Communication à l’Université libanaise, Beyrouth

Le 10 octobre 1994

Maurice DRUON

UNIVERSITÉ LIBANAISE

CONFÉRENCE DONNÉE PAR

M. MAURICE DRUON
secrétaire perpétuel

Beyrouth, le 10 octobre 1994

 

 

Me retrouver au Liban, si cher à ma mémoire, si présent en ma culture, et dont j’ai ressenti constamment les souffrances au long des tragédies qu’il a vécues dans les temps récents, avoir la faveur de m’adresser, dans l’Université libanaise, à un tel auditoire que celui ici réuni, apporter au Liban le témoignage du constant intérêt que l’Académie française porte à sa vie intellectuelle, voilà qui me procure autant d’émotion que de joie.

Et voilà qui m’inspire aussi de vous entretenir de trois sujets, en vérité fort liés, et qui peuvent vous importer : la langue française, l’espace francophone, et la place que vous, Libanais, occupez dans cet espace.

« La langue française patrie sans frontières. »

Il y a plus de vingt ans que j’ai employé pour la première fois cette expression. Aujourd’hui que de choses sont dites « sans frontières », que d’organisations s’intitulent « sans frontières » ! Mais je tiens que c’est le langage français qui justifie le mieux ce terme, et jamais il ne m’aura paru plus légitime qu’ici. C’est grâce à cette langue que je puis m’adresser à vous sans truchement ce mot d’origine araméenne — je le signale pour le plaisir des étymologistes — passé en grec byzantin, puis en arabe, pour se glisser en français, au temps des Croisades, avec son doublet drogman, et entrer finalement dans le Dictionnaire de l’Académie en 1835. Quand, au XIXsiècle, Lamartine, Gérard de Nerval, Gustave Flaubert voyageaient ici ou dans vos parages, ils pouvaient bien souvent se passer d’un drogman.

Pourquoi la langue française a-t-elle acquis son universalité ? Ici, comme ailleurs, et une fois encore, je répéterai que, parmi toutes les langues actuellement parlées, qui ont chacune leurs vertus propres, chez l’une la brièveté, chez l’autre la musicalité incantatoire, ce qui distingue la langue française est la clarté, la précision, la rigueur. Elle est issue du latin et en a l’efficacité; mais sa syntaxe s’apparente à la syntaxe grecque, ce qui lui permet d’exprimer sans ambiguïtés toutes les nuances de la pensée.

Langue juridique par excellence, elle ne tolère pas le flou. Elle est la langue avec laquelle, correctement employée, l’homme ne peut pas tromper l’homme.

Je sais bien des déclarations des Nations unies, et même des traités européens, qui auraient eu avantage à être rédigés originellement en français.

Quand la Papauté a eu à élaborer, dans les toutes récentes années, un nouveau catéchisme qui vaut pour tous les catholiques du monde, elle a choisi d’en établir la version originale en français, pour la faire traduire ensuite en latin, et à partir de là dans toutes les autres langues.

Ce n’est pas à cause de la puissance de la France, c’est à cause de ses qualités propres que le français a été si longtemps la langue diplomatique.

C’est que le français est en soi une méthode pour l’esprit. Tout adolescent, à notre époque, qui veut appartenir aux élites, qu’elles soient scientifiques, littéraires, universitaires, administratives ou politiques, doit maîtriser, en plus de sa langue nationale, une ou deux des grandes langues universelles. La langue française me paraît alors de nécessité, parce que son aptitude à la définition et à l’abstraction lui permet d’exprimer ce qui est commun à tous les hommes et de saisir ce qui appartient spécifiquement à chaque peuple.

Elle est la langue de l’essentiel. Et j’aime que ce soit un Libanais, Salah Stétié, qui ait dit qu’elle avait vocation œcuménique, ce pourquoi il l’estimait irremplaçable.

Ce n’est donc pas seulement avec la France que le français met en contact ; c’est avec tous ceux qui l’entendent et le pratiquent dans le monde ; et c’est tout d’abord avec le demi-milliard d’hommes sur la Terre qui vivent dans ce qu’on peut appeler l’espace francophone.

Parlons donc à présent de la Francophonie.

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Le mot lui-même n’a qu’un peu plus d’un siècle. On le doit, dit-on, au géographe Onésime Reclus qui entendait désigner ainsi les territoires et les pays où le français, sans être nécessairement la langue maternelle, était le signe d’une appartenance à la vie internationale autant que d’attachement à une civilisation. Point de vue qui n’était donc ni démographique ni statistique. Le français, pour Reclus, comme pour nous aujourd’hui encore, était une langue de dialogue, la langue des dialogues.

C’est à Léopold Sédar Senghor, alors Président de la République du Sénégal, qu’il devait revenir de donner à la notion, de Francophonie tout le poids de sa conviction et de son prestige, avant de lui donner une réalité géopolitique; c’est lui qui a exprimé le mieux notre credo : « Nous nous exprimons en français parce que le français est une langue à vocation universelle... Je sais ses ressources pour l’avoir goûté, mâché, enseigné, et qu’il est la langue des dieux. » C’est lui aussi qui a dit : « Dans les décombres de la décolonisation, nous avons trouvé cet outil merveilleux, la langue française. »

Font partie de l’espace francophone les populations de tous les pays où les lois et décrets, la valeur des monnaies et des timbres, les chèques bancaires, les indications routières sont écrits en français, ou en deux langues, dont le français.

Font partie de l’espace francophone tous les pays où le français, pour des raisons historiques et culturelles, est d’usage général ou généralisé. Ainsi le Maroc, pays arabophone, qui, pour ces raisons, se trouve dans l’espace francophone et y joue un rôle important. On peut en dire autant du Liban.

À quoi s’ajoutent, dans les autres pays, toutes les personnes, qu’elles forment communauté ou non, qui utilisent le français comme langue d’échange interne ou de communication internationale.

Un demi-milliard d’hommes, liés par l’emploi d’une même langue, c’est-à-dire, peu ou prou, par les mêmes schémas mentaux, cela constitue une puissance politique, au plus haut sens du terme, une masse d’influence à l’échelle planétaire qui s’est, petit à petit, organisée.

Puis-je rappeler, pour évaluer les positions du français dans le monde, qu’il est, à parité avec l’anglais, l’une des deux langues de travail des Nations unies, l’une des deux langues de travail de l’UNESCO, l’une des deux langues officielles du Conseil de l’Europe et de l’O.C.D.E., une des trois langues officielles de la Conférence islamique, qu’il est également la langue de l’Union philatélique internationale, la première langue des Jeux olympiques, et qu’il demeure, ce qui n’est pas mince, la langue diplomatique du Vatican.

Dès le milieu des années 70, le président Senghor, lui encore, prit l’initiative de susciter la création de ce qu’il appelait un « commonwealth à la française » ; mais ce n’est qu’en février 1986, à Versailles, que se tint la première Conférence « des chefs d’État et de gouvernement des pays ayant en commun l’usage du français », comme on s’accordait à l’époque à l’appeler.

Ce fut, je m’en souviens, une fête de famille, le sommet des retrouvailles, de l’allégresse et de l’espérance, autour de celle qui était pour tous une ancêtre commune, l’ancêtre immatérielle, la langue française. On se parlait sans interprète, chose rarissime dans une conférence internationale. On apprenait à se connaître, se reconnaître, ou se mieux connaître, grâce aux mêmes mots porteurs des mêmes sens. Entre des pays géographiquement dispersés sur les cinq continents, et aussi dissemblables que le Vietnam et la Belgique, la Côte-d’Ivoire et l’île Maurice, le Canada et la Tunisie, la Suisse, Madagascar ou le Bénin, apparut un évident cousinage, non par le sang, mais par la parole. Quarante et un pays étaient présents, le quart des Nations unies. Très frappante la participation de l’Égypte, pays où les francophones sont en très faible nombre, mais où le français est une tradition de culture.

Même atmosphère dix-huit mois plus tard, donc en 1987, à Québec. En 1989, à Dakar, les délégations étaient au nombre de quarante-quatre. En 1991, à Paris, elles étaient quarante-cinq, deux pays ayant demandé à rejoindre : la Roumanie et la Bulgarie. En 1993, à l’île Maurice, nous étions quarante-sept. Nous serons sans doute bientôt cinquante.

Deux semaines avant la réunion de Maurice, j’avais formulé plusieurs vœux dont le premier concernait la dénomination même de la Conférence.

Plutôt que de parler d’» usage commun » du français, il me paraissait plus exact et plus généreux d’indiquer que cette langue, nous l’avions tous « en partage » : partage des valeurs dont elle est la mémoire, partage avec d’autres langues, partage des difficultés et des espérances entre les peuples adhérents. Ce vœu a été adopté. La Conférence s’appelle désormais « des pays ayant le français en partage ».

C’est le partage donc qui soutient notre volonté. Car la langue française est une volonté. Rappelons-nous que rien n’est advenu à la langue française qui ne soit l’effet d’une décision, je dirai même clairement d’une décision politique. L’ordonnance de Villers-Cotterêts, en 1549, qui imposa le français dans tous les actes judiciaires ; la création de l’Académie française, en 1635, et la publication de son Dictionnaire tous les cinquante ans environ ; les lois de la République sur l’enseignement obligatoire du français sont autant de décisions sans lesquelles la langue que nous partageons n’existerait pas. Et la loi récente, dite loi Toubou, sur l’emploi du français en France est dans le droit fil de cette politique-là.

La Francophonie ne saurait elle-même se concevoir, se construire, se développer en tous ses domaines, sans une politique de la langue. Politique intérieure pour chaque État, politique tournée vers l’extérieur, politique d’ensemble.

Contrairement à ce qu’on croit, ou qu’on veut faire croire, l’enseignement du français dans le monde est en progression. Il est en progression dans les pays mêmes de la Conférence par l’accroissement, non uniforme mais certain, de la scolarisation dans les pays dits en voie de développement. Il est en progression dans des pays où il était à peu près inconnu il y a vingt ans, en Afrique et Océanie anglophone, en Indonésie, ou dans les États du Golfe. S’il est en régression, c’est, paradoxalement, dans l’aire géographique des langues latines, en Italie ou en Espagne.

Je voudrais souligner l’effort de la France dans cette grande affaire de l’enseignement. Aucun pays au monde n’entretient plus d’établissements scolaires en dehors de ses frontières; aucun n’a autant d’écoles, de collèges, de lycées. Aucun n’exporte plus d’enseignants.

Il y a quinze jours, en Finlande, pays où, comme dans toute la Scandinavie, la langue de communication internationale est l’anglais, j’inaugurais le nouveau lycée franco-finlandais d’Helsinki. Il ouvre ses portes cet automne; il est tout neuf; il a déjà huit cents élèves, et il est forcé, déjà, de refuser des inscriptions.

Or, malgré ce vaste effort, on manque d’enseignants de français dans le monde. La France ne peut suffire à répondre à la demande. Et c’est là où la Francophonie organisée entre en jeu. Je préconise que d’autres pays, où la pratique du français atteint un haut niveau, prennent le relais; que, notamment pour l’enseignement primaire, de jeunes Sénégalais, Marocains, Tunisiens, et Libanais, après un stage pédagogique accéléré, aillent enseigner en français les disciplines essentielles là où il y a manque de formateurs. Ce qui réduira d’autant le chômage chez de jeunes diplômés ne trouvant pas de débouchés, et qui favorisera le brassage des cultures. Et qui favorisera aussi les échanges économiques. Car on a trop tendance à ne regarder le français que comme une langue de culture, et pas assez comme une langue de pénétration économique, une langue qui ouvre de nombreux marchés.

Il y a là-dessus un abondant et remarquable rapport du Conseil économique et social français qui mérite d’être médité par les responsables des activités commerciales, industrielles et financières.

Mais il y a une autre forme de volonté francophone, et qui ne dépend que de chacun de nous ; celle de parler et d’écrire le français aussi correctement que possible, afin de lui garder les caractères qui le font irremplaçable et les vertus par lesquelles il est un cadeau pour l’humanité.

Or, la langue française connaît la crise qui atteint en ce siècle toutes les langues maternelles ; elle tend à se dégrader sous l’effet du mauvais parler médiatique, de méthodes pédagogiques aberrantes, de la démagogie langagière, des distorsions volontaires que lui fait subir la publicité, par l’infiltration ou l’inondation d’une langue commerciale qui est celle du dollar.

Elle résiste à cette dégradation peut-être mieux que d’autres, notamment l’anglais. Mais les atteintes et altérations lui sont plus préjudiciables qu’à d’autres, puisque sa qualité réside précisément dans la rigueur et la pureté.

D’où le combat que mène l’Académie française, obstinément, rappelant les malfaiteurs à l’ordre ; et d’où les mesures édictées par le Parlement et le gouvernement français pour contenir la vague déferlante d’expressions empruntées ou mal forgées qui détruisent son génie.

Je voudrais ici souligner un point bien précis. Il ne s’agit pas pour nous de traiter la langue anglaise en langue ennemie. Tout au contraire, je tiens, et nous tenons l’anglais pour une langue alliée, parce que le français et l’anglais sont les deux langues universelles porteuses intrinsèquement des valeurs de liberté. Et je ne vous cache pas que l’un de mes souhaits les plus chers est que l’anglais soit la première langue étrangère de tous les francophones, et le français la première langue étrangère de tous les anglophones.

Mais le bon anglais et le bon français. Et non pas un universel jargon que j’appelle l’anglo-ricain, et qui, mêlé à tous les idiomes du monde, deviendrait bientôt la langue de Babel.

Il y a de merveilleux procédés techniques américains pour faire imploser les tours d’acier et de béton et les faire tomber sur elles-mêmes, dans un flot de poussière. L’altération de nos langues provoquerait l’implosion de nos cultures, dont il ne resterait que poussières.

Je dois dire que je constate souvent, avec un mélange de bonheur et de chagrin, que les francophones hors de France ont plus de souci de respecter la langue française que mes compatriotes eux-mêmes, et qu’ils y mettent leur point d’honneur. C’est un de vos grands poètes, Nadia Tuéni, qui a écrit :

« Ne jetez pas les vieux mots,
J’en ferai des fleurs. »

 

Qu’on se rappelle à jamais cette parole, sortie de son cœur et de votre terroir, et qui la gardera, c’est la grâce des poètes, à jamais vivante parmi nous !

Voilà qui m’amène tout naturellement à évoquer la place du Liban dans l’espace francophone

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Non, je ne vais pas remonter aux Croisades.

Non, je ne vais pas vous dire que la langue française est ici présente depuis le XVIe siècle. Non, je ne vais pas vous dire qu’elle y vint avec les missionnaires et y demeure grâce aux écoles et collèges qu’ils fondèrent.

Je ne vais même pas vous parler de tous ces établissements scolaires et de ces universités célèbres, comme celles de Saint-Joseph, du Saint-Esprit ou de Balamand où ont été formés tant de Libanais éminents d’hier et d’aujourd’hui.

Parce que vous penseriez que je viens vous rabâcher ce que vous connaissez tous, et mieux que moi. C’est le piège du voyageur que de croire qu’il faut raconter à ses hôtes leur propre histoire.

C’est sur la littérature libanaise d’expression française que je veux m’arrêter parce qu’elle est sans doute la plus riche et la plus nombreuse de toutes les littératures francophones produites hors de France.

Sa tradition remonte à près d’un siècle, un grand siècle au double sens du terme.

C’est à la langue française, ne l’oublions jamais, que le Liban confia de revendiquer la reconnaissance de son caractère propre et unique ; c’est par la langue française qu’il accéda à l’indépendance morale et culturelle qui précède toutes les indépendances politiques.

Tel est le choix de la génération qu’on pourrait appeler des fondateurs, celle de Khalil Ghanen et Chekri Ganem, puis de Najim Azouri. Et c’est Paris que choisissent les écrivains de combat pour faire entendre la sonorité nouvelle de la voix libanaise, avec la Correspondance d’Orient et la Revue islamique. Paris devient la seconde patrie de l’esprit du Liban.

Suit la génération de Charles Corm, d’Hector Klat, d’Elie Tiané, la génération de la Revue phénicienne, celle dont nous pouvons saluer encore, parmi nous, Saïd Akl, à qui l’on pourrait décerner le titre de prince des poètes, lui qui écrivit en arabe son inoubliable Cadmus, mais dont l’âme et l’inspiration s’inscrivent hautement dans ce mouvement, témoignant pour l’une des deux composantes essentielles de la personnalité libanaise.

À partir des années 20 de ce siècle, nous assistons à un jaillissement continu de talents, à un ruissellement d’œuvres de grand retentissement, avant et après la seconde guerre mondiale, et qui ne cesse pas. On parle souvent de Pléiade en parlant des écrivains d’une époque; on pourrait, pour le Liban, parler de galaxie, avec ses grandes et ses petites étoiles.

Dans cette galaxie, le nom de Georges Schéhadé, mon ami Georges Schéhadé, brille de l’éclat d’un astre majeur.

C’est à lui que l’Académie française a voulu, à l’unanimité, en 1986, attribuer le premier Grand Prix de la Francophonie, lorsque celui-ci fut fondé, par accord entre le Premier ministre du Canada et votre serviteur. Ainsi nous fîmes de Georges Schéhadé un symbole.

Chaque année l’Académie décerne plusieurs de ses distinctions à des écrivains libanais. Non pas parce qu’il y a un contingent réservé pour eux. Mais parce que leurs œuvres nous apparaissent de réelle excellence et parce qu’elles contribuent au rayonnement de la langue française.

Dans les seules huit dernières années, depuis que j’ai l’honneur et la charge d’être le Secrétaire perpétuel de cette vieille Compagnie, je relève dans nos palmarès les noms du Père Louis Hage, de l’ambassadeur Camille Aboussouan, du Père Selim Abou, de l’ambassadeur Adel Ismail, de Salah Stétié, du Père Saïd Elias Saïd, de Gérard Khoury, du Père Mansour Labaky, qui nous fit tous pleurer avec l’Enfant du Liban, du romancier Amin Maalouf.

Cette année même nous avons couronné Édouard Azouri pour ses poèmes, et c’est à une Libanaise que nous avons réservé notre plus haute distinction, le Grand Prix de Littérature : Andrée Chedid.

Non ; je ne puis citer toutes les étoiles de la constellation Liban dans le ciel des lettres françaises. Étoiles d’hier et d’aujourd’hui, il faudrait, pour rendre à chacune sa juste place, cette grande anthologie de la littérature libanaise de langue française dont nous évoquions le projet, avant-hier, avec le président Charles Hélou, que l’Académie naguère accueillit en son privé, hommage qu’elle n’a réservé qu’à quinze souverains ou chefs d’État en trois siècles et demi. Parce que c’était lui, et parce que c’était le Liban.

Mais que de projets ont été envisagés au long de mon voyage où j’aurai vu et le nord et le sud du pays, et où j’aurai eu l’honneur de m’entretenir avec les plus hautes autorités de l’État, comme avec les représentants de la plupart de vos communautés

Projets d’un Institut de haute technologie, et d’un Institut des sciences de la gestion dont Monsieur l’Ambassadeur de France a bien voulu s’ouvrir à moi; projets pour la presse francophone où j’ai trouvé auprès de la direction de votre grand quotidien L’Orient Le Jour une attention que je qualifierai d’enthousiaste.

Il me reste encore à aller revisiter Baalbek, à y retrouver comme je les ai retrouvés à Byblos, les vestiges grandioses des civilisations mortes, et l’expression de la création culturelle moderne.

Je reviendrai dans mon pays empli de joie, car j’aurai constaté la permanence du tempérament libanais. J’aurai vu et senti combien rapidement les déchirements s’effacent ; j’aurai apprécié l’ardeur à reconstruire ; j’aurai reconnu que le ciment de l’unité libanaise s’appelle l’espoir. J’en porterai témoignage.

Et je témoignerai aussi qu’au Liban plus que nulle part au monde, la langue française est, reste et demeure ce qu’elle fut toujours à mes yeux : une patrie sans frontières.

Puisse Dieu vous accorder de rester fidèles à vous-mêmes ; et, avec cela, tout le reste vous sera donné.