Discours de réception de Jean-Jacques Amelot de Chaillou

Le 25 août 1727

Jean-Jacques AMELOT de CHAILLOU

DISCOURS

Prononcé le Jeudi 25. Août 1727.

Par M. AMELOT DE CHAILLOU, lorfqu’il fut élû, par Meffieurs de l’Académie Françoife, à la place de feu M. DE NESMOND, Archevêque de Touloufe.

 

MESSIEURS,

Je ne viens point vous confoler de la perte d’un illuftre Prélat, qui mérite tous vos regrets. En fuccedant ici à M. l’Archevêque de Touloufe, auffi recommandable par fes vertus, que par fes rares talens, & dont la mémoire fera à jamais révérée dans ces grandes Eglifes qu’il gouverna avec tant de douceur & de paix ; je ne me fuis point flaté de remplacer un Confrére, qui vous étoit fi cher, ni d’atteindre à cette éloquence fublime, dont il confacra les prémices avec tant de fuccès dans les Chaires Chrétiennes, & qui le rendit dans la fuite un des plus grands ornemens de l’Académie. Je n’ai afpiré qu’à devenir votre Difciple ; content de ce titre glorieux, je n’effayerai point de juftifier un choix, que je ne dois regarder que comme une grace. Je viens feulement par des témoignages publics de refpect & de reconnoiffance, m’acquitter de l’hommage qui vous eft dû par vos Eleves.

C’eft le feul tribut qu’ils puiffent offrir à cette Compagnie, & à fes illuftres Protecteurs : Ce n’eft point par des éloges trop au­deffus de leurs forces, qu’ils peuvent honorer ces grands noms, à qui l’Académie doit fa naiffance & fon éclat. Vous feuls, MESSIEURS, fçavez parler dignement de ce gland Magiftrat, qui prit la place de votre fameux Fondateur, vous feuls pouvez célébrer les actions immortelles de LOUIS LE GRAND & la gloire naiffante de notre jeune Monarque, qui nous flate déja de l’efperance de le voir bientôt marcher fur les traces des plus grands Rois.

Inftruit dès l’âge le plus tendre dans l’art de régner, le poids du fceptre n’a point effrayé fa jeuneffe. Il s’eft hâté de prendre lui-même l’adminiftration de fon Royaume, & de faire fervir au bonheur du monde, des vertus qui ont été cultivées avec tant de foin. La guerre lui offroit des triomphes & des lauriers ; mais le repos de fes fujets lui paroît préferable à toutes les conquêtes. Ce n’eft point la terreur, mais l’amour de font nom qu’il veut répandre. Il veut que l’Europe qui connoit fa puiffance, admire fa juftice & fa moderation. Secondé dans fes généreux deffeins, par un Miniftre fidéle, dont la prudence prévoit tous les évenemens, dont l’application fur-monte tous les obftacles, dont la fageffe attire la confiance des Nations ; il en devient le médiateur & l’arbitre ; & nous jouiffons enfin de cette paix defirée, qui lui permet de répandre fes graces fur un Peuple dont la félicité fait fon unique objet.

Que peut-il manquer à la gloire de la France, que de la voir affermie par la pofterité nombreufe du Prince qui fait fon bonheur. L’heureux évenement qui caufe au jourd’hui l’allegreffe publique, nous eft en quelque forte un gage affuré de l’accompliffement de tous nos vœux.