entre elles les deux puissances. Une sorte de loi de gravitation, par conséquent non écrite, maintenait ainsi l’ordre dans l’indépendance, et dans la diversité le concert.

Tous les éléments de ce système ont disparu ; on a fait table rase en un jour : à la place, on eut des difficultés inconnues aux siècles précédents. D’abord, l’empire enfanta une grande institution civile, seule héritière des corporations, des universités, des parlements même, car c’était elle qui se régissait. C’était donc l’État, le prince qui enseignait. La paix avec l’Église, dans ce régime, se maintenait par la paix naturelle et le silence obligé du pouvoir absolu.

La charte de 1830, pour la première fois dans le monde, posa le principe de la liberté d’enseignement, c’est-à-dire du partage de l’éducation, à un degré quelconque, entre les deux pouvoirs. Sous ce nom, l’Université et l’Église, le clergé séculier et l’État, le prince et l’évêque, devaient enseigner concurremment, à leurs risques et périls. C’est exactement le contraire de l’ordre ancien : transaction difficile, pleine d’occasions de choc, mais qui était nécessaire, légitime, seule possible dans l’état présent de nos lois, de nos mœurs, de nos créations, de nos ruines, et destinée à durer autant que l’égale sagesse des deux pouvoirs.

Les conditions de cet équilibre nouveau restaient à fixer. C’est alors que vous intervîntes avec un rare éclat. Entre plusieurs autres écrits, deux lettres qui parurent, au commencement du débat et dans son moment le plus agité, méritent de rester comme des modèles de discussion. Je passe les vivacités de la controverse, les accusations contestables, les ironies acérées qui pouvaient rappeler d’autres lettres célèbres, que vous n’avez pas lues. Pour le fond des choses, il y avait de grandes parties, et traitées d’une main supérieure. Avant tout, ce qui concernait le clergé de France, l’Église catholique, ses services, ses travaux, les préjugés régnants à son égard, les dédains des esprits forts, la place qui lui appartient dans l’ordre des sociétés. Poussé à bout, disiez-vous, vous terminiez par dresser, à côté l’une de l’autre, la société ecclésiastique et la société civile, pour les comparer ensemble, rang par rang, homme par homme en quelque sorte, et proposer le choix à tout venant, avec un mélange d’amertume et de raillerie, qui était pleinement dans votre droit. L’humilité ne vous est pas commandée, quand vous défendez la cause de Dieu ou celle de l’Église.

Ces écrits étaient frappants à un autre point de vue : l’esprit politique y tenait une grande place, et je dois dire que je le remarquai dès longtemps dans tout ce qui est sorti de votre plume, au grand sens de vos vues historiques, à votre juste coup d’œil sur l’état de la société française, quelquefois à vos fermes présages. Qui se serait écrié alors ?

« Les moins prévoyants peuvent-ils ne pas se sentir troublés en jetant leurs regards sur l’avenir, sur un avenir très-prochain, peut-être ! Comment ne pas voir ce qui se remue de sombre au cœur des classes populaires ( 6) ? » Et vous demandiez que, quand le sol tremblait ainsi, on travaillât à réunir, s’il se pouvait, toutes les forces conservatrices, comme on a fait, en effet, après la tempête, au lieu de repousser systématiquement les vœux de ceux qui, depuis dix-huit siècles, n’ont jamais trahi l’ordre social !

Vous ajoutiez ces belles et non moins prophétiques paroles : « L’Église n’est pas une chose mobile comme les passions humaines : les orages peuvent gronder autour d’elle ; mais l’arbre éternel demeure, et les gouvernements, comme les peuples, s’estiment heureux, tôt ou tard, de retrouver son abri ! »

Partout, dans vos écrits, se rencontrent des passages semblables ou plus frappants. Étranger aux ambitions du siècle, vous allez, dans vos altiers jugements d’organe du sanctuaire, au fond de toutes les situations et au bout de toutes les perspectives, avec une sûreté de vue inexorable, j’allais dire infaillible.

En même temps, vous jetiez de réelles, de vives clartés sur quelques-uns des objets directs du débat : la nécessité des petits séminaires, leurs conditions d’existence, les droits de leurs élèves, les ordonnances de juin, l’affirmation qui en était la suite. Je vous le dirai ici, pour la première fois, Monsieur : le succès du talent, qui n’était pas celui que vous cherchiez, ne fut pas le seul que vous eussiez obtenu. Sur ces points que j’indique, votre voix pénétra dans les conseils de l’État, et y devint pour les convictions une lumière ou une arme puissante. Les lois qui furent proposées pour fonder définitivement, à côté de l’Université circonscrite, mais respectée, une liberté d’enseignement vraie, pleine et entière, le furent dans ce sens ; et, quoique ces propositions, après dix-huit mois de débats solennels, au moment de leur conclusion, aient vu une révolution passer sur elles, elles ont survécu. Cette première satisfaction de la partie légitime de vos demandes, consacrée ainsi par un grand précédent, sous un grand gouvernement, a porté ses fruits. Ces points se sont trouvés à l’avance acquis pour la transaction à intervenir. Le régime nouveau a été fondé sur les bases qui avaient été solennellement posées ; et c’est tout simple ! Car j’ose dire que des pensées dignes du problème avaient veillé sur sa solution. On ne s’était pas préoccupé des exigences ou des chances contraires ; on n’avait pas attendu la lumière des événements pour reconnaître ce qui était juste, utile, nécessaire ; on s’était placé à un point de vue plus haut : c’était la longue et religieuse recherche des institutions et des garanties qui convenaient, d’une façon générale, à une société chrétienne, à notre société française, indépendamment de tout ce qui pouvait advenir. Et, cette solution d’un si grand conflit, on s’honorait de lui donner le caractère d’institution ferme et inviolable que comportait le droit public de la France.

Dans des pages que vous publiez en ce moment, je remarque qu’à propos de la loi intervenue sous les auspices de la révolution de Février, et en quelques parties réformée déjà, vous rendez un très-juste hommage aux esprits supérieurs qui, combattants de la veille, eurent la gloire de se porter pour les arbitres du lendemain, et s’honorèrent de restituer promptement à l’Église et à l’État, fut-ce passagèrement, leur nécessaire harmonie. Je suis heureux d’avoir occasion de payer un juste tribut aux services qu’ils rendirent, à cette époque de la tourmente, à la cause de la société menacée, et ils en rendirent de plus éclatants encore ! Mais, sur la question même, n’aurait-il pas été de votre point de vue comme de votre justice, de remarquer que cette révolution, qui avait été accomplie contre tous les pouvoirs, par le seul fait des libres organes qu’elle donnait à toutes les régions de la société, constitua, sans le vouloir ni le savoir, une représentation si puissante des sentiments religieux du pays, jusqu’alors contestés, que les transactions, auparavant difficiles, furent maintenant acceptées sans effort, et que la nécessité de la conciliation, jusque-là cachée, apparut avec éclat ? C’est la preuve de ce que disait un autre grand esprit, que la raison unit toujours par avoir raison. Seulement, la main qui régit le monde permet quelquefois que ce soit par des moyens inattendus et terribles. Il faut réfléchir profondément sur la vanité des grands soulèvements populaires, et peut-être ne pas trop les ennoblir du nom de coups d’État de la Providence ; car bien des gens pourront avoir la tentation de devenir ou de redevenir ses ministres.

C’est avec un sincère, avec un inexprimable bonheur, Monsieur, que je rencontre, au terme de ce trop long examen, celui de vos titres dont je ne vous ai pas parlé encore, le principal de tous : je veux dire ce livre de l’Éducation, qui n’est pas achevé, mais dont la première partie est classée déjà par deux éditions dans l’estime publique, et qui couronne si bien vos travaux. Car il est le résumé de tout ce que la vie vous a appris par l’expérience, l’étude, la méditation. Il résumera pour les temps à venir votre existence entière. C’est de lui qu’on peut dire ce mot si bien caractérisé par vous, qu’il est l’homme même.

Ce livre Monsieur, il ne faut pas vous attendre à ce que j’en parle froidement ; il m’a été une consolation, une joie, un repos. Il est venu éclairer dans mon cœur mes sentiments envers l’enfance ; dans ma raison, mes opinions sur l’homme ; dans mon âme, mes espérances inépuisables à l’égard de mon pays et de l’humanité. Il m’a appris ce qu’il y a de faux et de vaniteux dans la prétention de mépriser les hommes ; pourquoi il faut respecter dans l’enfant l’image de Dieu ; l’héritier de l’Évangile, de la patrie, du genre humain ; le dépositaire et le continuateur de nos traditions, de nos pensées à tous ; l’ouvrier de cette œuvre universelle et immortelle qui compose l’histoire du monde. Ce que je sentais, il me l’a expliqué. Ce que je cherchais, il me l’a fait voir. Ce qui était pour moi le travail isolé de ma réflexion et de ma conscience, il en a fait la loi de Dieu, la règle de ses ministres, le principe et le fondement de l’éducation chrétienne.

En même temps, il m’a reposé des douloureuses impressions d’un livre célèbre, insensé, coupable, dont il est d’un bout à l’autre le démenti aussi éclairé, aussi profond que magnifique, tout en ne le nommant, je crois, jamais. Oui, on respire, Monsieur, en revenant à votre Traité de l’Éducation ! Des maximes humaines l’animent ; un sentiment vrai le remplit. Il aime l’enfance, il la respecte. Il respecte l’homme en elle. Nous avons beaucoup parlé de la dignité humaine, depuis trois quarts de siècle. Elle est là expliquée, démontrée, professée à toutes les pages, liée en même temps à notre origine et à nos devoirs. Toutes les obligations de l’instituteur se rattachent à cette conviction que les devoirs sont partout, parce que partout est la pensée qui donne à ce mot un sens, à cette chose une réalité, à ces prescriptions un code, à ce code un législateur, aux infractions un juge. Sur cette base solide, vous élevez tout l’édifice de l’éducation. Comme vous faites l’homme selon la véritable nature humaine, et par conséquent selon l’éternelle loi divine, vous le formez pour continuer la famille avec honneur, la société avec dévouement, la patrie avec amour, c’est-à-dire pour remplir toutes les obligations qui font la grandeur de la vie, et connaître en échange, dès le berceau toutes les tendresses qui en font le charme et le prix.

En même temps, vous ne craignez pas de former l’intelligence, pour être la digne et utile compagne de cette âme saine et forte. C’est avec l’éloquence du cœur que vous découvrez aux plus jeunes regards les grandes vérités de ce monde ; et ces leçons, au lieu d’être pendant vingt ans ajournées, vont se graver dans les âmes à une impénétrable et mystérieuse profondeur. L’âme humaine a été si bien faite pour les recevoir ; elle les attendait si bien, comme la terre attend la rosée, qu’elle s’en empreint, elle les possède. Elle croit ! L’enfant est par là plus avancé d’un degré que le philosophe lui-même ; car le philosophe veut savoir. Il consacre son génie à le tenter ; l’effort fait sa gloire, et non le succès.

C’est ainsi que vous arrivez à l’esprit de la jeunesse. Vous faites luire à ses yeux cet autre flambeau qui vous est cher, celui des lettres, qui dissipe toutes les ombres, recule toutes les limites, découvre tous les horizons ; et, non-seulement vous voulez que l’éducation soit sociale, mais vous ne voulez pas qu’elle soit cosmopolite. Comme l’enfant a une religion, à la différence d’Émile, il aura une patrie. C’est avoir deux religions, deux buts, deux étoiles au firmament. Je ne sais pas de pages plus saisissantes, dans un livre qui en est rempli, que celles où vous voulez que la jeunesse française soit élevée pour la France. Ainsi que vous le dites très-bien : « C’est l’éducation qui fait les mœurs domestiques, inspire les vertus sociales, prépare des miracles inespérés de progrès intellectuel, moral, religieux. C’est l’éducation qui fait la grandeur des peuples et maintient leur splendeur ; qui prévient leur décadence, et, au besoin les relève de leur chute ( 7). »

Ici, Monsieur, permettez une prière à ma loyale admiration, prière déjà exaucée ; car elle est l’écho affaibli de vos sentiments et de vos pensées, la pâle redite de vos belles paroles de paix et de concert qui ont ému l’assemblée entière. Avant tout, terminez ce grand et beau livre qui honorera le temps où nous sommes, et ensuite faites qu’il puisse être lu de tous les maîtres de la jeunesse française ; qu’il le soit sans regrets personnels, sans obligation de contester des souvenirs, des citations, des faits, des retours enfin sur le passé, par tous ceux qui se sont occupés de ces grands intérêts ; ne laissez pas se survivre, dans une œuvre qui doit durer toujours, les réminiscences animées de luttes qui ne sont plus ! La religion vous l’avez dit souvent, n’a pas à se plaindre des générations présentes. Ne déférez pas ceux qui les ont formées, au tribunal du plus lointain avenir.

Les deux systèmes, les deux ordres d’établissements en présence, se sont envoyés trop longtemps beaucoup d’accusations contraires. Il y a en ce moment un grand théâtre sur lequel vous avez en termes saisissants appelé nos pensées, théâtre d’épreuves terribles, où les générations sont en vue à la patrie ; et ne pensez-vous pas, en les contemplant à l’œuvre, que les maîtres différents avaient eu tort de s’accuser entre eux ? Dans les grandes scènes qui nous sont offertes, il y a des sujets de consolation et d’orgueil pour tous les instituteurs de la France. On disait votre éducation trop ascétique, trop tendre peut-être pour la rude discipline de la vie publique. Et qu’on regarde nos armées ! combien ne verra-t-on pas de vos disciples d’hier, qui croissaient, il y a quelques jours encore, sous les plis de votre manteau, aujourd’hui soldats, matelots même, officiers quelquefois, figurant, chaque jour, malgré leur jeunesse, dans les glorieuses récompenses ou dans les héroïques sacrifices, nobles enfants qui n’ont pas vécu et qui ont su mourir d’une façon glorieuse ! De l’autre côté, que de sentiments, que d’actes exemplaires, qui nécessairement vous rassurent et vous consolent ! Qui ne sait comment meurent à leur tour nos généraux héroïques et victorieux plus avant dans la mort qu’on ne le vit jamais ; comment souffrent et prient nos soldats, avec quelle pieuse joie ils voient l’aumônier intrépide parmi eux, pour les bénir, quand ils montent à l’assaut d’escarpements terribles ; comment toute cette vaillante jeunesse de nos régiments fait une armure de son respect aux saintes sœurs, à ces héroïnes de la charité, qui vont étonner l’Orient du spectacle de la femme chrétienne, partout mêlée à la vie des camps, sans avoir besoin d’une autre garde que sa foi et sa vertu !

Ainsi, les deux courants se rencontrent sur ce vaste champ de bataille de l’Orient ; et ils se rencontrent pour se confondre dans une égalité de soumission religieuse et de patriotique dévouement, pour montrer plus vivants que jamais parmi nous ces instincts de foi et de gloire qui perpétuent l’honneur de notre drapeau et les grands espoirs de la France. Voilà ce qui mérite de fixer nos regards, de vivre dans nos souvenirs, de se perpétuer dans des écrits tels que les vôtres ! Ce sont les ardeurs légitimes de votre charité, ce sont ses alarmes tout aussi légitimes qui ont fait vos appréciations des actes, des hommes, des situations. Que ces grands spectacles vous désarment et nous consolent tous !

On peut vous parler de nos armées, Monsieur. Vous êtes familiarisé avec ce grand instrument de gloire et de puissance pour les nations. Car, au moment où vous jetiez les bases de ce monument de la plus haute pédagogie qui fut jamais, au milieu de tous les périls de nos convulsions, à l’époque même, vous rendiez à l’Église et à la France un autre grand service, en traçant fièrement la route de Rome à nos soldats. Votre Traité de la souveraineté temporelle du Pape, à l’occasion des révolutions de l’Italie, est assurément une des œuvres que Français, catholiques écrivains, doivent le plus envier à votre soudaine et hardie inspiration.

Rome s’était de ses mains découronnée de la papauté. Cet autre empire du monde, qui peut seul lui rendre une majesté présente, égale et supérieure à cette de ses souvenirs avait été renversé par la même tempête qui ébranlait la société française jusqu’aux fondements. Comment ne pas comprendre qu’aucune souveraineté temporelle ne peut se passer du glaive pour appui ; que la France est l’épée naturelle du saint-siége qu’elle ne peut permettre qu’il y en ait un autre ; qu’enfin elle se raffermissait elle-même, en portant aux autres nations l’ordre qu’elle n’avait pas reconquis pour elle-même ? Ces vues s’étaient fait jour dans les conseils de l’État. Votre livre, digne de si grands intérêts, les fit arriver à tous les pouvoirs, au premier de tous alors, l’opinion, encore pleine de troubles et d’orages. Combattu et entouré de périls, le gouvernement de la république fut au niveau du rôle permanent de la France dans le monde. Rome revit nos drapeaux et retrouva ses destinées. Votre ouvrage restera. Les plus importants problèmes de droit public, catholique et universel, y sont abordés et résolus avec une hauteur de vues et de langage qui répondent à la grandeur du sujet. Vos paroles et nos armes auront appris aux habitants de la ville des pontifes et des Césars, que le siège apostolique ne leur appartient pas : ils ont seulement l’honneur d’en être comptables à la France et à l’univers.

Tant de travaux et de services marquaient malgré vous votre place dans l’épiscopat. Une noble amitié usait contre vous de ses droits. Quel autre était désigné par plus de travaux et de services à ce caractère auguste, qui est un sacerdoce dans le sacerdoce ? C’était un temps de suffrage universel, et depuis longtemps la voix publique vous appelait à ce nouvel apostolat. Vous nous parliez tout à l’heure de salut Ambroise, le Fénelon de l’antiquité, qui, par là doit vous être particulièrement cher. Vous auriez pu entendre les enfants crier, comme autrefois dans Milan : « Ambrosi, tu es episcopus ! Ambroise, les enfants et les mères vous veulent pour évêque ! ». J’insiste sur ce grand jour de votre vie, Monsieur, et ce n’est pas à cause de vos résistances, de vos afflictions, de vos déchirements, du sentiment des fidèles, toutes choses glorieuses qui ne sont pas de notre domaine. C’est pour avoir le droit de vous parler de votre lettre inaugurale, digne prélude de tant d’autres grandes œuvres qui, écrites pour le sanctuaire, n’ont pu y rester renfermées. Il me faudrait faire violence à ma pensée pour ne pas dire qu’il est peu de plus belles pages. On ne peut les lire même aujourd’hui sans une émotion profonde. Il y a là des tableaux de ce qu’était la France, alors dans toutes les épouvantes de son anarchie et de son incertitude : des cris de tendresse pour cette patrie battue de tous les flots, des espérances en quelque sorte désespérées, au milieu du naufrage de toutes les idées sociales, dont notre langue, dont l’Église, dont l’Académie pourront à jamais s’honorer. Votre éloquence, qui, dans ce grand sujet et cette grande situation, coule à pleins bords, a des accents qui retentissent au plus profond de l’âme, comme un écho lointain de ces tempêtes.

« Sans doute, vous écriez-vous, il y a des temps où les nations se troublent et chancellent, où les empires semblent pencher sur leur déclin. Mais espérons ! Il y a Dieu toujours ; on n’entendait plus parler de sa puissance : il se déclare. Il amoncelle les ruines ; il change les temps et les âges. Quand il le faut, il rajeunit les siècles passés, les nations vieillies. Il fait les temps nouveaux, les grands siècles, les grands hommes. Dans la puissante industrie de sa droite, il saisit les chefs des nations, les princes de l’intelligence humaine, et les lance tous ensemble à la recherche et à l’œuvre du salut des peuples. »

On savait bien que vous avez une nature intrépide. Cela se voit, cela se sent. Ici, vous le prouviez glorieusement au rare courage de protestations admirables, d’indignations saintes, de défis héroïques contre les passions de la nouvelle barbarie, et vous aviez vu de bien près, une première fois, qu’elles savent traiter les palais épiscopaux comme les palais de rois, les basiliques comme les chartes et les royautés !

« Nous avons vu tout à coup, après la tempête sociale, disiez-vous, éclore et surgir, parmi nous, une génération singulière d’hommes nouveaux qui couvre aujourd’hui le sol. Il n’y a rien de sacré pour eux. Tout ce qui est souvenir, grandeur du passé, monuments, lois, coutume des ancêtres, noble antiquité, tout cela leur est odieux et blesse leur vue. Hommes du moment, nés d’un orage, tout ce qui est de la veille leur déplaît. Du prophète les a dépeints : génération ingrate, qui maudit son père et ne bénit pas sa mère ! Ils méprisent toute puissance ; ils blasphèment toute majesté. Le prince des apôtres nous a dit une parole d’une vérité profonde : La liberté n’est pour eux qu’un voile de leur malice. Et ce qu’il y a de plus déplorable, c’est qu’on leur résiste mal. Le vent des révolutions se lève, c’est comme au désert. Tout est faible, tout est seul, tout est sable, tout est poussière. Tout est emporté à l’aventure. En un jour, en une heure, les vallées sont à la place des montagnes, les montagnes à la place des vallées. »

Là jaillissait de votre cœur ce cri : « Il y a des nations, les saintes Écritures nous le révèlent, qui ont comme une noblesse providentielle (natio grandis), qui ont naturellement quelque chose de fort, de généreux, d’illustre. L’Église romaine a toujours aimé à redire que sa fille aînée, la nation française, est une de ces grandes nations.

« Espérons en celui qui est le Dieu de l’ordre, le père de la société humaine, et qui a fait guérissables les nations de la terre ! »

Et ailleurs :

« Oui, Dieu n’a permis nos malheurs et nos périls que pour nous rapprocher dans un esprit nouveau, que pour nous obliger à nous serrer autour du décalogue éternel sans lequel il n’y a plus ni autorité, ni respect, ni famille, ni prospérité, ni droit, ni devoir, ni société sur la terre ! »

Vous ne vous étonnerez pas, Monsieur, si je fais remarquer ici encore le grand sens politique qui se mêle partout à cette autre vertu de l’esprit, que vous appelez vous-même le grand sens chrétien, et dont vous êtes une si vive image. Je trouve l’un et l’autre dans les vœux de concorde, dans le cri contre nos divisions qui retentissait là et partout. On voit, à vos accents déchirés que je ne redis pas, que vous avez éprouvé profondément une des plus douloureuses amertumes que puisse sentir le cœur de l’homme dans les grandes crises publiques, celle d’une raison qui se croit sûre de ses conseils et qui se sent impuissante.

Ah ! Monsieur, je vous demandais tout à l’heure de retrancher dans vos œuvres ; je vous demande maintenant de les compléter et de les réunir, au nom de la religion, des lettres et de la patrie ! Oui ! rassemblez ces écrits si chrétiens, si français, si utiles, inspirés de si haut, et, à votre insu, si littéraires. Ils seraient pour l’esprit français un si noble aliment ! Ils le transporteraient si loin des intérêts où se perdent tous les efforts de la pensée, et des commotions où se perdent toutes les joies de l’âme ! Ils semblent tous avoir été faits particulièrement pour ce grand auditoire de la France ! Toutes les nobles passions de notre vieux sol sont en vous ; on sent un cœur qui bat sous chacune de vos paroles, une âme qui monte, qui plane, qui cherche des cieux de plus, dans chacune de vos pensées ; une éloquence vraie et facile toujours, en étant toujours éclatante. Vous avez enfin, pour parler à ce pays de tout ce qui l’émeut, la foi, la patrie, la vertu, la justice, la gloire, un langage d’une trempe, d’une puissance, d’une splendeur à part. Mais rassurez-vous, ce langage, je ne vous en reporte pas la gloire. Je sais qu’il n’est pas le vôtre. Il est emprunté à la région où vit toujours votre pensée, aux livres qui nous en sont venus, à leur grandeur d’idées et d’images, à leur mélange de force intime et d’inépuisable majesté. Les Écritures perpétuent à travers le monde les roulements du tonnerre du Sinaï, Elles gardent de leur origine de la langue première où elles furent tracées, de sa solennité, de sa splendeur, une empreinte dont les effets se reproduisent partout dans vos écrits. Et c’est précisément parce que l’Église a le privilège de puiser sans cesse à la plus grande source du beau et du sublime qui ait été ouverte aux études de l’homme, qu’indépendamment des raisons publiques que j’ai exposées d’abord, nous devons compter toujours, dans ce sanctuaire des lettres, je dis le mot après vous, quelques-uns de ceux des interprètes de la langue sacrée qui savent le mieux écrire et parler la nôtre.

Notes :

1. Le Christianisme à la portée des gens du monde, extrait de Fénelon, Discours préliminaire.

2. Le Christianisme à la portée des gens du monde.

3. Du Christianisme, tome I, Disc. prél.

4. Mandement de 1841.

5. Lettre au duc de Broglie, 1844.

6. Lettre à M. le duc de Broglie, 1844.

7. Traité de l’Éducation, t. I.