Réponse au discours de réception du cardinal de Rohan-Soubise

Le 30 décembre 1741

Jean-François BOYER

RÉPONSE

De M. L’ANCIEN EVESQUE DE MIREPOIX, Directeur de l’Académie Françoife, au Difcours de M. l’Abbé de Rohan-Ventadour.

 

MONSIEUR,

 

LES fentimens que vous trouvez ce jour dans l’Académie, vous étoient déja connus, & la joie répandue fur tous les vifages n’a rien de nouveau pour vous. Quel a été notre empreffement à vous voir parmi nous, & à nous affurer au plutôt une acquifition qui ne pouvoit pas nous manquer ! Nous penfions à nous, MONSIEUR, nous ne le diffimulerons pas. Une trifte conjoncture rappeloit plus que jamais chaque particulier à l’honneur de tout le corps. Nous venions de perdre un Académicien, qui à la plus haute naiffance joignoit tous les agrémens de l’efprit, toutes les graces de la parole. Pour le remplacer, il ne falloit pas moins qu’un nom tel que le vôtre ; un nom qui, dénué même de tout fon éclat, de toutes fes illuftrations, pourroit encore fe préfenter avec confiance dans les Académies les plus attachées par profeffion à la culture des Lettres, & les plus difficiles à décerner les honneurs de leur profeffion.

 

La décifion ne tarda pas ; vous vous en reffouvenez, MONSIEUR, au premier bruit, à la première nouvelle de la mort de M. le Duc de la Trémoille, on n’entendit que votre nom. On ne délibéra pas long-temps, ou plutôt on ne délibéra point. Vous fûtes, pour ainfi dire, proclamé, avant même que d’être élu.

 

Ce défir, MONSIEUR, cet empreffement que nous avons eu de vous pofféder, le fage & éloquent difcours que vous venez de prononcer, l’a bien juftifié. Vous avez fait voir que les talens qui fe font le plus déclarés en vous jufqu’à préfent, ne font pas les feuls qui vous ayent été donnés ; que l’éloquence latine, quelque honneur qu’elle vous ait fait, n’eft pas la feule éloquence à laquelle vous vous foyez appliqué ; que dans la jeuneffe où vous êtes, l’âge en effet des Langues, vous n’avez pas négligé votre Langue naturelle ; vous vous êtes formé de bonne heure à la parler, à la parler avec cette noble fimplicité, qui diftinguera toujours les ames d’un certain rang, ou d’un certain caractère. Vous avez fait voir enfin, que déjà cet art de parler aux hommes & de les perfuader, s’eft montré à vous avec tous les avantages ; & ce qui eft bien flatteur pour nous, vous n’avez pas craint de publier que c’eft dans l’Académie que vous voulez en prendre des leçons.

 

Quel chemin vous vous ouvrez, MONSIEUR ! Qu’il eft glorieux, qu’il eft digne de ce que le Ciel vous a fait naître ! Qu’il me foit même permis à cette occafion, dans la place que j’ai l’honneur d’occuper, en préfence d’une fi illuftre affemblée, de réveiller les efprits fur le talent de la parole, aujourd’hui trop négligé ; d’encourager en vous, MONSIEUR, de ranimer dans toute la jeuneffe, l’émulation, l’ardeur que mérite un talent fi capable fur-tout de rendre utiles à l’Etat, à là Religion même, les perfonnes élevées en naiffance ou en dignité.

 

Et en effet, quel pouvoir, quelle efficace dans la parole, à qui fait la manier & en tirer tout l’avantage qu’elle préfente ! Quels admirables effets n’opere-t-elle pas, quand on eft affez heureux pour aimer le bien, & le vouloir avec fincérité ! Savoir parler, c’eft avoir à la main de quoi, dans l’occafion, fecourir l’innocence affligée, rappeler au fentiment de la juftice, & en appuyer tous les droits ; faire entendre la vérité, la faire fupporter, quelquefois la faire aimer. Savoir parler, c’eft pouvoir pénétrer dans le fond le plus intime d’une ame, y porter le trait de la lumière & de la perfuafion, faire ufage des paffions mêmes, & gagner ou combattre les unes par les autres. Savoir parler, c’eft avoir trouvé le chemin des cœurs, être en état d’en remuer les refforts les plus fecrets, d’en régler ou d’en changer les mouvemens les plus naturels ; c’eft en un mot être le maître des hommes.

 

Oui, MESSIEURS, voilà le fervice que vous rendez, & le fruit de vos travaux. L’objet n’en eft pas une vaine & ftérile élégance de langage. Peut-on croire que ce grand homme, votre Fondateur, cet efprit fi élevé, qui dans tout le refte penfoit fi hautement, fi fortement, ait raffemblé un nombre d’hommes de mérite, uniquement pour difputer fur des mots, ou arranger artiftement des phrafes ? Non, MESSIEURS, ce ne fut jamais fon intention ; & les ouvrages qui fortent de vos mains font bien voir que ce n’eft pas à quoi vous vous bornez. Si vous vous appliquez aux paroles, aux expreffions, c’eft pour en déterminer le fens ; pour en découvrir la force, l’énergie ; pour apprendre l’idée qu’elles portent à l’efprit, l’impreffion qu’elles font fur les cœurs. Dans ce travail, quel cours ne préparez-vous pas à l’art de la parole ? Quelle facilité ne ménagez-vous pas à la raifon elle-même pour s’infinuer, pour fe montrer avec utilité ? Difons-le, ne fût-ce que pour l’empêcher de rebuter entièrement, quelle obligation tous les hommes ne vous ont-ils pas ?

 

Allons au principe : en effet, c’eft encore moins la raifon qui gagne les hommes, que la manière de la leur préfenter. Qu’elle paroiffe cette raifon, accompagnée de hauteur, de féchereffe, manquant des bienféances qu’elle prefcrit elle-même en tout : on la méconnoît, on la rejette ; elle révolte, ou elle dégoûte. Qu’on la préfente avec la dignité & la douceur qui lui conviennent, avec ces égards, ces intimations qui ménagent fans flatter, qui frappent fans offenfer : du moins on fe prête, on écoute, & l’on eft prefque fâché foi-même de ne fe point rendre.

 

Voilà les hommes, MESSIEURS, tous raifonnables, tous du moins difpofés à la raifon : mais il faut que cette raifon foit bien préfentée ; il faut que la parole qui la préfente, pleine, fi j’ore le dire, de raifon elle-même, s’oppofe à nos paffions & à nos humeurs, fans nous en faire venir d’autres ; qu’elle s’accommode à nos penchans & à nos foibleffes même en les combattant. Hé quoi ! Sommes-nous donc tous faits pour être des Orateurs ? Non, mais nous fommes tous faits pour vivre avec des hommes : or jamais les hommes ne fe laifferont prendre à la raifon, qu’autant que la raifon, pour être entendue, commencera par fe faire aimer : en quoi confifte, après tout, le principal mérite de l’Orateur.

 

Ce talent, MESSIEURS, cet admirable talent, de quel ufage ne feroit-il pas ? D’ufage en tout & pour tout ; d’ufage dans tous les états, dans toutes les conditions. Oui, dans tous les états, dans toutes les conditions, je le dis d’après un grand Maître en ce genre. Nul efprit qui ne foit fufceptible des effets d’une vraie éloquence ; les uns en connoiffent & favent pourquoi ils font charmés ; les autres en fentent le plaifir, &, fans même s’en appercevoir, font entraînés.

 

Qui diroit que dans le métier de guerre le talent de la parole eft utile ; ajoutons, quelquefois néceffaire ? Céfar pourtant lui-même, le grand Céfar l’éprouva ; & peut-être ne fut-il un Général fi accompli, que parce qu’il fut en même temps un Orateur parfait. Un Général de réputation dans les Gaules accourt à la défenfe d’une Ville que Céfar affiégeoit, & il fait lever le fiége. Céfar court auffi-tôt en faire un autre. Il s’agiffoit même d’une Ville plus importante, plus fortifiée, foutenue d’une armée prefque innombrable. L’armée Romaine abattue par les fatigues du premier fiége, & encore plus par le fouvenir de la difgrace qu’elle venoit d’effuyer, eft découragée. Les plaintes, les murmures fe répandent de rang en rang, & ofent éclater. Céfar parle ; il demande à fes foldats ce qu’il a donc fait, ce qu’ils ont fait eux-mêmes , pour oublier leur première valeur & leur ancienne amitié pour lui. Ce font des reproches, mais de ces reproches qui, dans la bouche d’un Maître, valent des louanges : de ces louanges mêmes que le vrai fait avouer & recevoir ; où l’on fent le cœur qui les donne ; où l’on ne peut s’empêcher foi-même de fentir qu’on les mérite, & prefque de s’eftimer. Ces mêmes foldats qui venoient d’être vaincus, ranimés par le difcours de Céfar, retournent dans le moment au combat, & reviennent avec la victoire ; la victoire la plus éclatante, la plus complette qu’ait remporté un Général, qui n’en remporta jamais d’imparfaites ni de communes.

 

Dans une Affemblée, dans un Confeil, dans un de ces Tribunaux confacrés à la Juftice, quel bien le don de la parole ne peut-il pas produire ! Combien de fortunes fauvées ! combien de familles arrachées au malheur & au défefpoir, par un feul avis donné avec fageffe, développé avec clarté, prononcé avec force ! Mais laiffons le particulier, & ne parlons que du bien public. Un homme qui fait parler, & qui eft né citoyen, plein d’un véritable amour pour fa patrie, quel zèle n’allume-t-il pas dans les cœurs ! quel courage n’eft-il pas capable d’infpirer.

 

A qui Rome dut-elle fon falut dans cette conjuration prefque générale, où étoit même entré ce qu’elle avoit de plus grand ? A un de fes citoyens, dont l’éloquence (l’admiration de fon fiècle, & qui l’eft encore du nôtre,) reçut, ce femble, de fon zèle & de fon amour pour fes concitoyens, une force & une véhémence qu’on ne lui avoit point vue jufqu’alors. L’Orateur monte fur la tribune ; il éclate, il crie aux noirs attentats qui fe trament : allarmé lui-même, il allarme fur le péril évident & prochain où fe trouve la République. Les cœurs font faifis ; le peuple a horreur de ce qu’il entend. On prend enfin des mefures qui préviennent ou arrêtent la conjuration, & la République eft fauvée.

 

Chez les Grecs, long-temps auparavant, le pouvoir de la parole avoit éclaté. Un particulier ofe déclarer la guerre à un Roi ennemi de fa patrie ; il tire fa patrie elle-même de la plus affreufe létargie fur ce qui la regarde. Il fait prendre les armes à un peuple plongé dans l’indolence & dans la volupté, qui touchant même au moment de fa ruine, n’aimoit encore à s’occuper que de nouvelles ou de fpectacles. Il repréfente, il preffe, il fait tant, que du moins il fufpend les victoires d’un Conquérant, qui avoit déja foumis prefque toute la Grèce. La paix faite, Philippe avoue hautement que l’éloquence de Démofthène lui a fait paffer plus de mauvaifes nuits, que toutes les armées des Athéniens.

 

Dans notre hiftoire, que voyons-nous MESSIEURS ? Un nuage fe répandit fur tous les efprits, il y a un fiècle. Prefque toute la France eft en armes : la Ville même, qui a toujours fait gloire du plus tendre attachement à fon Prince, femble le méconnaître ; du moins elle fe méconnoît elle-même. Un feul homme, un Magiftrat vénérable & puiffant en parole s’anime de zèle. Dans des occafions importantes, tentant fon pouvoir & le ton qu’autorife fa dignité, ou même fon âge, il impofe aux plus audacieux. Sans fafte d’ailleurs, fans éclat, (la raifon n’a pas toujours befoin de difcours d’appareil,) il s’infinue dans les entretiens, il calme les efprits, il les adoucit ; enfin il ramène la multitude à fon devoir, & par conféquent à fon bonheur. LOUIS XIV le regarde & l’aime comme fon père : il ne l’appela jamais autrement.

 

Mais fuppofons un fujet chargé de repréfenter fon Prince, & de défendre les intérêts ou ceux de fes Alliés, devant des Puiffances étrangères. Eft-il aifé d’abord, fi l’on ne s’eft pas exercé de jeuneffe à parler, de le faire avec toute la dignité qui convient à celui qu’on repréfente, d’en prendre les fentimens, les manières, le langage même ? Eft-il aifé enfin de faire parler un Roi en Roi ? Dans des négociations qui intéreffent tout un État, combien de fortes de langages ne faut-il pas employer ? Combien de paffions ne faut-il pas remuer ? Sous combien de formes la juftice & la raifon ne doivent-elles pas fe préfenter ? Le Prince dans fon Confeil forme les plans & les projets ; la fageffe, le défintéreffement éclateront dans ces plans, dans ces projets. Le Miniftre du Prince aura-t-il moins de peine à les exécuter & à les faire réuffir ? En vain les propofitions dont il fera chargé, feront juftes, raifonnables ; il aura toujours des jaloufies à furmonter, des préventions à combattre, des défiances à diffiper. L’efprit fera convaincu, le cœur ne fera point gagné. On ne parlera quelquefois que pour la gloire, pour le repos, pour l’intérêt de ceux mêmes à qui l’on parle : quels nouveaux embarras pour le perfuader & le faire fentir ! Si on le fent enfin, fi on en eft enfin perfuadé, fi on agit en conféquence, à qui eft dû ce fuccès, qu’à l’autorité, qu’à la force du difcours & de la parole, qu’à cette forte d’éloquence, en un mot, dont j’ai l’honneur de vous parler ? Avec cette éloquence, quel fervice, quel grand fervice ne peut-on pas rendre à fa Nation, fouvent à plufieurs Nations à la fois ?

 

Mais ne feroit-ce point là de ces fervices trop éclatans, & moins utiles que dangereux ? Non, MESSIEURS, ne craignons que notre peu de courage à vous mettre en état de fervir la Patrie. Qu’un homme, avec le talent dont nous parlons, & des fentimens de vrai citoyen, foutenu des lumières & des connnoiffances néceffaires, qui d’ailleurs n’épargnera ni fes foins, ni fes peines ; qu’un homme de ce caractère forme le projet, qu’il fe nourriffe de l’efpérance ; parlons ici le langage du monde, qu’il ait l’ambition de fe diftinguer, de s’avancer : qui condamnera cette ambition ? Qui n’en fera pas même un mérite ? Qui n’ira pas jufqu’à fouhaiter qu’elle fût dans tous les hommes ? C’eft qu’en effet il n’y aura jamais que cette noble ambition qui donne aux Princes de grands fujets, & aux États d’utiles citoyens. Loin ces ames ennemies de tout travail, & baffement jaloufes, qui voudroient avoir tout fans rien faire, & qui fe confolent du mépris où on les laiffe, en criant à l’inutilité ou au danger même des talens. O vous qui faites la plus douce efpérance de la Patrie, jeune nobleffe, voulez-vous une voie de parvenir & de vous élever ; mais une voie fûre, & en même temps jufte, digne même de la plus grand eftime ; ayez l’ambition de vous rendre néceffaire à la République ; intéreffez-la par elle-même à votre gloire ; forcez-la par votre mérite & par votre application à faire elle-même votre fortune. Tôt ou tard la juftice eft rendue, le mérite fe fait enfin jour, & l’envie fe tourne en admiration. Venons à quelque chofe de plus important encore.

 

Dans l’état où vous êtes, MONSIEUR, dans une de ces places où tout vous appelle, quel avantage que celui de la parole ! De quoi s’agit-il dans la Religion ? De changer tout l’homme, ou du moins de le réformer ; de l’élever au-deffus de lui-même ; de mettre en lui des fentimens que la nature ne donne point, qui combattent même la nature. L’exemple fera toujours fans doute d’un grand fecours pour la perfuafion ; & par-là, MONSIEUR, l’éducation que vous avez reçue, vos inclinations particulières, cette ame heureufe & naturellement bonne, qui vous eft échue en naiffant, font de fûrs garants que vous perfuaderez mieux qu’un autre. Mais enfin l’exemple foutenu & accompagné de la parole, fera toujours des impreffions plus fortes & plus efficaces. C’eft la parole qui remue, qui entraîne ; c’eft la parole qui achève ou qui avance la perfuafion.

 

Parlons de ce qui n’eft pas dans plufieurs endroits du Royaume la moindre follicitude du miniftère facré ; de cette différence de religion, trifte héritage de nos pères, dont les efprits s’abandonnant à leurs préventions, fecouèrent le joug de toute autorité fainte. Jamais la fcience de la perfuafion fut-elle plus néceffaire ? Comment voir avec tranquillité des perfonnes de tout caractère, refpeclables quelquefois d’ailleurs par leur naiffance, par leur probité, par leur mérite, par un fonds même de religion ; comment, dis-je, les voir perdre le fruit des plus éminentes vertus, &, comme parle un Père de l’Eglife, faire les plus grands pas hors de la vraie voie ? Et quelle efpérance de les y appeller jamais, fi feulement fort en doctrine & en raifonnement, on ignore le langage du cœur & du fentiment ; fi on ne fait ce que c’eft que de compatir à un changement qui coûte d’autant plus que l’on a plus de droiture ; fi l’on n’eft pas capable, en un mot, d’aider ou d’adoucir une victoire, où, pour ainfi dire, la religion combat contre la religion même ? On le vit au commencement du dernier fiècle, lorfque l’héréfie fe répandoit de toute part dans la France. Deux grands Évêques fe diftinguoient alors par leur zèle, avec quelque différence néanmoins. L’un forçoit l’efprit à reconnoître la vérité ; l’autre, allant droit au cœur, la faifoit aimer : avec l’un, on voyoit bien qu’il falloit fe rendre : avec l’autre, pour peu qu’on l’eût entretenu, on fe rendoit. C’eft-à-dire, que l’on avoit le talent de la fcience, l’autre le talent de la parole : l’un convainquoit, l’autre perfuadoit. Or, avouons-le, convaincre fans perfuader, ce n’eft le plus fouvent que révolter davantage un efprit orgueilleux, & ajouter à la prévention de l’erreur le dépit d’être vaincu, pire quelquefois que l’erreur même.

 

Voilà, MONSIEUR, les avantages d’un talent par lequel la nature a fait en vous de fi grandes avances. Vous n’auriez même befoin pour vous y perfectionner, ni de fecours, ni d’exemples étrangers. Que ne trouverez-vous pas dans ce grand Cardinal, dont la préfence pour la première fois nous embarraffe, & met des bornes à une effufion de cœur, qui d’elle même n’en auroit pas ; en qui ce que l’on révère le moins, c’eft l’éclat du rang, la fplendeur de la naiffance, ces alliances avec les Maifons Souveraines, tant de fois renouvelées, & qui viennent de fe renouveler encore ; qui n’eft redevable de la confidération où il fe voit, qu’à lui-même, à fes talens, à cette noble affabilité, à cette éloquence naturelle qui lui gagnent les cœurs en les charmant ? Révéré à la Cour ; généralement honoré dans une Province d’ont il eft le père ou l’ami autant que l’Évêque ; chéri des citoyens, de ceux mêmes que l’Eglife gémit de ne pouvoir compter au nombre de fes enfans ; recherché comme adoré de tous les étrangers.

 

Puiffiez-vous, MONSIEUR, être long-temps témoin de tant de rares qualités, & vous former fous les yeux d’un fi illuftre maître, à ce que l’Eglife & l’État ont droit d’attendre de vous ! Puiffiez-vous, trouvant dans le fein de votre famille l’amour des Sciences & des Lettres, l’y maintenir, & conferver pour ceux qui les cultivent, cet accueil plein de bonté, qu’ils font en poffeffion d’y trouver, & qui fera toujours pour les Grands la plus digne décoration de leur Maifon, & pour les Gens de Lettres la récompenfe de leurs travaux la plus flatteufe ! Puiffent enfin l’oncle & le neveu l’honorer toujours de leur bienveillance une Compagnie, qui leur rend de cœur & d’inclination tout ce que l’élévation de leur état exige, & tout ce que leur mérite perfonnel infpire.