Funérailles de M. le baron Fourier

Le 18 mai 1830

Charles-Marie-Dorimond de FÉLETZ

FUNÉRAILLES DE M. LE BARON FOURIER

DISCOURS DE M. DE FÉLETZ,
CHANCELIER,

PRONONCÉ AUX FUNÉRAILLES

DE M. LE BARON FOURIER.

LE 18 MAI 1830.

 

MESSIEURS,

Si la faux de la mort moissonne rapidement ses victimes, si la tombe s’ouvre fréquemment pour les hommes, à quelque rang et à quelque classe de la société qu’ils appartiennent, il semble, depuis quelque temps surtout, que c’est aux membres de l’Académie Française à faire cette triste observation, et à en gémir. Nous avons en effet perdu, en peu de mois, plusieurs de nos confrères dignes de toute notre estime, dignes de tous nos regrets ; mais aucun n’eut plus de titres à ces regrets et à cette estime que M. le baron FOURIER, dont nous déplorons aujourd’hui la perte.

Savant illustre et distingué parmi les savants, Secrétaire perpétuel de la plus savante société de l’Europe, c’est aux membres de cette société, c’est à ses pairs qu’il convient de lui donner des éloges qui seraient trop imparfaits et trop incomplets dans ma bouche, des éloges dignes de cette partie considérable de son illustration et de sa gloire. Esprit facile, orné et doué d’une rare capacité, écrivain pur, poli, plein de goût, c’est à ces titres qu’il nous appartenait, et que nous nous plaisions à reconnaître la justesse et la finesse de ses pensées et de son style, le mérite de ses compositions littéraires, la clarté, l’élégance même de ses ouvrages scientifiques. Homme loyal et aimable, d’un commerce facile et plein d’agrément, c’est non seulement aux membres des deux Académies qui le perdent à lui rendre une pleine et entière justice sur toutes ces heureuses qualités de son cœur et de son esprit, niais à tous ceux qui l’ont connu dans le monde, dans l’administration et dans ce voyage à jamais célèbre, glorieux à l’armée française, utile à la science, et qui produisit ce grand ouvrage sur l’Égypte, le plus magnifique que l’on doive aux sciences et aux voyages, et dont M. le baron FOURIER fut le principal collaborateur.

Il y a peu d’années que M. FOURIER était de l’Académie Française : qu’il me soit permis de remarquer que je fus nominé le même jour que lui, reçu le même jour que lui ; cette circonstance semblait augmenter nos relations de confraternité ; elle augmenterait et distinguerait la douleur que je ressens de l’avoir perdu si, connaissant l’étendue de celle qu’éprouvent tous mes confrères et les siens, il ne me convenait mieux d’associer et de confondre mes regrets avec les leurs.